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Formation des usagers à Glasgow et au-delà (User Education at Glasgow and beyond)

1996

    Formation des usagers à Glasgow et au-delà (User Education at Glasgow and beyond)

    Par Henry Heaney, Librarian and Keeper ofthe hunterian books and manuscripts, University of Glasgow

    Avant d'aborder le problème de la formation des utilisateurs, il est intéressant de situer la bibliothèque, en quelques chiffres. Elle accueille 14 000 étudiants (DEUG et licence), 3 000 étudiants en 21 et 3ecycles, 4 000 enseignants/chercheurs et 2 000 agents non-enseignants ; ajoutons à ces chiffres, annuellement environ 2 000 inscriptions d'anciens étudiants et 5 000 personnes venant d'autres institutions pour consulter les fonds.

    La bibliothèque, comme l'université date du milieu du XV siècle. Elle possède plus de deux millions de titres ; parmi ceux-ci certains appartiennent à des collections très précieuses. La bibliothèque principale se trouve dans un bâtiment de onze étages et 40 bibliothécaires professionnels ainsi que 80 assistants, en plus des secrétaires, magasiniers et femmes de ménage y travaillent. Nous prêtons 700 000 ouvrages par an ; nous en empruntons 30 000, principalement à la British Library (nous sommes la bibliothèque universitaire qui lui empruntons le plus de documents).

    La grande majorité du fonds est en accès libre et nous utilisons un classification « maison -. De par sa taille la bibliothèque est impressionnante. Aussi essayons-nous de faciliter l'accès aux documents pour les étudiants de Veet 2e années en offrant un système de prêt de courte durée de nos ouvrages les plus demandés (short loan) dans une salle de lecture particulière.

    Auparavant, l'expression formation des utilisateurs (user education) signifiait : . montrer aux lecteurs comment utiliser la bibliothèque ». Cela comprenait : visites guidées, vidéos de présentation et guides sur papier pour les nouveaux étudiants ; guides détaillés pour tel ou tel service, telle ou telle discipline ; cours faisant partie des programmes universitaires.

    Nous organisons toujours des visites spécifiques par petits groupes pour les étudiants de 3e et 4e années. Ce service correspond aux besoins de ces étudiants. De plus, nous rédigeons un grand nombre de guides spécialisés qui sont à la disposition des utilisateurs. Toutefois, notre accueil des premières années et nos formations des 2e et 3e cycles ont beaucoup changé ces dernières années. C'est pourquoi il faudrait redéfinir ce que nous entendons par formation des utilisateurs. En effet, les visites pour les premières années n'existent plus. Avec l'augmentation du nombre d'étudiants elles s'avéraient moins efficaces et beaucoup d'étudiants refusaient de les suivre.

    Actuellement, en tant que directeur de la bibliothèque, j'adresse aux nouveaux étudiants une lettre d'accueil où je donne quelques renseignements pour une utilisation de base de la bibliothèque. Cette lettre est jointe au dossier d'inscription. Cette nouvelle méthode de travail montre les pressions que les universités britanniques subissent depuis quelques années.

    La multiplicité des formats de supports de l'information ainsi que les nouvelles techniques de fourniture de l'information influencent le développement des formations.

    Il faut également prendre en compte les changements concernant les étudiants de 1" cycle :

    • augmentation rapide de leur nombre ;
    • étudiants d'origines diverses : un plus grand nombre inscrit au service d'enseignement à distance, davantage de salariés ou d'étrangers, beaucoup d'étudiants handicapés ; nous les nommons les « étudiants non-traditionnels » ;
    • importance donnée par les étudiants à l'acquisition des connaissances, plutôt qu'à l'enseignement en tant que tel ;
    • plus grande utilisation des technologies nouvelles ;
    • procédures de contrôle de qualité (quality assuranceprocedures).

    Parallèlement, on perçoit les nouvelles possibilités dont bénéficient les étudiants de 2e et ceux de 3ecycles qui font de la recherche :

    • facilité pour trouver des ouvrages publiés ou des travaux en cours ;
    • rapidité pour obtenir des ouvrages de provenance extérieure ;
    • accès à l'information convertible ou déjà sur support électronique ;
    • nécessité de terminer des travaux intellectuels dans des délais impartis ;
    • obligation de publier les résultats de recherche ;
    • réseaux locaux connectés aux réseaux nationaux et internationaux qui permettent à chacun de recevoir des documents, dans son propre bureau sans passer, par la bibliothèque.

    La bibliothèque doit être à l'écoute des besoins des utilisateurs et les aider à trouver les sources les plus appropriées. Nous n'expliquons pas comment utiliser la bibliothèque, nous montrons comment elle fonctionne et comment les lecteurs peuvent » se retrouver dans cette jungle En effet, plus les bibliothécaires comprennent les besoins de leurs usagers, mieux ils peuvent organiser leurs services de formation.

    Restructuration du travail

    Ces tâches supplémentaires n'ont pas entraîné une augmentation du personnel, mais il y a eu une restructuration du travail. Le service personnalisé qui fut notre fierté a diminué. De nouvelles priorités ont émergé : supprimer les queues à la banque de prêt ; restreindre le nombre de livres à équiper ; diminuer les livres en désordre sur les étagères et réduire les retards pour le PEB.

    Nous essayons simplement d'assurer le quotidien. Le personnel doit se former aux nouvelles technologies, à l'utilisation des CD-ROM. En 1968, quand la bibliothèque centrale s'est ouverte dans les nouveaux locaux, il existait onze points d'accueil ; aujourd'hui l'espace public fonctionne autour de cinq pôles.

    Deux autres développements nous ont contraints à diminuer le nombre de professionnels aux points d'accueil. D'une part, certains utilisateurs continuent de fréquenter la bibliothèque après avoir terminé leur doctorat et il nous semble que si nous ne prenons pas d'initiatives, les utilisateurs profiteront moins de notre expertise qu'ils le devraient.

    D'autre part, la gamme d'informations et les façons dont elles sont présentées et diffusées changent. Pour pouvoir répondre aux demandes, nos bibliothécaires devraient se déplacer dans les différentes unités d'enseignement et de recherche ainsi que dans les locaux de l'administration pour exposer leurs besoins spécifiques. Nous pouvons ensemble profiter des réseaux électroniques qui se trouvent presque partout sur le campus. Pour que le réseau puisse livrer l'information de façon optimale, il est nécessaire que des plans soient formulés, tenant compte des besoins réels. Aujourd'hui, il faut également que les bibliothécaires spécialistes d'une ou plusieurs disciplines suivent les évolutions de leur domaine. Notre nouveau rôle n'est-il pas d'aider les collègues à maîtriser efficacement les informations de provenances diverses ?

    Tous ces changements nous ont influencé récemment, quand il a été question d'améliorer notre OPAC. Nous avons un OPAC depuis 1983 qui donne accès au catalogue de la bibliothèque. Nous souhaiterions que nos utilisateurs ne cherchent pas les informations dont ils ont besoin uniquement à partir de notre catalogue mais également qu'ils aient recours à un ensemble plus large de banques de données. Nous ne pouvons pas confirmer que notre OPAC aujourd'hui offre toutes les sources existantes dans chaque domaine scientifique, mais nous avons l'intention de proposer des écrans qui inciteront nos utilisateurs à aller au-delà de notre propre fonds. Nous espérons qu'à long terme, ils n'auront pas besoin d'autre aide que celle donnée par les différents menus de l'OPAC.

    Un deuxième point a encouragé le rapprochement entre les départements disciplinaires et la bibliothèque : la notion de contrôle de qualité. L'assurance de qualité tient une place importante dans les missions des universités britanniques. Dans le cadre de cette intervention, les comités de contrôle évaluent en même temps les enseignements et les services de la bibliothèque, liés aux différents champs disciplinaires. Des liens formels entre la bibliothèque, les enseignants et les étudiants sont nécessaires, des réunions doivent être organisées pour assurer le fonctionnement des programmes et pour évaluer les prestations de la bibliothèque par rapport aux attentes des étudiants. À Glasgow, des conventions ont été passées entre la bibliothèque et les départements voire même parfois avec toute une faculté. Ces accords stipulent les obligations des enseignants et des bibliothécaires qui doivent assurer une documentation quasi-exhaustive et disponible toute l'année. Le contrat exige que les accords soient réévalués tous les ans et les résultats publiés pour l'ensemble de l'université.

    Dès la mise en place des programmes, nos bibliothécaires sont associés aux diverses négociations. Le bibliothécaire qui assure la liaison avec les chercheurs est également l'interlocuteur privilégié des enseignants et à ce titre, intégré à l'organisation des différentes disciplines. Bien sûr, ces nouvelles tâches sont très prenantes. Auparavant les professionnels restaient à la bibliothèque et avaient pour mission d'aider sur place les utilisateurs. Aujourd'hui, il nous semble plus important d'investir du temps et des moyens, pour prévoir et organiser nos futurs services. Il vaut mieux anticiper que constater les dysfonctionnements rencontrés dans la bibliothèque. Certains utilisateurs et membres du personnel ont trouvé la transition difficile et n'ont pas voulu accepter ces changements. Mais je ne crois pas être le seul à préférer une grande surface bien ordonnée à un magasin où je suis obligé de demander sans arrêt de l'aide. Dans les bibliothèques, comme dans les autres centres de distribution, la tendance est au « self service », le but étant de permettre aux utilisateurs d'accéder facilement, par eux-mêmes, aux documents dont ils ont besoin.

    Dans cette optique, notre approche d'aide personnalisée aux lecteurs n'a pas changé, mais nous proposons des services particuliers à des usagers bien ciblés : soit aux étudiants étrangers, soit à des lecteurs qui ont des besoins spécifiques. Chaque année, un millier d'étrangers viennent à Glasgow pour effectuer des travaux de recherche. Nous travaillons plus spécialement avec ceux qui n'ont pas l'habitude d'utiliser des bibliothèques en accès libre, ou qui viennent de pays où la culture de l'information n'est pas valorisée. Nous organisons des « semaines d'accueil (welcome weeks) où les étudiants étrangers sont chaleureusement invités. Certains de nos guides ont été traduits en arabe et en chinois. Nous nous efforçons de proposer un service plus personnalisé aux étrangers.

    Nous menons également une politique particulière pour les étudiants malvoyants. Nous avons équipé une salle spécialement pour ceux qui ne lisent pas les pages imprimées, avec l'aide du « Royal National Lnstitutefor the Blind ».

    On peut donc constater que la bibliothèque dispose d'un personnel restreint pour accueillir tous les lecteurs dans les salles de lecture et que les enseignants ayant de plus en plus d'étudiants dans leurs cours ne peuvent plus offrir un service individuel de qualité.

    C'est pourquoi, une plus grande utilisation des technologies dans l'éducation n'est pas simplement souhaitable. Elle est nécessaire et peut apporter des avantages tant aux étudiants, aux enseignants/chercheurs qu'aux bibliothécaires.

    En Grande-Bretagne, les conseils de financement des universités ont beaucoup investi dans le programme TLTP (Teaching and learning Technology Programme, programme de technologie d'apprentissage et d'enseignement). Dans le programme spécifique à l'université de Glasgow, intitulé : TILT (Teaching with Independant Learning Technologies, apprentissage par des technologies indépendantes), le rôle de notre bibliothèque est centré sur l'aide offerte aux étudiants pour maîtriser les outils documentaires, aussi bien des bases de données disciplinaires, que divers logiciels intégrant de l'hypertexte, et disponibles sur l'ensemble du campus.

    En étroite collaboration avec les enseignants, la bibliothèque a conçu plusieurs logiciels utilitaires (incluant de la documentation), facilement accessibles sur des ordinateurs personnels. Les chercheurs et étudiants de l'université de Glasgow, voire des autres universités britanniques et étrangères ont réagi très favorablement et nous avons commercialisé ces produits clefs en main. (À ce jour, environ 300 exemplaires ont été vendus). Nous espérons étendre l'utilisation de tels produits en Écosse par l'intermédiaire du réseau : « Metropolitan Area Network

    Conclusion

    Je n'ai pas pu, dans le cadre de cette intervention, vous donner des exemples détaillés des différents volets de la formation de nos utilisateurs. J'ai choisi de mettre en lumière les changements intervenus dans l'ensemble des structures universitaires, et de vous livrer quelques embryons de réponses. Ces transformations ne se sont pas faites sans difficultés. En effet, si nous avions réalisé cette mutation plus lentement, nous aurions eu plus de temps pour initier le personnel de la bibliothèque et les utilisateurs. Mais nous avons été pris de court par la précipitation des changements.

    Cependant, nous avons réussi à faire quelques études préalables à certains changements et actuellement, nous évaluons l'efficacité de ces nouveaux services. Certes, tout d'abord beaucoup déploraient le fait que la bibliothèque soit devenue impersonnelle. Mais, au fil du temps, les approches nouvelles ont été acceptées et notre dernier questionnaire a montré un niveau de satisfaction élevé de la part des étudiants.

    La meilleure preuve de cette réussite se lit au travers de nos chiffres de prêts qui continuent d'augmenter, et dans les demandes d'horaires d'ouverture plus larges de notre bibliothèque.

    Pour pallier le manque de personnel, nous devons trouver de nouvelles solutions, et il nous semble que la meilleure réponse aux besoins de nos utilisateurs sera « la réponse électronique ».