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    La bibliothèque de Roger Martin du Gard

    Par Anne Véronique de Coppet

    La bibliothèque de Roger Martin du Gard se trouve en majeure partie au château du Tertre, situé en Basse-Normandie, sur la commune de Sérigny, dans le département de l'Orne, non loin de la forêt et du bourg de Bellême.

    Cette bibliothèque présente le double intérêt d'offrir aux chercheurs une documentation intéressante sur l'écrivain et les mouvements littéraires de son époque et de développer au Tertre des possibilités de travail sur place, pour des groupes d'universitaires, d'amateurs ou d'artistes.

    Pour la recherche, nous disposons à l'heure actuelle d'un inventaire très précis de la totalité de la bibliothèque de l'écrivain, environ 10000 volumes. Cet inventaire a été élaboré par un bibliothécaire de métier, François Douan, complété par le professeur Jochen Schlobach, de l'Université de Sarrebrtick en Allemagne ; on y trouve la liste alphabétique par auteur de tous les livres, avec les données d'usage pour les identifier, mais aussi des renseignements sur toutes les dédicaces ou envois et les notes que Roger Martin du Gard a pu laisser dans les marges.

    Les livres ayant été partagés entre les deux héritiers, D. de Coppet et moi-même, ils se trouvent pour une grande partie au Tertre, le reste à Paris. Nous répondons aux demandes de consultation ou de publication le cas échéant. À Sarrebrück, les photocopies des dédicaces permettent une consultation rapide.

    Le contenu de cette bibliothèque provient d'au moins trois origines :

    • un fonds familial venu des parents et beaux-parents de Martin du Gard, datant des dernières décennies du siècle dernier;
    • des livres, essentiellement des romans, envoyés, ou acquis par l'écrivain, représentant l'essentiel de la production littéraire française et étrangère du début du siècle jusqu'en 1958, date de sa mort ;
    • une importante documentation en histoire, politique, sociologie ou droit, que Roger Martin du Gard a rassemblée pour l'ensemble de son oeuvre, par exemple sur l'affaire Dreyfus pour le personnage de jean Barois, sur la Première Guerre mondiale pour Les Thibault, sur les années 1940 pour les Souvenirs du colonel de Maumort. Mais aussi des études sur le monde médical (on pense à Antoine Thibault) sur l'anarchisme (on pense à Jacques Thibault) sur les mouvements philosophiques de la fin du XIXe siècle (on pense à Jean Barois) sur Lyautey (pour le colonel de Maumort).

    Cette bibliothèque offre donc aux chercheurs des ressources très riches à exploiter, non seulement sur Martin du Gard en particulier, mais aussi sur la NRF, les rencontres de Pontigny ou le théâtre du Vieux-Colombier.

    Pour le Tertre d'autre part, c'est une chance offerte aux groupes de travail français ou étrangers qui viennent depuis quelques années profiter du calme de la maison et du parc, et mettre en oeuvre une réflexion ou un travail collectif; depuis quelques années en effet, nous sommes en mesure d'héberger une vingtaine de stagiaires ou étudiants avec leurs professeurs, et de proposer des lieux de travail ou de spectacle. Pour des raisons occasionnelles et fortuites, nous avons reçu jusqu'ici essentiellement des stages de musique et de théâtre ; cette année, nous accueillons un séminaire de littérature de l'Université allemande d'Osnabrück, qui se propose de travailler sur le théâtre de Copeau et de Martin du Gard.

    Nous offrirons pour la première fois la possibilité de consulter la bibliothèque, d'utiliser le fonds dont j'ai parlé tout à l'heure, auquel s'ajoutent des collections de périodiques : la Revue des deux mondes, la NRF, le Mercure de France, Europe, l'Illustration. Nous y ajoutons des livres reçus après 1958, d'origines diverses, des usuels, dictionnaires, encyclopédies ou collections d'oeuvres classiques.

    Tout cela nécessite une organisation nouvelle, qui est en cours aujourd'hui; les projets immédiats étant de dépouiller les périodiques pour une consultation plus intéressante, et d'informatiser l'ensemble pour des recherches thématiques.

    Pour conclure, nous nous efforçons de garder au Tertre l'atmosphère de travail qui est la sienne depuis les années 1925, les souvenirs des écrivains qui sont venus très nombreux : André Gide, Jean Schlum-berger, Albert Camus, André Malraux, Jean Tardieu, pour n'en citer que quelques-uns.

    L'ouverture de la maison et de la bibliothèque correspond à l'idée que Roger Martin du Gard se faisait du devenir de cette maison, qu'il considérait comme une partie de son oeuvre, avec l'espoir qu'elle servirait à de jeunes étudiants qui renouvelleraient les habitudes de travail et de rencontres. C'est aujourd'hui un impératif pour qui veut conserver ce patrimoine et le transmettre.

    La maison elle-même

    Le Tertre est un manoir construit à l'époque de Louis XIII par un avocat au Parlement de Paris, grand propriétaire de la région de Bellême. Il a été agrandi au début du XIXesiècle par un magistrat proche de Napoléon, le comte Abrial ; ce dernier a dessiné le parc, ouvert des perspectives à la française. Roger Martin du Gard a transformé l'intérieur pour recevoir ses amis écrivains, installer sa bibliothèque et son bureau. Il a continué l'oeuvre d'embellissement de la propriété.