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    France Pascal (1918-1999)

    Par Louis Yvert, Inspecteur général honoraire des bibliothèques
    Par Else Delaunay, Ancien conservateur Bibliothèque nationale de France
    « Il y a des fleurs qui éclosent spécialement pour les articles nécrologiques. » André Breton, « Jacques Vaché », Les Pas perdus.

    En n poste à la Nationale dans les années 1960, c'est en observant France Pascal que j'ai appris certaines choses qui m'ont paru tout à la fois simples et importantes.

    Qu'un fonctionnaire - fût-il le meilleur dans sa spécialité - n'est bon qu'à moitié s'il ne fait preuve de probité et de rigueur intellectuelle et morale.

    Qu'un bibliothécaire - fût-il expert dans des travaux aussi complexes que la conception et la rédaction du Catalogue collectif des périodiques dont elle avait la charge - n'est pas tout à fait bon s'il n'a le constant souci de rendre service au public.

    Qu'il n'est de bon bibliothécaire que bibliothécaire-chercheur utilisant les instruments que ses collègues et lui-même ont élaborés pour répondre aux besoins de ce public.

    Qu'un bibliothécaire-bibliographe - fût-il spécialisé dans un domaine particulier, telle France Pascal dans celui des périodiques ou celui de l'oeuvre de Mistral - ne peut bien maîtriser ce domaine sans une solide culture historique, littéraire et scientifique.

    Qu'un syndicaliste ne peut valablement défendre les personnels des établissements et services qu'ils ont pour mission de faire fonctionner sans avoir aussi le souci de promouvoir et d'améliorer ces établissements et services.

    De son vivant, je ne lui aurais pas dit ces choses car elle n'aimait guère la pompe. Aujourd'hui, je dirai que ce fut pour moi un honneur et un bonheur de bénéficier de ses conseils et de son exemple. Et de son amitié.

    Aux termes de sa scolarité aux Chartes (1940-1944), France Pascal soutint une thèse sur un poète du XVesiècle, en réalité deux poètes distincts, ce qu'elle démontra par l'analyse des textes (1) .

    Elle fit toute sa carrière à la Bibliothèque nationale, de 1945 à 1982. Après trois ans à la Bibliographie de la France, elle fut affectée au Catalogue collectif des périodiques, qu'elle dirigea de 1956 à 1979 et dont elle assura l'édition provisoire ronéotypée puis l'édition définitive (2) : un instrument dont elle disait dans l'avant-propos qu'il était « à la fois catalogue et bibliographie » et qui reste, à côté des nouveaux outils informatisés, irremplaçable.

    Bibliothécaire et bibliographe, France Pascal l'était en effet : c'est elle qui établit la bibliographie de Mistral dans la Bibliographie des auteurs modernes de langue française de Talvart et Place, t. 18, 1968, p. 69-221.

    De 1976 à 1979, tout en gardant la responsabilité du Catalogue collectif, elle fut l'adjointe de Jean Prinet, conservateur en chef du Département des périodiques, auquel elle succéda. Durant ses trois années de direction du département, elle prit d'importantes décisions dans différents domaines : ouverture quotidienne de la salle de lecture de l'annexe de Versailles, mesures de conservation de la presse nationale et régionale (thermocollage, microfilmage) dans le cadre du centre André-François-Poncet pour la conservation et la communication de la presse, créé à Provins en 1981, et en coopération avec l'ACRPP (Association pour la conservation et la reproduction photographique de la presse), etc.

    Comme militante syndicaliste, elle oeuvra avec ardeur à l'amélioration des conditions de la profession à tous ses niveaux au sein du Syndicat national des bibliothèques (FEN), dont elle fut secrétaire adjointe de 1967 à 1970 puis secrétaire générale de 1971 à 1974.

    Retraite prise, pendant onze ans, elle mit son expérience, sa culture et sa rigueur au service du Bulletin de la Société des amis du Muséum national d'histoire naturelle, dont elle fut la rédactrice en chef, travaillant en étroite collaboration avec le professeur Fontaine, président de la société et directeur de la publication.

    Atteinte de la maladie de Parkinson, elle se retira dans son Vaucluse natal, au pied du Ventoux, où elle vécut ses dernières années entourée de ses nièces. Elle est morte à Vaison-la-Romaine le 30 avril 1999.

    Gaieté, pragmatisme, humanité, sens de l'autre, autorité naturelle, rigueur intellectuelle et morale, vaste culture et curiosité d'esprit : ces qualités la faisaient respecter de tous. Grande professionnelle , elle était aussi une amie incomparable.

    1. Pierre Chastellain dit Vaillant, étude et édition. Résumé dans École nationale des chartes, Positions des thèses 1944, p. 131-136. retour au texte

    2. Catalogue collectif des périodiques du début du XVlf siècle à 1939 conservés dans les bibliothèques de Paris et dans les bibliothèques universitaires des départements. 4 vol., 1967-1977 ; le 5e, Additions et corrections, table, étant publié en 1981. retour au texte