Bonjour, Je recherche des informations sur les systèmes de classification des ouvrages au moyen âge jusqu'à la Renaissance. Merci de votre aide

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Question

Bonjour,
Je recherche des informations sur les systèmes de classification des ouvrages au moyen âge jusqu'à la Renaissance.
Merci de votre aide

Réponse

Date de la réponse :  20/06/2011

Si nous comprenons bien votre question, vous recherchez des références bibliographiques et documentaires concernant la classification adoptée pour des ouvrages par les bibliothèques durant le Moyen-Age et la Renaissance.
Rappelons tout d'abord qu'au Moyen Age et à la Renaissance, le terme de "bibliothèque" englobe des lieux qui sont :
- soit des bibliothèques religieuses, sous la protection de l’Église (bibliothèques de monastères, d'ordres),
- soit des outils documentaires de travail utilisés pour un enseignement laïc comme les bibliothèques universitaires ou les bibliothèques de collèges.

Dans ces deux types de bibliothèques, des classifications sont élaborées à partir des ouvrages classiques de philosophie de la Nature et de l'Univers comme ceux de Platon ou d'Aristote.

CLASSIFICATION MATIÈRE

Nous avons identifiés trois théoriciens de la classification de la connaissance :
- Hugues de Saint Victor,
- Raoul Ardent,
- Vincent de Beauvais

Hugues de Saint Victor a retenu vers 1120 la classification matière suivante dans son ouvrage "Didascalicon de studio legendi" :
1-La logique qui comprend la grammaire, la dialectique et la rhétorique,
2-Les sciences pratiques qui regroupent l’éthique, l'économie, la politique,
3-Les sciences théoriques comprenant la théologie, les mathématiques elles-même subdivisées en arithmétique, musique, géométrie, l'astronomie, la physique,
4-Les sciences mécaniques c'est à dire l'artisanat, l'armement, le commerce, l'agriculture, la chasse, la médecine, le théâtre.

Raoul Ardent, dans son ouvrage "Speculum universale", a détaillé vers 1192-93 la classification suivante :
1- La théorique qui comprend la physique, les mathématiques et la théologie,
2- L’éthique qui regroupe l'étude de la personne, de la famille surtout sur le plan économique, de la politique, du point de vue interne (l'homme en tant qu'individu) et externe (l'homme dans la société)
3- La logique soit la grammaire, la dialectique et la rhétorique
4- La mécanique qui comprend la science de la nourriture, l'artisanat, l'architecture, la médecine, le commerce et les affaires militaires.

Vincent de Beauvais dans son "Speculum Majus" vers 1259 élabore la construction intellectuelle classificatoire suivante :
1- Les sciences regroupant le langage, la grammaire, la logique (ou dialectique) avec les sous-classes de la rhétorique et de la poésie,
2- L'éthique qui comprend :
- les sciences monastiques (éthique générale, éthique en pratique, problèmes spécifiques à l'éthique),
- l'économie
- la politique
- la loi
- les crimes contre Dieu, contre un voisin ou contre quelqu'un
3- La mécanique qui comprend :
- les arts mécaniques avec comme sous-classes : l'artisanat, l'architecture, le travail du métal, l'armement, le génie militaire, le théâtre, la navigation et le commerce, la chasse et l'agriculture, l'alchimie
- la médecine pratique et théorique
4- La physique ou philosophie naturelle
5- Les mathématiques incluant la métaphysique
6- La théologie

CLASSIFICATION PHYSIQUE DES OUVRAGES SUR LES RAYONS

L'utilisation croissante des bibliothèques de collèges et d'universités par les étudiants a entraîné un partage des fonds en deux parties, comme le fit par exemple la Sorbonne vers la fin du 13e siècle :
-une bibliothèque référentielle, l'Aula Magna, était destinée à la consultation sur place par tous,
-une Libraria Parva contenait les doubles, les ouvrages destinés au prêt et servant à des recherches plus spécialisées.

La fonction de ces deux fonds étant différentes, les cadres de classement choisis le furent aussi.
Pour la Libraria Parva on opta pour un classement systématique par matières soit 59 classes correspondant aux rayons de la bibliothèque.
L'Aula Magna était meublée de 26 pupitres marqués d'une lettre de l'alphabet (23 pupitres notés de A à Z ; les 3 derniers avec deux lettres : AB, AC, AD). Les pupitres pouvaient contenir entre 5 et 23 volumes chacun.

L'accès à ce fonds était rendu possible :
- grâce à un inventaire sommaire décrivant les volumes d'après leur emplacement sur les pupitres,
- et par un répertoire méthodique où les livres étaient classés selon leur matière. Ce répertoire reproduisait en tête de chaque article les lettres permettant de retrouver le volume sur chaque pupitre.

Une autre classification a été rédigée entre 1373-1378 dans le "Livre des Jurés de Saint Ouen" qui nous révèle le plan de classement dont se sert la bibliothèque de l'abbaye de Saint-Ouen à Rouen :
Chaque livre a une cote manuscrite au dos permettant ainsi de retrouver le livre sans difficulté.
Le local de la bibliothèque comprend 3 étagères numérotées de I à III, chacune divisée en 20 compartiments numérotés alphabétiquement de A à V . Chaque compartiment ainsi défini comprend selon la taille des ouvrages de 3 à 10 volumes désignés de i à x. Ainsi le volume désigné linea II, B, vi signifie une localisation de l'ouvrage sur l'étagère II du compartiment marqué B à la sixième place.

Ainsi le classement demeure durant tout le Moyen Age et jusque tard dans la Renaissance un problème d'ordre essentiellement pratique. Ce fait s'explique au départ par le caractère utilitaire des collections médiévales dont la constitution et l'accroissement répondent aux exigences pratiques d'une institution.
A la Renaissance ce modèle évolue du fait des recherches érudites initiées par les humanistes : on passe ainsi à un modèle de bibliothèque universelle, le THESAURUS, qui rassemble des témoignages de toutes les époques.
C'est l'histoire, donc la chronologie, qui domine alors le cadre de classement matière de ces nouvelles bibliothèques.
Le système de classement physique évoluera surtout aux 17e et 18e siècles.

Sources utilisées :

- Histoire des bibliothèques françaises. [1] Les bibliothèques médiévales du VIe siècle à 1530 sous la direction d'André Vernet [Paris] : Éd. du Cercle de la librairie, Paris, 2008

- BRESSON, Alain. Medieval classification and cataloguing : classification practices and cataloguing methods in France from the 12th to 15th centuries / Alain Bresson Biggleswade, Beds. : Clover Publications, 1980

Cordialement,

Le Service questions? réponses! de l'enssib

MOTS CLES : Traitement de l'information : Modèles de représentation, Traitement de l'information : Systèmes classificatoires