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Les lois Voinet-Chevènement et l'organisation des territoires

2000
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    Les lois Voinet-Chevènement et l'organisation des territoires

    L'exemple de la Lorraine

    Par Jean-Louis Munier, Chargé de mission Secrétariat Général pour l'Action Régionale(SGAR), Lorraine

    Le cadre législatif et réglementaire

    Le Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 15 décembre 1997

    Priorité au développement durable, qui « articule développement économique viable, développement social équitable et préservation des ressources pour les générations futures ».

    La finalité des politiques territoriales est de conjuguer aménagement du territoire et développement durable, avec pour orientation majeure la recomposition des territoires locaux.

    • * Promouvoir l'organisation des agglomérations pour enrayer l'exclusion, améliorer le cadre de vie, renforcer leur rayonnement international.
    • * Favoriser la constitution de nouveaux cadres de vie économique et sociale, les pays, fondés sur les solidarités actives entre tous les acteurs locaux.

    La Loi d'orientation pour l'aménagement et 1 e développement durable du territoire (LOADDT) du 25 juin 1999

    • * Elle repose sur plusieurs choix stratégiques (art. 2), dont :
      • Le renforcement de pôles de développement à vocation européenne et internationale.
      • Le développement local, organisé dans le cadre de bassins d'emploi et fondé sur la complémentarité et la solidarité du territoire rural et urbain...
      • L'organisation d'agglomérations.
      • Le soutien des territoires en difficulté : territoires ruraux en déclin, territoires urbains déstructurés, territoires en reconversion...
    • * Art. 25-26 : « De l'organisation et du développement des territoires des pays et des agglomérations. »

    Loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale du 12 juillet 1999

    • * Accent mis sur l'intercommuna-lité en zone urbaine :
      • Communautés urbaines (500 000 habitants).
      • Communautés d'agglomération (50 000 habitants autour d'une ville de 15 000 habitants).

    Le pays

    • * Notion de « pays héritage des expérimentations et dispositifs des années 1970-1980, qui ont promu le développement local.
    • * Fin des années 1970 = les contrats de pays, outils de développement global (précurseurs de la politique contractuelle).
    • * Loi Pasqua (1995) : « légalisation du concept de pays.

    « Le schéma national propose une organisation du territoire fondée sur la notion de bassins de vie organisés en pays et réseaux de villes (art. 2).

    Le thème fait aujourd'hui consensus politique.

    Les objectifs de la loi Voynet

    • * Constituer des organisations territoriales efficaces pour répondre aux enjeux contemporains du développement économique et de l'aménagement de l'espace.
    • Répondre au constat de l'interdépendance croissante des espaces ruraux et urbains (articulation ville-campagne).
    • * Encourager de nouvelles formes de partenariat autour de projets globaux de développement, fédérant initiatives publiques et initiatives privées.

    Qu'est-ce que le pays ?

    e « Un territoire qui présente une cohésion géographique, culturelle, économique et sociale... " (art. 25 LOADDT) : pas de seuils ni de critères de taille, mais apparentement à un bassin d'emploi (et d'aménagement).

    Question : quel est le meilleur périmètre ?

    Mais c'est un territoire choisi et proposé par les acteurs locaux : un pays se constate à partir d'une volonté locale.

    Un lieu d'action collective (un territoire de projet qui fédère collectivités locales et acteurs sociaux, économiques, associatifs autour d'un projet commun de développement (la charte de développement durable).

    Question: qu'est-ce qu'un projet de pays ? comment fédère-t-on ?

    Un projet doit naître d'une réflexion interdisciplinaire de tous les acteurs et se fonder sur une analyse approfondie du territoire (atouts, faiblesses, opportunités, projets) : un diagnostic partagé. Il définit une stratégie de développement, les grandes orientations à moyen et à long terme des politiques et actions à mener pour aménager et développer le territoire (la charte de développement durable).

    Il doit fédérer toutes les bonnes volontés et pas seulement les élus locaux.

    Le pays est un territoire de projet, mais ni un nouvel échelon de collectivité, ni une circonscription administrative, d'où une organisation souple, légère, s'affranchissant des limites administratives, qui ne doit pas être le maître d'ouvrage des actions définies dans le projet.

    La loi propose une organisation type syndicat mixte ou un groupement d'intérêt public de développement local, avec un conseil de développement qui est associé à l'élaboration de la charte, à la mise en oeuvre et à l'évaluation.

    e Un niveau privilégié de partenariat et de négociation : inscription dans une logique contractuelle afin de coordonner les initiatives des collectivités, de l'État et de l'Europe.

    Question : comment fait-on ?

    Le contrat de pays est l'outil de mise en oeuvre de la charte. Il est prévu au volet territorial des contrats de plan État-Région, et souvent aussi dans les futurs programmes européens, et apporte des moyens financiers pour l'action.

    Aujourd'hui, la mise en oeuvre suscite de nombreuses interrogations pratiques et déjà une certaine impatience sur les territoires, car le décret d'application n'est pas encore paru. Il devrait apporter des précisions sur les conditions de la constitution du pays, les procédures de reconnaissance, le contrat particulier, l'articulation avec les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) existants et avec les agglomérations, les parcs naturels régionaux (autre dispositif de développement local).

    Qu'est-ce qu'une agglomération ? Un certain parallèle-avec la notion de pays

    • * Notion d'agglomération : référence à des espaces denses dans la dépendance étroite de la ville-centre (aire urbaine pour l'INSEE).
    • * Préfigure une organisation politique, fiscale et administrative locale pour une gestion intégrée de l'espace urbain : vocation à devenir un EPCI (cf. loi Chevènement).
    • * Un territoire de projet (projet d'agglomération) proposant une stratégie de développement et d'aménagement portée par les acteurs locaux, visant tout particulièrement le développement économique, la mixité sociale et urbaine, la maîtrise de l'étalement urbain (similitude avec les pays).
    • * Mise en place d'un conseil de développement, seulement « consulté sur le projet (différent avec les pays).
    • * Le contrat d'agglomération, inscrit dans les contrats de plan, dispositif pour le financement des actions découlant du projet d'agglomération porté par les communautés d'agglomération ou les communautés urbaines.

    Aujourd'hui, la mise en oeuvre de cette politique dépend également de la parution d'un décret d'application.

    L'organisation des territoires en Lorraine

    Grande disparité entre les régions dans la mise en oeuvre de ces politiques.

    La montée en puissance des démarches de développement local

    • * La décentralisation et l'élaboration des contrats de plan ont depuis le début des années 1980 facilité la montée en puissance des démarches de développement local.
    • * En Lorraine, surtout les territoires ruraux, de taille très variable (souvent le canton), à l'initiative d'un leader politique local : « bassins de vie ».
    • * Souvent plus des programmes d'actions portés par des EPCI que des projets de développement profitant des dispositifs mis en place par les pouvoirs publics :
      • État : apports du FIDAR (Fonds interministériel de développement et d'aménagement rural) ou du FRILE (Fonds régionalisé d'aide aux initiatives locales).
      • Région : dispositifs contractuels appelés protocoles de développement régional ou local, puis conventions de développement local.
      • Départements : progressivement, à partir de 1986, chaque conseil général a mis en place sa propre politique de développement local.
    • * Structuration intercommunale de développement local souvent confuse, pas toujours adaptée aux enjeux des territoires.

    Progression très lente de l'in-tercommunalité à fiscalité propre jusqu'en 1997-1998.

    Accélération ces dernières années : la moitié des communes représente les 2/3 de la population lorraine.

    Les démarches de pays en Lorraine

    La LOADT 95 (loi Pasqua) a déclenché :

    • * 1 pays en opération de préfiguration (42 en France) : le pays du Val de Lorraine, initiative ancienne (1989) fédérant acteurs et EPCI autour d'un projet commun de développement de pays « constaté en 1997.
    • * 2 autres pays constatés en 1997:
      • * Le pays de Colombey-les-Belles et du Sud-Toulois : rural - 000 habitants - environ 40 communes - porté par un district.
      • Le pays du Lunévillois : 78 000 habitants - 162 communes - porté par l'association IDEAL.
    • Les pays en émergence Changement politique en 1997 + bilan de l'opération de préfiguration = relance de la politique des pays (appel d'offres DATAR).
      • Territoires ayant une tradition de développement local ancienne, mais en marge des procédures officielles : pays de Bitche, Saulnois, Verdunois.
      • Territoires profitant des nouveaux dispositifs pour s'organiser : dans les Vosges autour des comités de bassin d'emploi par exemple.

    Les projets d'agglomérations en Lorraine

    Peu avancés à ce jour.

    • 2 2 communautés en Lorraine :
      • La communauté urbaine du Grand Nancy.
      • La communauté d'agglomération du Val de Fensch.
    • Quelques débuts de réflexion autour de projets d'agglomération.

    Les réseaux de ville

    e Le Triangle, constitué entre les villes de Bar-le-Duc (Lorraine), de Saint-Dizier et de Vitry-le-François (Champagne-Ardenne) pour conduire ensemble plusieurs projets (formation, promotion, tourisme...).

    e Projet dans le sillon lorrain entre Épinal, Nancy, Metz et Thionville (transports, université, culture...).

    En guise de conclusion

    Je pense que les établissements culturels en général (médiathèques, bibliothèques, lycées), souvent implantés dans une ville-centre, sont des équipements structurants et de véritables centres de ressources au service de tout un pays ou de toute une agglomération.

    C'est à partir d'eux que peuvent se construire des projets culturels s'inscrivant dans un projet plus global de territoire.

    On peut enrichir un territoire en services en ouvrant les équipements à d'autres publics, en mutualisant les moyens, en recherchant des complémentarités (mise en réseau, polyvalence).

    Je ne peux que vous encourager, vous en tant que gestionnaires et animateurs de ces structures, à vous insérer dans ces démarches qui doivent mobiliser tous les citoyens de bonne volonté autour d'un projet de développement territorial.