A la B.C.P. de l'Ardèche, le constat de la nécessité absolue de la formation des bénévoles gestionnaires des bibliothèques relais du réseau s'est imposé très tôt.
Créée en 1982, la B.C.P. a, dès 1983, commencé la formation de ses bénévoles. En effet, la structure démographique du département de l'Ardèche où plus des deux tiers des communes ont moins de 1000 habitants et un grand nombre de celles-ci sont en deçà de la barre des 500 habitants, n'autorise guère de fols espoirs de recrutement massif de bibliothécaires professionnels salariés. Il est donc clair que l'essor de la lecture publique en zone hyper-rurale passe par le bénévolat.
Grandeur et misère du bénévolat : enthousiasme, bonne insertion dans la commune, le canton, "militantisme" au service de la lecture, mais aussi précarité dûe à une éventuelle perte de motivation ou à un déménagement, manque de compétence...
La formation A.B.F. répond aux besoins des B.C.P. quant aux bénévoles dans le sens où, en sus d'un apport de connaissances bibliothéconomiques théoriques et pratiques qui optimise leurs prestations de services, elle crée et entretient entre la B.C.P., tête de réseau et les satellites que sont les relais, un esprit de corps, le sentiment d'une appartenance à une même famille, au service du développement de la lecture. Le contexte hyper-rural est à prendre en compte dans sa spécificité de pauvreté d'offres culturelles. Les cantons éloignés, parfois difficilement accessibles l'hiver, ne bénéficient à l'évidence pas des mêmes structures (musées, bibliothèques, auditoriums...) que le milieu urbain ou semi-urbain. Dans ce cadre la bibliothèque-relais B.C.P. est très souvent le seul foyer culturel. Or la gestion de ces C.R.L.I.C. (Centres régionaux de lecture et d'initiatives culturelles) est confiée, la plupart du temps à des bénévoles. C'est sur eux -sur elles- que reposent en grande partie le dynamisme ou l'apathie du service lecture local. Il est, par conséquent, essentiel qu'au travers de la formation élémentaire initiale et continue, la B.C.P. puisse maintenir leur motivation première à un bon niveau et leur donner les outils intellectuels et techniques nécessaires à leurs pratiques para-professionnelles.
Il ne s'agit, en aucun cas, de former un bénévolat de substitution (à une éventuelle embauche de professionnel), mais de mettre en place, dans des zones à faible potentiel humain et économique, les conditions les meilleures pour le développement d'une lecture publique de qualité.
Enfin, la formation est sanctionnée par un examen, ce n'est pas là son moindre mérite ; car, outre sa fonction de vérification du niveau de connaissances, ce contrôle final donne l'occasion d'ue remise officielle de diplômes.
Cette cérémonie organisée dans les règles de l'Art avec presse et élus locaux (plus personnalités des bibliothèques régionales, voire nationales) donne aux bénévoles un vrai statut moral dans leur commune. Ce label médiatique leur procure une reconnaissance de fait. Pour être écrivain aux yeux de ses voisins ou de sa concierge, il était indispensable de passer à Apostrophe ; pour être bibliothécaire sur les chemins de campagne, il faut avoir reçu dignement le diplôme A.B.F., avec mention, si possible !
Par ailleurs cette formation initiale est régulièrement complétée par des mini sessions (1 ou 2 jours) sur des thèmes précis concernant les responsables d'un secteur géographique (1 ou 2 cantons) voire d'une seule commune. C'est un peu le service après-vente de la formation élémentaire. En effet la formation des bénévoles est une action qui s'inscrit dans la durée, c'est une condition pour un accès de qualité du monde rural à la lecture.
Le manque traditionnel d'offres culturelles, les distances, etc..., tout concourt à faire de la bibliothèque un centre -voire le centre- d'animation et de vie culturelle bien au-delà du simple (pas toujours si simple) prêt de livres.
D'ailleurs le Département de l'Ardèche en est tout à fait conscient, puisqu'il a, dès avant la décentralisation de 1986, donné les moyens en personnel puis en crédits de fonctionnement à la B.C.P. pour promouvoir la lecture publique en zone rurale. Je dirais même en zone hyper-rurale puisque je crois savoir que la B.C.P. a, à ce jour, plus de 100 bibliothèques relais dans des communes de moins de 500 habitants !
J'irais au-delà, en disant que cette formation est pour le bailleur de fonds qu'est le Conseil général, une caution du bon fonctionnement du réseau de la B.C.P. On exige des professionnels des bibliothèques une formation initiale à la fois de culture générale et technique, mais en B.C.P. où le prêt au lecteur final est le plus souvent effectué par les responsables de relais-bibliothèques, il me semble juste d'aller jusqu'au bout du raisonnement et d'exiger de ces bénévoles un savoir minimum. Cette base d'aptitude est à mon sens une composante essentielle de la cohérence et de la performance de l'ensemble des bibliothèques desservies par la B.C.P. dans un département.