Index des revues

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    Motions du congrès de Bourges


    Motion sur la censure

    Lettre ouverte aux élus républicains

    L'abolition du contrôle préalable des publications par l'État, en 1881-1882, a représenté un moment décisif dans l'établissement des libertés publiques en France elle s'est progressivement étendue, avec l'évolution des textes et des moeurs, au cinéma et aux médias audiovisuels.

    Proposant au choix des citoyens et des futurs citoyens des collections encyclopédiques et plurielles, participant à l'apprentissage de leur usage et de ses choix, la bibliothèque publique est indissociable de la liberté d'expression : la liberté de lire prolonge la liberté de publier.

    Le fait que des pouvoirs administratifs ou politiques, locaux ou nationaux, agissant d'eux-mêmes ou cédant à des groupes de pression de plus en plus offensifs, interviennent directement dans la composition des collections en ordonnant l'achat ou le retrait de titres donnés constitue un acte de censure, non l'exercice normal par la collectivité organisatrice de sa responsabilité en matière d'orientations culturelles.

    L'Association des bibliothécaires français constate une multiplication des atteintes de ce genre à l'esprit de la démocratie et à la liberté d'expression.

    Les textes dans leur lettre s'avèrent impuissants à enrayer l'arbitraire et le devoir de réserve empêche même les bibliothécaires qui en sont témoins et victimes de porter ces faits à la connaissance de la presse et du public quand ils se produisent.

    Le professionnalisme des bibliothécaires est en l'état la plus sûre garantie du pluralisme et de la diversité des collections, le meilleur rempart contre la confiscation de la bibliothèque publique par des idéologies ou des morales particulières.

    Nous demandons aux élus qui ont la responsabilité des bibliothèques publiques :

    • de renoncer par principe à ce type d'interventions directes,
    • * de reconnaître une pleine délégation au bibliothécaire sur la composition des collections,
    • * d'en appeler au contrôle technique de l'État institué par le décret 88-1037 si le résultat des choix d'acquisitions effectués par les bibliothécaires semble poser des problèmes.

    Nous demandons à l'État d'exercer véritablement ce contrôle technique dans les situations de conflit et de rendre publics les rapports d'inspection portant sur le respect de la diversité des collections.

    Motion adoptée en Assemblée générale à l'unanimité, le 17 mai 1998, à Bourges.

    Motion sur le droit de prêt

    En revendiquant l'instauration d'un droit de prêt acquitté par les usagers des bibliothèques publiques, certains acteurs de l'économie du livre tentent de trouver des solutions à des difficultés économiques réelles.

    L'Association des bibliothécaires français est bien au fait de ces dysfonctionnements de la filière livre mais estime qu'un prélèvement supplémentaire sur les moyens consacrés à la lecture par les collectivités publiques déstabiliserait gravement les bibliothèques sans remédier à ces difficultés.

    L'Association rappelle que la concurrence entre achat et emprunt n'a jamais été prouvée. Nous pensons, bien au contraire, que nous multiplions les lecteurs pour le profit de tous et que nous contribuons aussi à faire connaître la partie la moins évidente de la production.

    L'instauration d'un droit de prêt pesant sur l'usager viderait les bibliothèques et modifierait profondément et négativement le comportement du lectorat, dissuadé d'user de curiosité et taxé proportionnellement à sa pratique de lecture, que nous sommes censés encourager... Le système de perception d'un droit de prêt constituerait par ailleurs une charge de gestion indue et insupportable sur les collectivités publiques.

    L'hypothèse d'une prise en charge de ce droit par les collectivités amputerait lourdement les budgets d'acquisition des bibliothèques, entravant le travail de promotion du livre qu'elles exercent par leurs achats.

    L'Association des bibliothécaires français invite les auteurs et les éditeurs un tant soit peu au fait des réalités des bibliothèques et de l'économie du livre à se désolidariser des revendications abusives d'une partie de leurs représentants, en particulier des dirigeants du Syndicat national de l'édition et de la Société des gens de lettres.

    L'Association des bibliothécaires français invite l'État à ne pas céder aux pressions de ceux-ci, à améliorer l'emploi des multiples aides et institutions destinées à l'économie du livre et au soutien de la création. Elle demande au gouvernement de faire jouer systématiquement les dérogations sur les usages non commerciaux prévus par les directives européennes dans le souci du service public.

    L'Association des bibliothécaires français alerte également les collectivités publiques sur la menace de ces nouveaux transferts de charge, contraires au développement des bibliothèques publiques.

    Adoptée en Assemblée générale de l'ABF le 17 mai 1998, à l'unanimité moins 2 abstentions.

    Motion sur la liberté d'expression et de diffusion

    à l'Assemblée générale de l'association réuni à Bourges, le 17 mai 1998

    L'ABF, informée de l'interdiction économique faite à la diffusion d'un livre d'actualité, La Mafia des tribunaux de commerce, par Antoine Gaudino, tient à assurer son éditeur Albin Michel et les éditeurs solidaires du soutien des bibliothécaires à leurs actions pour la liberté d'expression. Déjà, il y a quelques mois, les publications des éditions du Lézard avaient été saisies sans jugement au fond dans des librairies « Furet du Nord ». À plusieurs reprises, des condamnations de titres de presse ou d'éditeurs sont intervenues au mépris de la loi du 29 juillet 1881.

    Pour l'édition, comme pour les bibliothèques, nous rappelons notre attachement à la libre information, pour garantir au citoyen l'accès le plus large et ouvert à la production littéraire et documentaire, sous tous supports, dans les librairies et dans les bibliothèques.

    Il apparaît que cette liberté est de plus en plus souvent limitée de fait par des taxes ou interventions financières, qui deviennent censure économique de fait.

    La conquête fondamentale de la suppression de la censure préalable dans l'édition ne peut souffrir d'être limitée de fait par des astreintes financières dictées par des lobbies ou de groupes de pression.

    La libre expression et la libre diffusion des idées doivent être sans cesse défendues, sous la seule réserve qu'elles ne soient pas l'occasion de diffusion d'idées révisionnistes et négationnistes, ou de textes incitant à la haine raciale, à la discrimination pour raisons ethniques ou religieuses.

    Par cette motion, nous souhaitons interpeller le ministre de la Culture et de la Communication et le ministre de la Justice sur les dérives graves qui pourraient advenir en cette matière.

    Adoptée en Assemblée générale de l'ABF le 17 mai 1998, à l'unanimité.

    Motion de soutien aux professionnels et acteurs culturels

    L'Association des bibliothécaires français, conformément à ses principes fondateurs, est constamment attentive aux libertés d'information et d'expression.

    Pour cette raison, elle s'engage à apporter son soutien aux créateurs et acteurs éducatifs et culturels, dont elle estimerait que le travail est indûment mis en cause, en particulier dans les régions dont les présidents ont été élus avec les voix du Front National.

    Adoptée en Assemblée générale de l'ABF le 18 mai 1998, à l'unanimité, moins 3 abstentions.

    Motion sur les bibliothèques de l'Université

    Réunie en Assemblée générale statutaire le 18 mai 1998, l'ABF réaffirme qu'aucune université ne peut remplir ses missions sans bibliothèque gérée par des professionnels en nombre suffisant. Les bibliothèques de l'université participent complètement à la pédagogie et à la recherche.

    Elles sont un instrument privilégié dans la lutte contre l'échec scolaire et pour le développement de la recherche.

    Pour remplir leurs rôles et leurs fonctions, les services documentaires doivent être organisés sur des bases professionnelles. Il faut éviter la dispersion des moyens des collections et des personnels. Ceux-ci doivent bénéficier d'une réelle formation professionnelle de base et de formations continues adaptées.

    La coopération documentaire exige une politique cohérente et volontariste, en particulier là où plusieurs universités cohabitent. Nous militons pour la poursuite du développement d'un véritable réseau documentaire national d'accès à l'information.

    Nous défendons le principe d'égalité d'accès à l'information spécialisée, qui dépasse les seuls intérêts économiques, et la renaissance du rôle fondamental des bibliothécaires au sein des universités et institutions contribuant à la recherche.

    Adoptée en Assemblée générale de l'ABF le 17 mai 1998, à l'unanimité des présents.