Un changement de nom de médiathèque doit-il faire l'objet d'une délibération en Conseil municipal ?

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Question

Bonjour,
Le passage de bibliothèque municipale à médiathèque pose-t-il la question d'un changement de statut à part entière, et donc faire l'objet d'une délibération en Conseil municipal ? Quels sont les textes de lois relatifs à cette question ?
Vous remerciant,

Réponse

Date de la réponse :  23/04/2015

Vous vous interrogez sur les implications en termes de statut dans le cas d’un passage de « bibliothèque municipale » à « médiathèque ».

Votre demande soulève deux questions.

1. Y’a t-il une différence entre les termes de bibliothèque et de médiathèque ?

Au départ, les bibliothèques ne proposaient que des documents sur support papier. L’arrivée des nouveaux médias (cassettes audio et vidéos puis CD, DVD et Internet) a vu fleurir en France le terme de « médiathèque » qui était à la fois une façon de signifier que la bibliothèque proposait ces nouveaux supports, mais aussi souvent un geste politique pour affirmer sa modernité. Le terme de « médiathèque » est ainsi défini dans le Dictionnaire de l’enssib :
« Particularité sémantique, le terme « médiathèque » n’existe à peu près qu’en France. Il désigne, à partir des années 1970 (la médiathèque de Metz a été la première à porter ce nom, en 1972), une bibliothèque publique accueillante et ouverte à une pluralité de supports. Bref, une bibliothèque moderne qui devait cesser de porter le nom de bibliothèque pour susciter l’intérêt et l’envie tant des décideurs que des (futurs) usagers : changer de nom, c’est changer d’image. » Source : Médiathèque. Le Dictionnaire de l'enssib http://www.enssib.fr/le-dictionnaire/mediatheque

En résumé, renommer la bibliothèque en médiathèque est un geste politique qui témoigne d’un souci de modernité, comme en attestent les ressources suivantes :
-Bibliotheque-vs-mediatheque, InfoDocBib, 2010 : http://www.infodocbib.net/2010/12/bibliotheque-vs-mediatheque/
« Les élus montrent qu’ils sont modernes (médiathèque : terme de 1970 ayant commencé à être utilisé dans ce contexte en 1982!) en changeant l’appellation de leur équipement culturel phare. Généralement, cela se fait lorsqu’un véritable changement se produit, l’inauguration d’un nouveau bâtiment le plus souvent, indépendamment des supports proposés. C’est un message politique auquel les administrés sont sensibles. »
- Et le texte essentiel d'Anne-Marie Bertrand, « La médiathèque questionnée » dont voici un extrait http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-1994-02-0008-001 :
« Le titre du dernier film d'Eric Rohmer (L'arbre, le maire et la médiathèque, 1993) marque l'entrée du mot « médiathèque » dans l'imaginaire social. […] Au congrès international de la lecture publique, à Alger, en 1931, Henri Lemaître déclare : « Le mot même de bibliothèque, par son aspect savant, est devenu si rébarbatif pour beaucoup qu'on a cherché une autre locution pour désigner l'endroit où chacun trouverait les livres qui lui conviennent : c'est ainsi qu'on a créé la locution lecture publique ». Mais la lecture publique n'a jamais désigné le lieu où se trouvent les livres et cette proposition ne connaît pas plus de succès que celle d'Eugène Morel d'échanger « bibliothèque publique » pour « librairie publique ». Le mot « polythèque » lui non plus ne sera pas adopté et c'est l'appellation « médiathèque » qui va peu à peu s'imposer au cours des années 70 - mais l'illustre exception de la « bibliothèque des Halles » rebaptisée Bibliothèque publique d'information et non pas Médiathèque publique d'information est cependant le signe que cette adoption n'allait pas de soi. […] Beaucoup des nouveaux équipements qui ouvrent dans les années 70, 80 et 90 s'appellent médiathèque (citons, sans aucune exhaustivité, Arles, Beauvais, Chambéry, Corbeil, Le Mans, Liboume, Nancy, Nantes, Nîmes, Saint-Nazaire, Saint-Quentin-en-Yvelines, Sète, Tourcoing, Valence...) tout comme les projets d'Orléans ou Poitiers. Pourtant la faveur du mot n'est pas universelle. D'autres propositions trop longues (Maison du livre, de l'image et du son à Villeurbanne) ou trop exclusives (la Méjanes à Aix) n'auront pas d'émule. Moins anecdotique : Mériadeck s'appelle sobrement Bibliothèque de Bordeaux, et les élus de Saint-Etienne font savoir qu'ils refusent l'appellation « médiathèque » pour le futur bâtiment de leur bibliothèque. »
- Pour aller loin, vous pouvez consulter l'étude de Claude Poissenot « De la bibliothèque à la médiathèque » http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/docs/00/06/21/54/PDF/sic_00000372.pdf Cette étude analyse l’évolution des publics et des usages lorsqu’une bibliothèque se transforme en médiathèque (c’est-à-dire qu’elle acquière des documents sur un support autre que le papier).

En conclusion, passer de bibliothèque à médiathèque ne constitue pas un changement de statut. Cela peut en revanche être considéré comme un changement de nom.

2. Le changement de nom d’une bibliothèque nécessite-il une délibération municipale ?

Il existe en effet une règlementation sur la dénomination des édifices publics :
"Aujourd’hui, la dénomination des voies et édifices publics est considérée au regard de plusieurs textes législatifs. Elle relève de l’article L. 2121-29 du Code général des collectivités territoriales qui stipule que le conseil municipal règle, par délibération, les affaires de la commune dont les questions de dénomination des lieux publics. Cela signifie que l’attribution (ou la modification) du nom à une bibliothèque doit être votée en assemblée délibérante, selon les règles de majorité applicables."
"Outre cette procédure politico-administrative, la dénomination des édifices publics doit respecter un certain nombre de principes, au regard de la loi :
-conformité avec l’intérêt public local : le nom choisi ne doit être « ni de nature à provoquer des troubles à l’ordre public, ni à heurter la sensibilité des personnes, ni à porter atteinte à l’image de la ville ou du quartier concerné » ;
-neutralité du service public et égalité des citoyens : il convient d’éviter « d’attribuer à une voie ou un édifice public le nom d’une personne vivante, particulièrement lorsque celle-ci exerce des responsabilités politiques » ou, pour le dire autrement, « tout signe symbolisant la revendication d’opinions politiques, religieuses ou philosophiques »."
"Par ailleurs, dès lors que la volonté est de donner le nom d’une personne vivante à un édifice, il est de rigueur d’en solliciter, auprès d’elle, l’autorisation expresse."
Source : La dénomination des bibliothèques territoriales : analyse et perspectives. Albane Lejeune. Mémoire enssib, janvier 2013 [pages 30-33] http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/60369-la-denominat...

Selon nous, il convient donc de considérer si le mot « médiathèque » fait partie du nom de l'établissement.
Par exemple, dans le cas de la bibliothèque Louise-Michel (75), on peut considérer que le nom est « Louise-Michel ». Par conséquent, une délibération ne paraitrait pas indispensable dans le cadre du passage de bibliothèque à médiathèque.
En revanche dans le cas de la Mémo (69), qui est l’abréviation de « Médiathèque municipale d'Oullins », le mot « médiathèque » fait entièrement partie du nom, et nécessite donc une délibération municipale.

Veuillez noter que notre réponse n’a pas de valeur juridique.

Cordialement,

Le service Questions? Réponses! de l'enssib

MOTS CLES : La bibliothèque : organisation et environnement : Politiques publiques