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    Une bibliothèque spécialisée

    Le Centre français de documentation odonto-stomatologique

    Par Louis Dr Verchère, Directeur du C.F.D.O.S.

    Dans le cadre du thème général de cette réunion, nous vous présentons une bibliothèque spécialisée dans la documentation scientifique médicale, le Centre Français de Documentation Odonto-Stomatologique, le C.F.D.O.S.

    Il s'agit d'une bibliothèque rassemblant tous documents concernant les dents et la sphère bucco-maxillo-faciale. Elle a été créée à la fin du siècle dernier, en 1879, par un groupe de dentistes dans un but essentiellement pédagogique, ayant précédé d'un an la création de l'Ecole Dentaire de Paris. L'activité de cette bibliothèque n'a subi aucune éclipse depuis sa fondation, fondation dont nous fêterons le centenaire l'année prochaine.

    Depuis 1976, le C.F.D.O.S. a été rattaché à la Bibliothèque Interuniversitaire « C ». Il a été stipulé dans les clauses de la donation que le C.F.D.O.S. se place sur un plan national, c'est-à-dire qu'il ne dépend pas d'une faculté particulière et que d'autre part il a une vocation de recherche et ne constitue donc pas une bibliothèque d'intervention.

    Nous supposons que le domaine spécialisé dans lequel nous évoluons ne vous est guère familier. Sachez que la science odontologique a évolué comme toutes les autres branches médicales et scientifiques pendant ces dernières décades. L'instrumentation s'est modifiée, notamment par l'usage des tours à grande vitesse. Il y a de nouveaux matériaux de type résine dont l'emploi doit être strictement contrôlé biologiquement. La dent dans la cavité buccale est considérée dans son contexte biologique et ses rapports avec l'organismes en général, et non pas isolément, dans un corps amorphe, exsangue, sans coeur, sans tube digestif, sans rein, sans squelette, sans sensibilité. La prévention de la carie et de la perte prématurée des dents est un domaine en pleine expansion. La reconstitution prothétique est constamment remise en question pour l'amélioration de ses procédés. Les soins précoces aux enfants et l'orthodontie, c'est-à-dire la rectification des malpositions prennent une place de plus en plus importante dans l'optique d'une prophylaxie bucco-dentaire. Ce sont là quelques exemples parmi d'autres, qu'il serait fastidieux d'énumérer. Notre profession possède cette dualité d'être à la fois un métier dans lequel une technicité de haute précision se double du comportement intellectuel du biologiste. Mais toute cette évolution constitue une masse énorme de connaissances en mouvement dont le praticien, le chercheur, l'enseignants doit être informé. Il y a donc des cours de formation postuniversitaire, de formation continue, des publications sous forme de manuels, de périodiques de rapports de congrès. Il y a actuellement au C.F.D.O.S. 480 périodiques vivants. Mais, du fait de son ancienneté et de la pérennité de ses collections, il y a un total de 1.700 titres de périodiques dans la spécialité provenant de 59 pays et rédigés en 29 langues. Cette richesse nous vaut la consultation régulière du C.N.R.S., du Centre d'énergie atomique, de laboratoires, de pays étrangers et nous sommes bien souvent la bibliothèque du dernier ressort. Il y a, dans notre domaine comme dans tous les autres une explosion documentaire.

    Je vous rappellerai la fameuse histoire de Monsieur Koch à propos de la tuberculine : jusqu'au mois d'août 1890, cette substance était inconnue, elle n'existait pas. En août 1890 paraît un mémoire de Koch ; deux ans après, en 1892, le nombre des mémoires sur la tuberculine s'élevait à 596. Si l'on prend la pénicilline, le rapport sera encore plus extraordinaire, de 1 à 5.000 peut-être. Cette masse documentaire s'amplifie de 3 à 5,5 % par an selon 'les disciplines. Le document scientifique publié au 20' siècle a une vie moyenne qui varie de quelques décades à quelques mois et même quelques semaines. Il ne faut pas en déduire que cette masse imprimée devient inutile et qu'il est superflu de la conserver. Je veux dire qu'au fur et à mesure que le temps s'écoule, le public auquel s'adresse cette littérature change et que le nombre de ses lecteurs diminue pour tendre vers un petit reliquat d'historiens et de philosophes.

    Deux concepts relativement récents ont bouleversés les habitudes en matière d'utilisation des documents :

    • - Je premier concept est celui de la « formation continue ». Aucun praticien actuellement ne peut se reposer sur la formation acquise, la science progresse plus vite en quelques années actuellement qu'elle ne le faisait en plusieurs générations aux siècles précédents ;
    • - le second concept est celui des - sciences carrefour », si heureusement exprimé par mon compatriote Louis Armand, Cette notion correspond à celle de « cross fertilization » des anglo-saxons. Les sciences constituent des réseaux inter-disciplinaires de plus en plus serrés. La Bionique par exemple constitue un carrefour entre la biologie, l'électronique, la physique, la chimie, la pschchologie, la cybernétique et la technologie. La paléontologie fait appel à la géologie, à la paléoclimatologie, à la chimie et la physique nucléaire ; l'odonto-stomatologie fait appel à la physiologie, la biophysique, la mécanique, la métallurgie, la tribologie, la biologie. Le chercheur ou le praticien doit donc être à l'affût de toutes les nouveautés susceptibles d'éclairer son domaine, même si au départ elles proviennent de disciplines très éloignées.

    Ceci explique la création de périodiques récents qui ont pour nom : Journal of Biomechanics, Medical and Biological Engineering, Biorheology, Journal of Bioengineering dont le numéro 1 a paru en 1976. Chaque savant, chaque chercheur, chaque praticien, chaque étudiant ou enseignants est donc un client réel ou potentiel de la documentation.

    Depuis plusieurs années, une étape a été franchie dans la profession de chirurgien-dentiste, d'une part par l'intégration des écoles dentaires, jusqu'alors privées, au sein de l'université, d'autre part par la création d'un doctorat d'exercice et d'un doctorat en sciences odontologiques de troisième cycle.

    Ce fut le point de départ d'une émulation énorme et structurée de notre profession, tant sur le plan de l'enseignement, de la recherche que de la pratique quotidienne.

    Le grade de docteur s'obtient par la soutenance d'une thèse. Au début, la présentation des thèses était laissée au choix de l'impétrant. Mais, deux ou trois ans après la création de ce diplôme, toutes les facultés dentaires de France ont adopté un modèle unique de présentation, initiative dûe à la collaboration de M. Archimbaud, conservateur de la Bibliothèque de Médecine de Clermont-Ferrand, notre confrère Bachellerie, professeur à la Faculté de Chirurgie dentaire de Clermont-Ferrand et nous-même. Donc, actuellement, toutes les thèses ont le même format et, au dos de la couverture, on lit tous les renseignements nécessaires à une mise sur ordinateur.

    Ceci est un premier point.

    Mais, la préparation de la thèse nécessite d'être documenté sur le sujet. Une information de l'usager est donc nécessaire. Cette préoccupation nous a conduit à envisager des cours de bibliographie se rapportant à l'odonto-stomatologie. Nous en avions eu l'initiative dès 1969.

    Au cours d'un congrès Odonto-Stomatologique qui s'est tenu à Paris en novembre 1977 sous l'égide de l'Association Dentaire Française, une séance magistrale a été consacrée à « La Documentation, discipline à part entière. Son insertion dans les études Odontologiques ». A cette séance participaient Mme le Dr. Nicole-Genty, directeur de la B.I.U.C, M. Archimbaud, conservateur de la Bibliothèque de Médecine de Clermont-Ferrand, le Dr Bachèlerie, professeur à la Faculté de Chirurgie Dentaire de Clermont-Ferrand, Mlle Claude Boulanger, conservateur, responsable de l'audio-visuel à la B.I.U.C, le Pr. Jacques Chevallier, professeur agrégé de Médecine, Mme Lavault, directeur de la Bibliothèque médicale centrale des hôpitaux de Paris, le professeur Santoro, professeur à la Faculté de Chirurgie Dentaire de Paris V, Mme Verchère, professeur à la Faculté de Chirurgie Dentaire de Paris, M. Vercère étant le coordinateur de cette séance.

    A la suite de ce congrès, une motion a été votée et envoyée au Collège des Doyens de Facultés de Chirurgie Dentaire afin de concrétiser la décision d'intégration de la science de la documentation dans le programme officiel des études dentaires. Nous avons eu l'appui très compréhensif du Service des bibliothèques au Ministère des Universités.

    Dès cette année, un cours sera professé en association avec un conservateur de bibliothèque, à la Faculté de Chirurgie dentaire pour des étudiants de 3e cycle d'études supérieures. Ce cours aura lieu au C.F.D.O.S. où les étudiants seront à même de suivre sur le tas ce qu'est une bibliothèque et surtout d'apprendre à s'en servir.

    L'enseignement que nous avions fait ces années précédentes comportait deux parties : un cours théorique accompagné par des diapositives pour mieux matérialiser des termes tels que usuel, manuel, périodique, fiche bibliographique, fiche signalétique, etc... c'est-à-dire un vocabulaire spécifique, et des travaux dirigés où l'étudiant devait établir une bibliographie en se référant à la littérature secondaire telle qu'elle lui avait été décrite pendant le cours. Les sujets choisis étaient, par exemple :

    • - fluoration de l'eau - fluor et dent ; répercussion sur l'état général ;
    • - hormones ovariennes (oestrogène-progestérone) et modifications cytologiques de la muqueuse buccale. La pilule (oestroprogestatifs) et modification de la muqueuse buccale ;
    • - diabète et pyorrhée ;
    • - influence de la nutrition et du régime sur l'apparition des caries chez les enfants de moins de 10 ans.

    La littérature secondaire qui existe au C.F.D.O.S. consiste en fichiers, index de la « dental literature », abstracts, current contents, previews et autres. Tous les mois sont réunies en un fascicule mis à la disposition des lecteurs les photocopies des sommaires des périodiques reçus dans le mois.

    Nous voudrions vous signaler deux sources de documentation odonto-stomatologique qui sont actuellement en suspens, faute de temps, d'argent et de personnel :

    • - tout d'abord un fichier vraiment unique en France. Tous les périodiques français et étrangers reçus à la Bibliothèque systématiquement dépouillés, les articles originaux fichés par auteur et par matière. Le classement par matière débuté par le Dr Solas dès après la guerre, mais petit à petit ciselé empiriquement, chaque groupe d'une dizaine de fiches traitant le même sujet faisant l'objet d'une nouvelle subdivision. On était arrivé ainsi à une certain richesse de mots-clés en langue française dont il existe un répertoire et cela permettait une recherche manuelle fine ;
    • - la deuxième source de documentation odonto-stomatologique a été la parution d'un catalogue des fiches signalétiques des travaux originaux de langue française. Ce catalogue de publication annuelle a été envoyé dans toutes les bibliothèques du monde et l'intérêt pour ce catalogue a été tel que nous recevons encore des demandes émanant de pays tels que l'Amérique du Sud, du Nord, de Suède, des Pays de l'Est, pour reprendre cette publication. C'est un excellent moyen de faire connaître dans le monde les travaux en langue française puisqu'y étaient intégrés les articles suisse, belges, canadiens, tous les auteurs écrivant en français et de stimuler la valeur de ces écrits français.

    Actuellement, des catalogues sont en cours de publication. Celui des périodiques existe depuis 1974, ceux des manuels et des congrès sont en cours de réalisation.

    L'information du lecteur sur la littérature odonto-stomatologique se fait d'autre part par le truchement des périodiques français qui publient des listes de livres récemment parus ainsi que des analyses.

    Signalons l'aide apportée par la collaboration avec d'autres bibliothèques médicales qui possèdent des terminaux, le Medlars ou le conversationnel on-line avec Bethesda. Enfin l'accumulation des documents nous fait jeter un regard d'envie sur les procédés de miniaturisation.

    Il est évident qu'il y a beaucoup à faire pour aider le lecteur dans le dédale de la documentation. Les lecteurs viendront à nous que si nous allons vers eux.