Créée au milieu des années C soixante-dix à la bibliothèque interuniversitaire scientifique de Jussieu, le fonds d'histoire et sociologie des sciences plus couramment dénommé « science et société doit son originalité, ainsi que la demande relativement forte dont il fait l'objet, à un double courant contemporain de sa fondation et assez distinct de l'histoire des sciences traditionnelle : d'une part un ensemble de préoccupations nées dans le milieu scientifique et qu'on pourrait rattacher à la notion de responsabilité scientifique, d'autre part, quelques années plus tard, l'émergence d'un champ nouveau en histoire et sociologie des sciences, essentiellement anglo-saxon, celui des Social Studies of Science. Nous nous attacherons dans un premier temps à expliciter l'apport de ces deux sources, puis nous en viendrons à une description plus classique du fonds.
L'expression était à la mode en 1970, sinon chez nous, du moins aux États-Unis où les départements "science and society' ou "science, technology, and Soc:ef)/' fleurissaient dans les universités américaines, cependant qu'en France quelques scientifiques militaient, assez seuls, pour un développement analogue dans les universités françaises (1) . Non pas que la documentation ait été totalement absente : on trouvait à Paris des ouvrages ou des périodiques sur le thème à la Bibliothèque nationale, à la Fondation nationale des sciences politiques, à l'OCDE, au CNAM, à la bibliothèque universitaire Cujas, et probablement ailleurs encore, sans toutefois qu'il ait été possible de se faire une idée des fonds, encore moins d'en harmoniser les acquisitions.
Mais que recouvrait au juste le terme science et société " ? Si la notion de responsabilité scientifique semble avoir agité les milieux universitaires dans les années qui ont suivi les événements de 1968, elle n'était certes pas un phénomène nouveau. En 1945, avant même le lancement de la première bombe atomique sur le Japon, il se trouva aux États-Unis des physiciens pour militer contre l'aboutissement fatal du processus qu'ils avaient contribué à engager. La » guerre froide » aidant et les années passant, la croyance que « l'équilibre de la terreur » était facteur de paix s'installa peu à peu, y compris parmi les scientifiques, aidée en cela par une prospérité qui autorisait dans les pays occidentaux un financement substantiel de la recherche. Pourtant la croissance des ressources consacrées à la recherche-développement devait bientôt se stabiliser et un rapport de l'OCDE constatait en 1971 : la croissance économique n est plus par elle-même un objectif global suffisant. Et de poursuivre en soulignant la désillusion que ressent le public devant les effets de l'application de la technologie sur la qualité de la vie de l'individu entraînant la mise en question publique du fondement éthique d'une recherche dont les résultats pourraient servir à la manipulation de l'individu ou de la société, pour conclure que l'opinion publique se concentre sur les effets négatifs plutôt que sur les avantages que valent a la société les découvertes scientifiques (2) .
La juxtaposition récurrente des deux mots dans les études comme dans les discours devait ainsi forger le terme lui-même : au début des années soixante-dix .. science et société 'recouvre moins un thème précis qu'un ensemble de problèmes qu'on découvre, de questions posées à la science et à la technologie et dont la solution passe notamment par l'instauration d'une politique de la science. C'est ainsi que, parallèlement à des ouvrages fondamentaux d'histoire, de philosophie ou de sociologie des sciences, le fonds « science et société » se garnit, durant ses premières années d'existence, d'études consacrées aux politiques nationales de la recherche, à la place de l'idéologie dans la science ou aux liens existant entre la science et le pouvoir d'État : à côté de Bachelard en philosophie, de Duhem ou Koyré en histoire, de Merton en sociologie, on trouvait déjà des ouvrages sur le projet Manhattan aux États-Unis, sur l'affaire Lyssenko en Union soviétique, la » course aux armements " ou le complexe militaro-scientifico-industriel » - pour reprendre la formule du président Eisenhower (3) . Le développement des fichiers informatiques, bientôt suivi de celui des biotechnologies, donnera lieu à un autre type de préoccupation, non plus historienne et rétrospective mais liée à la maîtrise de ce développement et à la protection des personnes. Les rapports successifs de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ou du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, et tout récemment les études consacrées au « Projet génome humain " sont l'écho de ces développements.
Quoique l'ensemble de ces thèmes puisse être somme toute considéré comme ressortissant à « l'étude sociale de la science », ce qu'il est convenu d'appeler les Social Studies of Science procède d'une généalogie bien différente et se caractérise à l'inverse par une forte unité de thème corrélative d'un public assez bien circonscrit d'historiens et de sociologues. Ce n'est plus la responsabilité scientifique qui est ici au centre mais plutôt une manière nouvelle de faire, et donc d'écrire, l'histoire des sciences (4) . Jusqu'aux années soixante l'histoire des sciences était relativement peu perméable aux « vicissitudes de l'humain et du social (5) . Certes Thomas Kuhn, avec sa théorie des « révolutions scientifiques (6) », souligne déjà que la pratique scientifique s'inscrit dans un contexte social, mais ce contexte, qu'il nomme » science normale ", est encore étroitement lié à des facteurs cognitifs et n'a de vraiment social que le fait d'être tacitement accepté par un groupe au travers d'un apprentissage de règles et de pratiques permettant la résolution de problèmes posés dans une discipline donnée (pM.22'/e solving). Les idées comptent encore chez lui plus que les circonstances sociales qui les voient naître.
Bien plus radical est le point de départ du projet des Social Studies of Science : dans son ouvrage publié en 1976 le mathématicien et philosophe des sciences David Bloor pose d'emblée une question quelque peu provocatrice : La sociologie de la connaissance peut-elle étudier la nature et le contenu de la connaissance scientifique (7) ? Le « programme fort » (strong programme) qu'il définit par là même exige essentiellement de traiter sur un même plan les connaissances vraies 'et les connaissances "fausses '(c'est-à-dire celles qui se révélèrent telles) ou ce qui revient au même à ne pas anticiper dans l'étude d'une période historique sur ce que « l'histoire » a tranché par la suite (8) . D'où un regain d'intérêt pour les études de controverses en histoire des sciences. Déroulées dans leur contexte politique, social, ou religieux, ces dernières s'appliquent à en suivre pas à pas les acteurs dans une période temporelle nécessairement courte et dans des lieux institutionnels ou géographiques bien définis (9) . Mais plus généralement c'est l'étude de « la science en train de se faire » (science :M the making) qui surgit avec l'irruption du sociologue-anthropologue dans le laboratoire (10) . Volontairement neutre, le regard porté par ce dernier ignorera la finalité des activités qu'il décrit (la production de - la science ") au profit d'un suivi quotidien des tâches observées, fussent-elles les plus terre à terre (11) .
Pourtant, si les Social Studies q/ Science semblent « donner le ton » actuellement en histoire et sociologie des sciences, on ne saurait dire que l'abandon de toute forme d'explication téléologique et rationnelle de l'activité et des connaissances scientifiques au profit d'un causalisme essentiellement social se fasse sans heurts. Plus ou moins violemment attaqué par les philosophes des sciences (12) , le programme fort » en sociologie des sciences se voit reprocher d'occulter chez le scientifique les facteurs cognitifs, le simple exercice de la raison, la visée du vrai, cependant que les tenants d'une forme quelconque de réalisme scientifique (il existe un monde réel hors de nous, indépendant de nous et connaissable) cherchent à concilier une " étude sociale de la science " avec les notions de progrès, de rationalité ou d'évidence scientifiques (13) . Quelle que soit l'issue de ce qui peut apparaître parfois comme une bataille rangée dans le milieu de l'histoire, de la philosophie et de la sociologie des sciences (14) , on ne peut nier que les Social Studies of Science ont considérablement renouvelé le travail dans ce domaine, qu'il s'agisse des études historiques ou des manières d'envisager les oppositions traditionnelles (réalisme/relativisme, internalisme/externalisme, par exemple). Nombre d'études documentent cette évolution trop brièvement esquissée. Contentons-nous d'ajouter que le fonds « science et société de la bibliothèque interuniversitaire Jussieu possède certainement, au plan national, la documentation la plus fournie dans ce domaine, ce dont témoigne la sortie de plus en plus fréquente de ce type d'ouvrage dans le circuit du prêt entre bibliothèques (15) .
Une constatation s'impose quand on parcourt un ouvrage de critique de la science des années soixante-dix : quelque chose a changé depuis que ne suffit pas à expliquer l'arrivée des études sociales de la science ». A tout prendre les Social Studies of Science sont aujourd'hui une institution, ce que ne fut jamais la critique de l'institution scientifique par des scientifiques dans ces an-nées-là. Elle s'en défendait, bien au contrairel (16) . Qu'on rouvre (Autocritique de la science (1973) ou L'Idéologie de/dans la science (1977), ou encore Discours biologique et ordre .social (17) (1977), on y est immédiatement frappé par le ton militant ; on a affaire à une contestation - d'une institution, d'un ordre, d'une société tout entière. Rien de cela, nous semble-t-il, dans un ouvrage des années quatre-vingt-dix, quand bien même il traiterait du même sujet. Ainsi si nombre d'ouvrages paraissent actuellement sur le thème "les femmes et la science ', aucun d'eux n'a le ton des contributions analogues dans les ouvrages cités ci-dessus (18) . Le thème initial, fortement protestataire, a, pourrait-on dire, « éclaté " en approches disciplinaires diverses : historique, épistémologique, sociologique, ou biographique, émoussant du même coup son caractère de revendication globale au profit d'une étude « scientifique.. de ses composantes.
Nous touchons là - notons-le au passage - à une des difficultés d'aménagement du fonds. Vingt années d'existence pour un sujet qui bouge, quelque 5 000 ouvrages et 80 titres de périodiques posent inévitablement des problèmes de classement des livres. Au début des années soixante-dix les choses étaient assez simples : on savait, avec plus ou moins de bonheur, séparer un ouvrage de philosophie des sciences d'un ouvrage d'histoire des sciences. Quant à la sociologie des sciences, ses thèmes étaient encore relativement cadrés : on y examinait les normes éthiques du travail scientifique, les découvertes simultanées et les querelles de priorité qu'elles engendrent, la stratification sociale dans la communauté scientifique, ou encore des phénomènes plus fins comme « l'effet Mathieu » dans la science ou les citations bibliographiques (19) . Grosso modo on peut dire que la référence historique servait alors d'illustration au propos théorique, facilitant ainsi la séparation de ces ouvrages de ceux proprement d'histoire des sciences. Les ouvrages liés au thème de la responsabilité scientifique que nous évoquions au début de cette présentation trouvaient place quant à eux dans deux sections thématiques : « la science et l'Etat » et « science et avenir de l'homme ». L'émergence de l'étude sociale des sciences au tournant des années quatre-vingt a, pour ce qui concerne le bibliothécaire, rendu plus floue la frontière entre histoire et sociologie des sciences. Un livre comme celui de Martin Rudwick (1985, op. cit. note 9) est à la fois un ouvrage d'histoire de la géologie et une étude sociologique du milieu scientifique anglais au siècle dernier. Si les ouvrages de philosophie des sciences se démarquent encore assez clairement de cette « sociologisation de l'histoire, c'est peut-être que les philosophes sont dans une position de relative rivalité avec les sociologues pour l'étude de « la science ». David Bloor n'écrivait-il pas en 1976 dans son " programme fort » en sociologie des sciences : la sociologie de la connaissance aMra!fpM s'imposer beaucoup plus dans le domaine occupé actuellement par les philosophes, qui ont eu ainsi tout le loisir de définir eux-mêmes la nature de la connaissance (20) .
Disparition ou éclipse d'un certain caractère polémique, multiplication d'études historiques fortement "sociologisées », fallait-il donc réduire le fonds à ses trois classes principales : histoire, sociologie, et philosophie des sciences ? Nous avons préféré conserver la classification d'origine, à la fois disciplinaire et thématique. Solution commode certes, mais aussi solution de prudence : si la section « science et avenir de l'homme » accueillait dans les années soixante-dix nombre d'ouvrages sur la mise en question du nucléaire, elle accueille aujourd'hui des études critiques du » Projet génome humain " - avec ici encore un changement de ton qu'il serait intéressant d'analyser.
Les ouvrages du fonds « science et société » sont aujourd'hui répartis dans les sections suivantes :
Histoire des sciences et des techniques - Sociologie des sciences et des techniques - Philosophie des sciences - Économie politique de la science - La science et l'État - Science et avenir de l'homme - Enseignement et société - Biographies.
Il est clair que cette classification comporte aujourd'hui une part d'arbitraire. Elle présente néanmoins l'avantage de « déployer » le thème fondateur aux yeux du lecteur non initié en y introduisant un certain ordre sans lequel il pourrait apparaître comme traitant de « tout et n'importe quoi à côté de la science (21) ». Quant aux chercheurs historiens ou sociologues des sciences ils peuvent s'y retrouver en consultant le catalogue informatisé de la BIUS Jussieu ou même le Pancatalogue.
L'informatisation récente de la Bibliothèque interuniversitaire scientifique Jussieu, notamment de son catalogue d'ouvrages et de périodiques, a particulièrement servi le fonds « science et société », puisqu'elle permet, certes comme tout catalogue matières, de retrouver les ouvrages traitant d'un même sujet quelle que soit leur localisation dans le fonds, mais surtout de modifier avec une grande souplesse les mots-clés attribués à tel ou tel ouvrage lorsque le bibliothécaire envisage de recentrer un sujet ou de le relier à un autre. Ainsi une recherche par mots-clés concernant le thème que nous citions plus haut, « les femmes et la science », fait précisément apparaître l'évolution notée, puisque si la plupart des ouvrages trouvés sont de sociologie des sciences, les titres 9, 13 et 15 sont des biographies (des physiciennes Lise Meitner et Marie Curie) cependant que le titre 4 se trouvera en « philosophie des sciences » et le titre 12 en « histoire des sciences » (cf. tableau 1). Plus intéressante est la possibilité qu'offre le système au lecteur d'élargirsa recherche. Si l'on est en quête d'ouvrages sur la découverte de la fission nucléaire en 1938 on pourra proposer assez simplement dans un premier temps le mot-dé 'fission nucléaire », générant 7 titres (cf. tableau 2).
Affichant les notices bibliographiques successives à l'écran, on s'apercevra que le titre 2, « Opération Epsilon. Les transcriptions de Farm Hall (22) », a été indexé aux noms des physiciens allemands détenus à la fin de la guerre. On peut alors désirer en savoir plus sur l'un des découvreurs de la fission, Otto Hahn. L'option .. ouvrages apparentés » appliquée à Hahn, génère alors des titres supplémentaires (cy. tableau 3). De la même façon on pourrait, à partir du même titre initial, générer des ouvrages sur Werner Heisenberg, lui aussi indexé parmi les sujets (cf. tableau 4).
L'intérêt de cette recherche de proche en proche est évident pour un fonds tel que « science et société " où très souvent des mots-matières, quoique n'exprimant pas exactement la même chose, font partie d'un même paysage » intellectuel, par exemple : eugénisme », sociobiologie » et « social-darwinisme " ou en histoire des sciences : - externalisme », " relativisme », « constructivisme ».
Le fonds « science et société offre en outre la possibilité d'interroger les bases de données bibliographiques propres à son domaine telles que FRANCIS (serveur Télésystèmes Questel) ou aux États-Unis Historical Abstracts, ou la très utile base de données des thèses soutenues dans les universités américaines. L'accès au Catalogue collectif national des publications en série via MYRIADE permet en outre de localiser en France des périodiques que nous ne pouvons acquérir faute de place et de moyens financiers. Enfin le Science Citation Index sur CD-Rom peut servir à la fois de source bibliographique, de dépouillement des citations bibliographiques, comme de matière première à une étude de sociologie de la science.
Que peuvent bien avoir en commun trois lecteurs dont le premier s'intéresserait à « l'initiative de défense stratégique américaine des années quatrevingt (23) , le second à l'état actuel de la protection des personnes face à la multiplication des fichiers informatiques et la troisième à l'histoire des cosmologies médiévales ? Pas grand-chose, si ce n'est qu'il leur arrivera de se côtoyer dans le fonds « science et société ». L'exemple peut paraître caricatural mais il traduit bien la variété du public que nous rencontrons. Variété du public, variété des thèmes, la question de savoir laquelle des deux a précédé l'autre est sans doute futile, mais elle souligne une autre caractéristique du fonds : il n'existerait pas sans ses lecteurs. Aurions-nous songé à acquérir tel ouvrage relatif à la science du XLXesiècle dans le cadre de l'expansion coloniale sans la suggestion de tel étudiant en thèse, puis à en étendre la documentation en dépouillant les bibliographies d'articles s'y rapportant? Nous pourrions en dire autant du thème de la science allemande sous le national-socialisme : entamé au milieu des années soixante-dix grâce à une demande de don d'ouvrages effectuée auprès de la Deutsche Forschungsgemeinschaft (c'était une époque de « vaches maigres pour les bibliothèques universitaires françaises !) il nous est devenu un intérêt personnel, puis semble-t-il un sujet à la mode ces dernières années et le fonds est certainement aujourd'hui la première source documentaire en France sur ce thème.
Pour ce qui est de l'histoire des sciences, le public potentiel de chercheurs peut être évalué à partir d'un Guide de l'histoire des sciences et des techniques en France publié en 1987 (24) , lequel recensait près de cinq cents chercheurs dont cent cinquante en province et le reste en région parisienne. A ces professionnels du domaine il faut ajouter un complément aussi important que difficile à chiffrer formé d'un public de scientifiques curieux de l'histoire de leur discipline ou des « problèmes de société qui peuvent s'y rapporter.
Le même ouvrage de référence répertorie nombre d'associations, séminaires ou centres de recherches en histoire, philosophie ou sociologie des sciences. Citons en particulier :
D'autres centres sont à signaler en province : à Nantes un séminaire « Sciences, techniques et sociétés », à Rennes un séminaire « Science, histoire, société ", à Strasbourg un « Groupe d'étude et de recherche sur la science de l'université Louis-Pasteur.. (GERSULP), à Nice une « Équipe de recherche en histoire des sciences » (ERHS), etc.
Un problème commun à ces centres, que l'énumération précédente n'épuise certes pas, transparaît à travers les demandes reçues dans le cadre du prêt entre bibliothèques : si la documentation primaire en histoire des sciences peut être consultée dans les lieux les plus divers (Bibliothèque nationale, Académie des sciences, Muséum d'histoire naturelle, Palais de la découverte, Archives nationales ou départementales, archives des ministères, bibliothèques de grandes écoles, grands instituts (25) ...), la documentation sur le thème propre " science et société " est en revanche difficile à trouver en France, alors même que les travaux s'y rapportant se multiplient. Aussi la politique documentaire du fonds consiste-t-elle à en assurer une couverture aussi complète que possible, tant il nous apparaît évident que l'excellence dans un secteur où la demande est assez pointue est préférable à un éparpillement des ressources.
En l'état actuel des choses nous avons conscience de ne pouvoir atteindre à l'exhaustivité. Seule la création d'un CADIST d'histoire et de sociologie des sciences, dont le fonds « science et société - pourrait être partie prenante, permettrait de répondre à une demande croissante du prêt-entre-bibliothèques sans grever d'une absence trop longue le fonds d'ouvrages acquis actuellement en un exemplaire.
Vingt années sont déjà une longue période. Si " science et société », a évolué c'est que la société elle-même a changé. Là où l'on parlait assez péjorativement de « manipulations génétiques » on parle au-jourd'hui de « biotechnologies ». La critique des années soixante-dix s'est en quelque sorte institutionnalisée et les brochures polémiques sont devenues d'épais rapports annuels de comités ou commissions qui n'en sont pas moins vigilants à stigmatiser dans le détail les dangers des nouvelles technologies. Dans la montée des « études sociales de la science.. il nous semble également entrevoir ce que nous serions tenté d'appeler l'avènement du détail, l'abandon des grands panoramas historiques au profit des périodes courtes, du foisonnement descriptif. Ce recul de l'idéologie, ou des idéologies, est certainement la marque de notre fin de siècle, et on ne peut s'étonner qu'un fonds tel que " science et société en porte témoignage.