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La direction du Livre et de la Lecture et les échanges culturels

1986
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    La Direction du Livre et de la Lecture et les échanges culturels

    Par Gérald GRUNBERG, Chef du Bureau du Développement de la Lecture Direction du Livre et de la Lecture

    Je ne voudrais pas consacrer mon temps de parole à ce que fait la DLL en matière d'échanges culturels entre bibliothèques car je craindrais de ne pas utiliser les 8 minutes qui me sont imparties : jusqu'à présent cette action n'est en effet restée que relativement marginale par rapport au thème de ce carrefour: incitation à une meilleure présence des cultures des communautés de l'immigration dans les bibliothèques, souci de la présence de produits étrangers dans les collections audiovisuelles, et, plus récemment, amorce d'une politique d'échanges bibliographiques.

    Depuis 1986, il existe pourtant un programme au sein de la DLL pour favoriser les échanges directs entre bibliothèques françaises et bibliothèques étrangères. Ce programme est né d'un double contact: d'une part des bibliothèques comme en Rhône Alpes mais aussi à Brest, à Cergy-Pontoise etc. n'avaient pas attendu que l'administration les y incite pour mener des actions d'échanges culturels internationaux. D'autre part, l'intensification des échanges dans le domaine de l'information bibliographique rend plus que jamais nécessaire de donner à ces échanges un contenu culturel, seul susceptible d'en élargir l'audience au-delà du seul public de chercheurs. C'est évidemment du côté de la mise en valeur du patrimoine littéraire de chaque pays que l'on imagine le plus rapidement ce qui pourrait être fait. Je dois dire qu'à cet égard la situation des bibliothèques publiques françaises est un peu paradoxale: un certain nombre d'écrivains français, vivant aujourd'hui dans notre pays, sont plus connus à l'étranger qu'en France et davantage invités par des bibliothèques étrangères que par des bibliothèques françaises. Il y a donc un premier travail à faire de notre part pour répondre correctement aux demandes de nos collègues étrangers. Mais, supposons le problème résolu. J'aperçois deux difficultés que rencontrent les bibliothèques publiques françaises dès lors qu'elles veulent aborder le domaine international et organiser des échanges. Tout d'abord, offrir une présence significative de documents en langues étrangères : les bibliothèques françaises ont sur ce point beaucoup de retard. Il est frappant de constater dans une bibliothèque moyenne, au Danemark ou en Angleterre, l'importance des livres et périodiques en français, allemand, russe etc. Ce problème des acquisitions étant traité dans un autre carrefour, je ne m'y attarderai pas. Je pense néanmoins qu'il y aurait intérêt pour de nombreuses littératures étrangères à faire ce que l'ADRI*, à la demande de la DLL, a fait pour les langues des communautés de l'immigration: guides, brochures bibliographiques etc. L'autre difficulté est celle des coûts des échanges internationaux: comment certaines bibliothèques pourraient-elles inviter des auteurs étrangers lorsqu'elles ont déjà des difficultés à payer un billet de train à un auteur résidant en France ?

    Il y a pourtant des solutions.

    La première d'entre elles consiste évidemment à s'adresser aux organismes qui organisent déjà de tels échanges pour leur dire: vous faites venir tel écrivain, ça m'intéresse, ne peut-on lui faire faire un détour par la bibliothèque ? Je prends un exemple: le centre littéraire de Royaumont organise régulièrement des séminaires de traduction avec des poètes qui viennent de tous les pays. Le dernier de ces séminaires a été l'occasion pour Royaumont d'inviter 4 poètes américains; ils ont bien été invités à faire une lecture... mais par une librairie. Cela coûte cher de faire venir des gens des Etats Unis, et dans un cas comme celui-là, aussi bien la bibliothèque intéressée que le centre littéraire de Royaumont ont tout à gagner à mettre en commun leurs moyens pour "profiter" au maximum de la venue de ces écrivains étrangers sur notre territoire.

    Il y aura bientôt le collège international des traducteurs à Arles. Il y a le British Council, le Goethe Institut, le club des lecteurs d'expression française qui fait un remarquable travail sur les littératures africaines, etc.

    Il faut donc repérer ce qui existe, faire pression sur ces organismes pour obtenir l'information au bon moment. Ce n'est pas toujours facile mais c'est faisable.

    Il y a aussi les possibilités nouvelles qu'offre la décentralisation qui va accroître les compétences et la capacité d'initiative des collectivités locales. J'observe par exemple que le contenu des jumelages, dont la nature culturelle n'était pas toujours évidente, évolue rapidement depuis quelques mois. C'est ainsi que la bibliothèque municipale de Mérignac a aidé la ville de Kaolac au Sénégal à créer une bibliothèque municipale: Mérignac a fourni 2 tonnes de livres et une assistance technique. Cette situation crée évidemment des conditions très favorables pour organiser dans la ville française une meilleure connaissance de la littérature africaine. La Fédération mondiale des villes jumelées vient elle-même de donner l'exemple, d'une part en organisant à Gorée un grand rassemblement où étaient conviés des écrivains des quatre continents, d'autre part en créant en son sein un poste de responsable pour les aspects culturels des échanges. Ce qui vaut pour une ville vaut aussi pour un département ou pour une région. La DLL, pour sa part, encouragera toutes ces initiatives: jumelage de bibliothèque à bibliothèque, "échange" de livres et d'écrivains, dès lors qu'il y aura un caractère de vraie réciprocité culturelle.

    Enfin là où l'initiative isolée peut s'avérer insuffisante, la coopération entre bibliothèques et son organisation à l'échelon régional est de nature à apporter des solutions nouvelles. L'Etat assume les responsabilités qui sont les siennes par des échanges internationaux réguliers, par des initiatives comme l'année France-Brésil etc., mais c'est véritablement au niveau de la région que pourront être le mieux organisés, pour les bibliothèques, les échanges culturels dont il est question et qui s'avèrent de plus en plus nécessaires, ne serait-ce que pour le rayonnement de la culture française à l'étranger dont chacun a, un peu, la responsabilité.