par Marie-France Calas, Chef du Département de la Phonothèque nationale et de l'audiovisuel de la Bibliothèque nationale. (Résumé par Pascal Sanz)
Lorsqu'on est amené à sélectionner régulièrement un certain nombre de disques dans la masse de la production phonographique, on s'interroge tout naturellement sur son importance et sur son contenu. Or, pour répondre à cette interrogation on reste démuni. Les articles de périodiques s'attachent, les uns et les autres, à un genre précis de musique. De même, peu d'ouvrages de fond abordent le problème de la sociologie de l'édition phonographique par le biais des statistiques et ils sont souvent consacrés à un aspect bien délimité. (Exemple : L'apport du disque en ethnomusicologie).
Les chiffres fournis annuellement par la Fédération nationale de la Musique permettent de cerner cette production sous ses aspects industriel et commercial. C'est un secteur en pleine expansion. Ainsi, en 1977, on a pressé 166 892 054 disques, soit 80 % de plus qu'en 1976, et les duplicateurs ont produit 18 912 440 bandes enregistrées (dont 18 576 375 cassettes), soit une progression de 43 % par rapport à 1976. Les chiffres relatifs aux ventes en France montrent une progression plus forte encore (plus de 15,2 % pour les disques, plus de 46,9 % pour les cassettes).
Mais pour en savoir un peu plus... on peut se souvenir alors qu'il existe un Dépôt légal et que les phonogrammes y sont soumis, quelque soit leur support, disques, bandes, cassettes, cartouches. Les enregistrements doivent être déposés en 2 exemplaires, l'un au titre du producteur, l'autre au titre de l'éditeur, qu'il s'agisse de nouveautés ou de rééditions, d'enregistrements édités en France ou importés. Les statistiques effectuées au Département de la Phonothèque nationale et de l'Audiovisuel de la Bibliothèque nationale permettent d'obtenir un certain nombre de renseignements: ainsi constate-t-on que, ces 10 dernières années, la production de phcnogrammes a doublé (6404 en 1967, 13 021 en 1977) et que cette progression est due notamment à l'essor des cassettes (125 en 1967, 2 938 en 1977), tandis que les cartouches, apparues en 1969, connaissent actuellement un déclin important. Une inconnue subsiste: la production de bandes magnétiques pré-enregistrées. Celles-ci ne sont pratiquement plus éditées isolément, mais comme des éléments d'ensembles multimédia dont on ne sépare pas les différentes composantes, ce qui rend leur dénombrement impossible pour le moment.
La répartition par format a suivi également une évolution intéressante. Alors qu'auparavant la production de disques 17 cm était plus importante que celle des disques 30 cm, depuis 1976 ces derniers ont pris le dessus. Par ailleurs, on constate que l'on ne presse presque plus de 25 cm qui ne se maintiennent que dans le secteur des livres-disques.
Les statistiques par marques et par distributeurs sont effectuées à la Bibliothèque nationale, mais ne sont pas diffusées de façon systématique. Néanmoins, le Département de la Phonothèque nationale et de l'Audiovisuel envisage de diffuser une liste annuelle des distributeurs et marques, plus complète que la brochure « Qui diffuse quoi? » éditée par le S.N.E.P.A.
Les statistiques par genres sont les plus difficiles à établir. En effet, de 1964 à 1975, les chiffres étaient simplement répartis en deux catégories : le classique (qui comprenait deux sous-rubriques : musique et diction) et les variétés. La division « classique » étant prise en acception très large on aboutit à un équilibre entre les deux grandes catégories. Pour cette période on a enregistré 51 958 supports en « classique » et 52 454 en « variétés ».
Depuis 1976, on cherche à mettre au point un plan de classement. Lorsqu'il sera suffisamment affiné, des statistiques plus précises - et plus utiles - pourront être publiées. Mais on peut déjà observer quelques tendances : par exemple : la disparition presque totale des enregistrements littéraires (théâtre, poésie, etc.) tandis qu'à l'inverse les enregistrements destinés à l'enseignement (langues, méthodes d'initiation à des disciplines diverses) sont en pleine croissance, surtout sous forme de cassettes, ou encore, la reprise actuelle de la production de disques pour enfants.
L'ensemble de ces statistiques met en évidence des caractéristiques d'un autre ordre, notamment la marginalisation d'une partie du marché. En effet, ces dernières années ont vu de plus en plus d'individus isolés produire des disques. Certains d'entre eux se sont regroupés en coopératives qui assurent leur propre distribution. De même remarque-t-on sur le marché un certain nombre de cassettes fabriquées par des Clubs, dans des conditions plus ou moins licites.
Il est extrêmement difficile d'obtenir le Dépôt légal régulier de toute cette production marginale. A cela s'ajoutent le problème des fabrications pirates, celui des importations directes, etc. : autant de difficultés qui rendent malaisée la tâche du Dépôt légal. Mais celui-ci reste l'outil indispensable pour une étude d'ensemble de la production des documents sonores.