Tous ceux qui exercent le métier de bibliothécaire en France, beaucoup de ceux qui le pratiquent à l'étranger déplorent la perte d'un de ceux qui comptaient parmi les meilleurs.
La carrière de François Reiner est connue. Commencée à l'université de Paris-IX Dauphine, elle s'est poursuivie avec la création, la mise en service et le développement de la Médiathèque de la Villette, un grand projet qui, comme la Bibliothèque nationale de France, connut des débuts difficiles pendant les trois premières années. Cette carrière s'est interrompue brutalement alors que François venait de prendre la direction des systèmes d'information à la Fondation nationale des sciences politiques.
Doté de très solides qualités personnelles, d'une grande culture, d'une grande curiosité intellectuelle, d'une capacité peu commune à assimiler des connaissances et des technologies nouvelles, François Reiner s'est imposé à la Cité des sciences par son autorité personnelle et sa capacité unique à entraîner avec lui une équipe d'hommes et de femmes qu'il savait associer à l'ensemble de ses objectifs. Assez rapidement et bien au-delà de Paris, sa réputation a atteint l'ensemble du milieu professionnel.
Ses interventions dans les colloques, les conférences étaient très attendues car extrêmement stimulantes, ouvrant des voies nouvelles de réflexion et d'action. Capable de renouveler complètement une problématique, François était devenu au fil des années un expert reconnu et, à ce titre, il avait été appelé à siéger au conseil scientifique de la Bibliothèque nationale de France. Il était souvent sollicité comme consultant aussi bien en France qu'à l'étranger, pour rendre un avis éclairé sur des problèmes d'organisation dans le domaine de l'informatique documentaire ou de la programmation des bibliothèques.
Il faut souligner à cet égard le rôle qu'il a rempli auprès du directeur de la bibliothèque publique de San Francisco dans l'élaboration d'un programme de construction qui s'est réalisé et qui lui tenait à coeur. On sait peut-être moins qu'il est intervenu comme expert par exemple auprès des universités de Strasbourg ou dans d'autres institutions en Europe.
Formateur très doué, il avait animé de nombreux stages nationaux et internationaux, et il avait sans doute compris parmi les premiers la notion d'ingénierie de la formation en sciences de l'information, qu'il avait mise en pratique à la Cité des sciences. Il a été un des premiers professionnels français à incarner véritablement l'« information scientist et les plus grands spécialistes s'accordaient à reconnaître sa capacité à construire une vision anticipée de l'usage des nouvelles technologies.
L'ayant côtoyé pendant quasiment trente ans, d'abord comme camarade de promotion et très vite comme ami, je me souviens particulièrement de son sens critique allié en permanence à un humour décapant mais tonique, qui nous permettait de surmonter les situations difficiles et finalement d'envisager le côté positif des choses en préparant la construction de solutions.
Sa dernière volonté a été d'organiser une rencontre entre tous ceux qu'il aimait. Cette volonté est symbolique de la vie d'un homme placé avant tout du côté des autres, et qui comptait de très nombreux amis de tous milieux et de toutes conditions.