L'arrêté portant création des centres techniques de coopération, signé au début de l'année par le Secrétaire d'État aux universités, a donné au Centre national de prêt son existence officielle.
Si la convention entre le Secrétariat d'État aux universités et la Bibliothèque nationale fixe le rôle général du C.N.P. - « développement des possibilités de prêt interbibliothèques sur l'ensemble du territoire français..., satisfaction des demandes étrangères d'ouvrages français » - elle n'indique pas, volontairement, les missions précises qui vont être confiées au Centre et qui pourront, au fil du temps, être étendues à des secteurs les plus divers. Elle ne donne pas davantage le « profil » du futur Centre national dont on ne sait encore s'il sera une collection centrale à l'image de la Lending Division de la British Library ou plutôt un organisme aux collections importantes mais limitées à des disciplines définies et coopérant étroitement avec d'autres établissements également chargés de missions de prêt. Ce sera le rôle d'un groupe interministériel et du Secrétaire d'État lui-même très intéressé par cette réalisation de définir l'orientation à donner au Centre, compte tenu des besoins des bibliothèques françaises.
Par ailleurs au début de chaque année, un « cahier des charges » précisera le programme de travail à réaliser dans les mois à venir.
Par ailleurs au début de chaque année, un « cahier des charges » précisera le programme de travail à réaliser dans les mois à venir.
On voit que ces diverses dispositions reflètent le souci de ne confier au Centre, dans le domaine du prêt, que des tâches correspondant le plus immédiatement possible aux besoins évidents des bibliothèques, en « collant » très étroitement aux nécessités actuelles de la recherche, et de limiter ces tâches à celles, parmi les plus urgentes, qu'il sera réellement en mesure d'assurer, compte tenu des difficultés économiques de l'heure. Réalisme et prudence ont donc dicté la création du C.N.P. : elles n'excluent pas pourtant la possibilité pour le Centre de devenir, mais progressivement, une réalisation aussi importante et remarquable que la B.L.L.D. qui satisfait chaque jour plusieurs milliers de demandes.
Pour répondre aux désirs de beaucoup de nos collègues, nous nous proposons de donner ici quelques indications sur l'extension prise par le Service des prêts au moment où il devient l'un des Centres nationaux de coopération.
Le C.N.P. succède sans solution de continuité au Service central des prêts dont les deux fonctions d'origine définies par l'arrêté du 12 décembre 1935 demeurent, entre autres, les siennes : contrôle, en liaison étroite avec les Inspecteurs généraux des bibliothèques, du prêt des manuscrits entre bibliothèques (1) ; coordination du prêt en France, le Centre demeurant à la disposition des établissements pour les aider à régler les problèmes généraux qui pourraient se poser. Mais cette coordination, conçue alors d'une façon très limitative, reçoit par le récent arrêté une nouvelle dimension qui réjouira tous nos collègues : le Centre « doit » dorénavant « contribuer à animer une politique cohérente d'acquisition d'une part, de sélection et de répartition des doubles et de conservation d'autre part ».
Le Centre hérite des collections déjà constituées par le Service et qu'il va devoir développer avec des moyens nouveaux et dans les secteurs qui lui seront fixés. Celles-ci restent, en attendant une très prochaine implantation en province, dans les mêmes locaux (annexe de la Bibliothèque nationale et Grande Écurie du roi à Versailles) (2) , et c'est la même équipe, qui continue à s'occuper, dans des bureaux récemment aménagés dans ce dernier bâtiment, du prêt en faveur des bibliothèques.
Mais peut-être n'est-il pas inutile de préciser davantage ce que représentent ces collections qui comprennent des fonds de diverses natures et d'importance très inégale.
Fonds d'ouvrages et de périodiques de langue française: C'est le plus important de nos fonds. Faute de moyens adéquats pour envisager la constitution de collections étrangères qui n'auraient été vraiment utiles aux bibliothèques françaises que si elles avaient été très importantes, le Service avait dû limiter ses efforts au regroupement de collections françaises. Il savait que celles-ci pourraient immédiatement servir tant aux établissements étrangers qu'aux bibliothèques municipales françaises (dont 67,2 % des demandes portent pour la production nationale sur les monographies) et aux bibliothèques universitaires nouvelles (37 % pour les bibliothèques de droit et lettres). En agissant ainsi, le Service répondait à des besoins précis mais limitait le nombre des bénéficiaires. Son image de marque a pu en souffrir surtout vis-à-vis des établissements qui ne faisaient appel à lui que pour trouver l'ouvrage rare qu'aucune autre collection n'avait pu leur fournir.
Le Service avait, au 31 décembre dernier, rassemblé 52.734 monographies (par dons, cession des échanges internationaux, échanges et achats, ces derniers répondant le plus souvent à des demandes précises) et plus de 11.000 titres de périodiques (3) (pour la moitié en provenance, depuis 1955 au moins, du Dépôt légal des périodiques).
Ce fonds concerne toutes les disciplines et toutes les époques (2/3 de publications récentes, 1/3 de plus de 10 ans) ; et, pour les périodiques récents, le choix porte de préférence sur les titres les moins répandus, mais, ceux-ci provenant du dépôt légal, il est plus facile d'en augmenter le nombre en fonction des besoins des emprunteurs.
Il est évident que la meilleure façon d'assurer le plus large accroissement du fonds de monographies du C.N.P. serait de pouvoir disposer, comme c'est le cas déjà pour les périodiques, d'un exemplaire de dépôt légal. Le Centre aurait là le moyen le plus sûr et le plus rapide de se procurer les ouvrages nouveaux, parmi lesquels certains, rares ou fort chers, seraient particulièrement difficiles à obtenir autrement. En tendant dès maintenant à une quasi exhaustivité pour la production nationale, le C.N.P. serait, au bout de quelques années, en mesure de satisfaire la presque totalité des demandes.
Il a été prévu que les ouvrages ainsi reçus porteraient pour cote leur numéro même de dépôt légal. Ce numéro, qui figure parmi les données retenues dans le système informatique des bibliothèques, pourrait apparaître sur la fiche CANAC, ce qui permettrait aux bibliothèques d'en avoir connaissance dès lors qu'elles auraient la signalisation de l'ouvrage.
Le Service a estimé qu'il y avait des avantages à conserver dans un fonds distinct du précédent, du fait qu'elles sont moins consultées et plus encombrantes, les thèses de médecine et de science qu'il a pu déjà rassembler. Il s'avère que cette initiative concorde avec la création récente du Fonds national des thèses.
On sait qu'il est envisagé que le C.N.P. reçoive systématiquement des bibliothèques des universités de soutenance un exemplaire de ces thèses, la plupart dactylographiées ou multigraphiées et dont la répartition est très restreinte. D'abord regroupées localement, notamment à la Bibliothèque universitaire de Clermont-Ferrand pour les thèses de médecine, ces thèses seraient ensuite versées au C.N.P. pour qu'il en assure la communication, en libérant ainsi les bibliothèques de la charge du prêt.
En plus d'un fonds de périodiques japonais (signalés à l'IPPEC), le Service s'est vu confier une partie des collections vivantes de périodiques étrangers de certains grands établissements parisiens (environ 2.000 titres). En attendant que la liste en soit diffusée, ces périodiques ne servent qu'aux établissements qui en sont propriétaires et à leurs correspondants.
Ces dépôts ne peuvent que se multiplier. Le C.N.P. aura ainsi à conserver de plus en plus de collections anciennes, assez peu consultées dans les bibliothèques qui les avaient réunies mais dont la conservation dans un établissement spécialement conçu pour le prêt sur le plan national se justifie pleinement. Beaucoup d'établissements trouveraient dans cette possibilité de dépôt une solution partielle à leurs problèmes de place.
Le Service a recueilli des stocks importants de publications officielles et surtout de périodiques étrangers relativement anciens et très divers. Ces périodiques seront traités au fur et à mesure que seront précisées les tâches du Centre (et notamment les disciplines dont il sera plus particulièrement chargé). On pourra alors envisager l'accroissement systématique de ces fonds, par des cessions ou prises en dépôt, de façon à constituer des ensembles cohérents et étendus auxquels les bibliothèques puissent utilement faire appel.
D'autre part, par suite de l'importance des dons qui lui sont faits continuellement, le Service s'est trouvé détenir, en plus de ses collections vivantes, où en règle générale ne figure qu'un seul exemplaire de chaque titre, d'innombrables doubles, surtout de périodiques. Nous pensons que ce fonds pourrait servir à compléter les lacunes qui nous seraient signalées par les bibliothèques dans leurs propres collections. En fait, c'est une véritable banque d'échanges que nous souhaiterions mettre sur pied: recueillir les doubles disponibles, enrichir les collections du Centre, puis, à partir d'un fichier de lacunes, aider les établissements à rendre plus complètes leurs séries de périodiques. Les premiers essais réalisés se sont avérés très concluants. A titre d'exemple, des numéros de la revue Esprit reçus de la Bibliothèque municipale de Grasse ont permis de compléter des lacunes de la collection de la Bibliothèque universitaire de Rouen. Les revues dont on posséderait du premier coup ou par regroupement une collection suffisamment compèlte seraient proposées sur listes aux bibliothèques.
Quelques chiffres montrent l'activité du service en 1976. Il a reçu 22.777 demandes dont 20 758 en provenance des bibliothèques de province et de l'étranger (12 808 de l'étranger, 7 950 de France). De ces dernières, il a pu en satisfaire 5 994 (soit plus du quart) à partir de ses propres fonds ou des doubles de la Bibliothèque nationale, et 2 315 grâce au concours des bibliothèques parisiennes spécialisées. Les bibliothèques de province sollicitées en 3e lieu, complètent ces prêts, mais directement, ce qui ne permet pas au Service de les comptabiliser.
On sait que le Service doit établir, pour tous les ouvrages qui passent entre ses mains, des fiches qui rejoignent, dans un modeste fichier collectif, celles établies à partir du Catalogue de Montpellier et des réponses faites aux Cartes vertes.
Précisions aussi que le Service disposait en 1976, pour l'ensemble des tâches [administration, emprunts de manuscrits, prêts entre bibliothèques, participation aux expositions, réception et catalogage des dons et des dépôts), d'une équipe de 27 personnes. Pour le prêt proprement dit, la moyenne de demandes traitées par personne est de 2 278. C'est une moyenne assez faible qui s'explique par la dispersion du travail et des instruments de recherches (le Service de Versailles faisant fréquemment appel à celui de Paris) (4) et surtout de l'imprécision des demandes. Pour le catalogage des nouvelles collections, une équipe de 9 personnes a traité, en 1976 6 132 monographies et 1132 nouveaux titres de périodiques.
Dans l'attente des décisions officielles concernant le Centre, nous ne pouvons en dire davantage sur le programme d'activité qui sera le sien en 1978. Quant à l'année 1977, déjà bien entamée, elle ne pourra être qu'une période de transition, le problème immédiat étant l'installation du Centre dans de nouveaux locaux, compte tenu de la saturation de ceux actuellement occupés. L'aménagement de ces locaux, le déménagement des collections engrangées à la Bibliothèque nationale, à Paris et à Versailles, et leur traitement absorberont tous nos efforts.
Il ne serait pas juste de clore cette note de présentation du C.N.P. naissant, sans souligner tout ce qu'il doit à l'Administration et aux Départements de la Bibliothèque nationale. En mettant à notre disposition une partie de ses magasins, où notre présence apportait parfois une gêne à ses propres services, en nous faisant profiter du dépôt légal des périodiques, en nous affectant sur son propre budget des crédits d'achat et de reliure, ceux-ci ont rendu possible l'essor du Service central des prêts et son enrichissement en collections qui sont déjà d'une très grande variété.