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Une enquête dans un pensionnat d'une cité industrielle de l'Est (juin 1958)

1960

    Une enquête dans un pensionnat d'une cité industrielle de l'Est (juin 1958)

    Par R Pechebrun

    L'association des parents d'élèves de l'établissement nous avait demandé de faire une causerie sur la lecture des jeunes. Manquant de connaissances précises sur ce sujet, nous avons voulu, préalablement, rassembler une documentation aussi minutieuse et vraie que possible. De là, l'idée d'un questionnaire à diffuser parmi les élèves du pensionnat.

    Le questionnaire, élaboré de façon à obtenir des réponses détaillées mais faciles à donner (barrer oui ou non suivant les cas), portait sur le goût de la lecture, le temps que les élèves peuvent y consacrer, les raisons pour lesquelles elles lisent, le genre de livres lus, le nombre et les titres des magazines lus et, enfin, les articles lus dans ces magazines.

    L'enquête a été faite avec le maximum de chance de succès. Les questionnaires ont été distribués de façon « impromptu », pendant un cours de religion par l'aumônier, les réponses données immédiatement, en un quart d'heure et sous surveillance, afin d'éviter les « idées communautaires ». L'enquête était strictement anonyme et faite au moment du départ pour les grandes vacances.

    Les questionnaires ont été distribués dans toutes les classes d'enseignement ménager et d'enseignement commercial ainsi que dans les classes de 3e, 2e, ler et philosophie de l'enseignement secondaire.

    Les 242 réponses ont été dépouillées.

    Les réponses ont été extrêmement intéressantes et révélatrices. Les élèves aiment la lecture (5 exceptions seulement) mais, en général, n'ont pas assez le temps de lire pour leur goût. Elles lisent pour se distraire, s'instruire, être au courant de ce qui se passe. Certaines réponses précisaient : « parce que je m'ennuie », « pour me changer du cadre habituel dans lequel je vis », « pour avoir un soutien moral parce que souvent je n'en ai pas d'autre », « pour oublier tous les soucis », etc.

    Presque toutes les élèves lisent des livres. Ceux qu'elles citent comme étant leurs livres préférés sont, en général, très bons, mais presque toujours des récits d'aventures, des romans d'amour et des auteurs classiques.

    Par ordre de préférence, toutes classes groupées, elles aiment :

    • Romans d'aventures (16 non) ; voyages et reportages ; vie de gens célèbres ; romans humoristiques ; livres de religion ; romans historiques ; romans d'amour (81 non); romans policiers; poésie; science-fiction; musique; peinture; philosophie (43 oui répartis dans toutes les classes).

    Elles aiment le jumelage livre-film.

    Elles lisent peu de digests et les réponses à cette partie du questionnaire sont à peu près négligeables.

    Le véritable problème est, en réalité, la question des magazines, illustrés, périodiques... 4 élèves seulement ont dit ne pas en lire du tout. La plupart en lisent beaucoup et les lisent presque intégralement.

    116 titres ont été cités :

    • 29 bons ; 44 honnêtes; 24 nous étaient inconnus; 4 journaux ; 15 répréhensibles pour tout genre de lecteurs.

    Bien souvent, les magazines cités ne conviennent pas à l'âge de l'élève qui les lit ; c'est ainsi que Radar est lu en lre année d'enseignement commercial ; Spirou en lre, Champion en philosophie, etc. Il semble que les élèves qui lisent plus de 20 magazines par mois en sont « intoxiquées ». Or on nous en cite 17, 20, 24 et même « de 50 à 80 par mois ». Plus elles en lisent, moins elles citent de titres.

    Parmi les revues à prohiber, on relève Radar, France-Dimanche, Nous Deux et toute une série de petites histoires en images comme Hondo, Humour, Indians, Kansas Kid, Tarzan, etc.Par ordre de préférence et toutes classes groupées, voici ce qu'elles lisent dans leurs magazines :

    Vignette de l'image.Illustration
    Typologie des contenus lus par les élèves d'un pensionnat d'une cité industrielle de l'Est dans les magasines : par ordre de préférence et toutes classes groupées

    Malgré la question épineuse des revues, les résultats de l'enquête étaient encourageants dans l'ensemble. Il apparaissait nettement, en effet, que l'éducation et l'instruction que reçoivent les élèves est un réel facteur de progrès dans le choix des lectures.

    La qualité des lectures croît de l'enseignement ménager à l'enseignement commercial et du commercial au secondaire. Les élèves des classes terminales « lisent mieux » que les plus jeunes.

    Si la question des périodiques montre que le champ d'action ouvert aux bibliothécaires et aux éducateurs est immense, c'est un encouragement précieux pour eux de savoir que leur présence n'est pas inutile et que, grâce à eux, les jeunes découvrent le monde des livres.