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    Evolution en cours

    Quelques éléments d'un projet de mémoire de DSB / DESS ENSB (1990-1991)

    Par Françoise HECQUARD, ex-coordinatrice du Centre de formation A.B.F. B. C. P. des Yvelines

    La formation élémentaire de l'A.B.F. existe depuis plus de 50 ans. Elle a fait ses premières armes en 1938, sous la direction de Myriam Foncin, alors en poste à la Bibliothèque nationale et bientôt présidente de l'Association. La profession, à cette époque, foisonnait d'idées et d'entrepreneurs. Tout était à faire et une des premières nécessités était la formation.

    Les certificats d'aptitude aux fonctions de bibliothécaire universitaire et municipal avaient existé depuis la fin du siècle précédent. Le diplôme technique de bibliothécaire les remplaçant venait d'être créé en 1932.

    Dès 1910 l'Association des bibliothécaires français avait pris l'initiative d'organiser à l'Ecole des Hautes - Etudes sociales des conférences sur "les Bibliothèques modernes". Ces conférences, qui se voulaient à la fois formation des étudiants ou des chercheurs et "enseignement primaire des bibliothécaires", avaient été publiées en 1912 chez Marcel Rivière, sous le titre "Bibliothèques, livres et librairies". Durant les années 30, divers cycles de cours pratiques et conférences avaient été organisés successivement à l'Ecole américaine, après la première guerre, par Gabriel Henriot, de 1930 à 1936, dans le cadre de l'Ecole municipale de bibliothécaires de la Ville de Paris rue de l'Elysée, par l'Institut catholique, le soir, en 1935, par la CGT aussi, en 1936. Toutes initiatives qui tentaient de combler les manques, alors que la Conférence d'Alger, en 1931, abordait largement le problème et que Ch. H. Bach publiait, la même année, la première édition de son Petit guide du bibliothécaire, qui resta longtemps le seul manuel de base du métier.

    Depuis cette époque, la formation A.B.F. a fait son chemin, s'interrompant dans les années 50 pour reprendre de plus belle au début des années 60, à Paris, Lille, Lyon, Rennes, Troyes... Les cours se sont développés pour répondre à la demande : de 15 jours, en 1938, à 3 mois, en 1963, et 8 mois de nos jours, pour une centaine d'heures de cours, auxquelles s'ajoutent visites, stages, travaux pratiques et devoirs personnels. Les centres se sont diversifiés, ainsi que les professeurs et le public.

    L'objectif s'est toujours maintenu d'aider ceux qui ne pouvaient accéder à aucune formation, soit parce qu'ils ne possédaient aucun diplôme, soit parce que l'organisme pour lequel ils travaillaient ne pouvait pas la leur fournir. Actuellement, il s'agit d'employé(e)s de bibliothèque, de bénévoles de B.C.P., de responsables de bibliothèques d'hôpitaux ou de C.E., et aussi, parfois, de demandeurs d'emploi.

    Les centres se multiplient depuis quelques années : de 5 en 1975 à 21 en 1990, dans des B.M. importantes et un certain nombre de B.C.P. La formation est aussi, dans certains cas organisée en coopération par plusieurs bibliothèques d'un même département ou d'une même région. Le cycle de cours et le programme proposé semblent souvent les seules réponses solides possibles à la demande qui se manifeste localement. En 1979, la première réunion nationale imposait l'harmonisation des horaires et des programmes. Les sujets d'examen devenaient nationaux. En 1983, l'examen avait lieu pour la première fois le même jour pour l'ensemble de la France.

    Un premier manuel, programme de l'enseignement, était publié en 1968, sous forme ronéotée. La 8e édition, Le Métier de bibliothécaire, est parue fin 1989. Les intervenants sont devenus plus nombreux et viennent d'horizons variés. On a recours à des libraires, des éditeurs, mais aussi à des professeurs de français ou d'administration communale, parfois aussi à des universitaires. Pour assurer les sessions, les divers responsables ont longtemps fait appel à la bonne volonté des professionnels locaux (interventions, prêts de salles, accueils de visites et de stagiaires...). De nos jours, les activités des bibliothécaires se multipliant, ce sont souvent les mêmes qui interviennent dans les divers cycles de formation A.B.F., C.A.F.B., C.N.F.P.T., etc..., habitués des publics et des interventions, habitués aussi à se recycler en permanence pour transmettre des données à jour.

    Les cours de l'A.B.F. ont, semble-t-il, le mérite de permettre à beaucoup de collègues de faire leurs premières armes dans le domaine de la formation. A ce niveau, l'intervention d'universitaires reste ponctuelle. Ce sont surtout des bibliothécaires en poste qui assurent les cours. La difficulté est alors, et elle se montre dans toute son ampleur, de savoir faire passer un message clair, précis et aussi simple (simplifié) que possible. Le langage doit être quotidien, les problèmes concrets. Le public est très hétérogène, aussi bien du point de vue du niveau d'études (du certificat d'études à la licence parfois pour les dépositaires de B.C.P.) que de l'âge.

    Certains travaillent déjà en bibliothèque à titre salarié ou bénévole, d'autres n'y ont fait qu'un stage, d'autres encore viennent juste d'y arriver. Cela oblige le professeur à maîtriser parfaitement son sujet pour pouvoir réexpliquer de plusieurs manières différentes ou donner des exemples de difficulté variable, dans un vocabulaire adapté à un public néophyte.

    Ces dernières années, l'organisation d'un centre est devenue une véritable affaire de gestionnaire : les financements doivent être trouvés (les droits d'inscription ne suffisant plus à couvrir tous les frais) ; les intervenants doivent être contactés, relancés éventuellement, puis indemnisés ; les élèves doivent être inscrits, sélectionnés, puis suivis et aidés. Il faut penser au planning, à la disponibilité des salles, aux supports de cours réclamés par les élèves, et jusqu'aux marqueurs à prévoir près des tableaux. La publicité est aussi à envisager, un entrefilet dans le journal local, une plaquette de présentation du programme pour les élus, une remise officielle des diplômes en fin d'année... Tout cela en menant le plus souvent parallèlement une activité de bibliothèque municipale ou centrale de prêt.

    La formation, qui était conçue au départ surtout comme une entraide entre actuels et futurs bibliothécaires devient une entreprise dont sortent chaque année près de 500 diplômés, que les mairies commencent à reconnaître comme de véritables professionnels de catégorie C des bibliothèques. Cette évolution se ressent aussi sur les candidats. Plus exigeants, ils deviennent de véritables "consommateurs", soit qu'ils aient payé eux-mêmes leur inscription, soit qu'ils aient été envoyés par leur association, bibliothèque, entreprise... Ils attendent une organisation sans faille, des polycopiés, un suivi pédagogique... L'examen leur paraît une épreuve difficile, qu'ils réussissent avec fierté, surtout quand ils ont repris les études après de longues années d'interruption. Cette première étape qui leur a ouvert de nouveaux horizons, cette première marche franchie les encourage souvent à chercher un emploi salarié, qu'ils trouvent la plupart du temps, et parfois à tenter le C.A.F.B.

    Les exigences ne sont donc plus les mêmes aujourd'hui et diverses questions se posent concernant les programmes (trop techniques ?), les publics (pas assez "ciblés" ?), les objectifs (pas assez clairs ?)...

    L'évolution générale de la profession oblige d'autre part à envisager l'intégration dans un cursus et à lancer un véritable dialogue avec les autres organismes de formation. Une centralisation des données et des moyens se révèle également dorénavant indispensable.

    Alors que les nouveaux statuts territoriaux semblent nier la nécessité d'une formation préalable, à tous les niveaux du travail en bibliothèque, les cours de l'A.B.F. prouvent l'existence d'un réel besoin, même au plus bas de l'échelle.

    La gestion d'une bibliothèque ne s'invente toujours pas, même à l'ère des ordinateurs et des bases de données.

    Bibliographie :

    Cours de formation professionnelle : 1938-1983 / Jacques Lethève, Suzanne Honoré, Claude Laude. - Association des bibliothécaires français, 1983.

    La Formation professionnelle des bibliothécaires / Gabriel Henriot.

    In : Revue des bibliothèques, 39ème année, 1929, pp 121-154.

    Education for Librarianship in France : an Historical Survey / R.K. Gardner. - School of Library Science, Case Western Reserve University, 1968.