Après une rapide chronologie rappelant les dates des protocoles d'accord et conventions interministérielles cul-ture/santé, culture/justice, Élisabeth Bailly précise que ces conventions et textes officiels ne peuvent porter leurs fruits que si les responsables de bibliothèques municipales et départementales se mobilisent pour rencontrer les directeurs d'hôpitaux, de prisons, afin de mettre en place ou de renforcer des actions de partenariat en matière de lecture publique. Les DRAC sont incitées à signer elles-mêmes des conventions afin d'engager localement la concertation et l'action.
Un important effort a été engagé par le ministère de la Justice, depuis 1986. Tous les nouveaux bâtiments ont intégré la place de la bibliothèque dans leurs locaux. À l'heure actuelle, 15 conventions ont été signées entre des DRAC et les directions pénitentiaires, 70 environ entre des communes et les établissements pénitenciers, 20 entre des conseils généraux et des prisons. La grande majorité des conventions signées localement portent sur la mise à disposition de personnel et d'ouvrages pour les bibliothèques.
On estime que 186 établissements (la totalité) possèdent une bibliothèque, voire pour certains plusieurs, mais 1/4 de celles-ci ne sont pas encore en libre accès.
60 établissements déclarent bénéficier de l'aide d'un bibliothécaire professionnel engagé dans la formation de détenus bibliothécaires (2) .
En matière d'acquisitions de documents, il est important de rappeler que les bibliothèques de prison sont éligibles au CNL à 50 % comme les autres.
En milieu pénitencier, les bibliothèques deviennent petit à petit le pivot de l'action culturelle.
Une commission culture/handicap a été créée par Catherine Tasca le 23/05/01. La France a pris un retard flagrant dans la question de l'accès à la culture pour les personnes handicapées, alors que la préoccupation envers elles profite à tous les publics en terme d'accessibilité, de signalisation, d'amélioration de l'accueil, etc.
Quelques communes l'ont bien compris, qui travaillent sur ces questions pour tous les habitants.
L'accès à la lecture pour les malades est une question ancienne.
En 1982, le rapport Vandevorde fait apparaître une situation de non-application des différentes circulaires.
En 1992, un état des lieux a été établi avec la collaboration de la Fondation de France. Un quart des hôpitaux avaient une salle réservée (48 m2en moyenne) avec des fonds importants mais vieux ; le prêt se faisait essentiellement en direction des malades et peu du personnel hospitalier ; les partenariats étaient très insuffisants avec la BM, à quelques exceptions près (Givors, Dijon, etc.).
92 % des points-lecture étaient gérés par des bénévoles organisés en associations (Culture et bibliothèques pour tous, la Croix-Rouge, les bibliothèques des Hospices civils de Lyon...) fédérées depuis 1981 au sein de la Fédération nationale des Associations de bibliothèques en établissements hospitaliers. 8 % fonctionnaient avec du personnel salarié, ce qui ne veut pas dire des professionnels des bibliothèques. Dans cette catégorie se situent par exemple la bibliothèque de l'hôpital du Havre, ou le réseau des 26 médiathèques de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, gérées par une quarantaine de bibliothécaires de métier. Cet état des lieux de 1992 reste encore globalement d'actualité.
En mai 1999 a été signée une convention entre les ministères de la Culture et de la Santé, ayant pour objectif d'inciter au développement d'activités culturelles dans les établissements hospitaliers. Elle comprend trois axes : création de jumelages entre institutions culturelles et hôpitaux, formation de responsables culturels en milieu hospitalier et développement de bibliothèques et d'animations autour du livre selon les recommandations de l'IFLA.
Elle incite les hôpitaux à passer des conventions avec les BM et BDP pour la mise à disposition d'ouvrages, l'aide à la formation des personnes, même bénévoles, et fait des recommandations pour les locaux. Les bibliothèques d'hôpitaux sont aussi éligibles au CNL à 50 %, comme les autres.
Suite à cette convention nationale, des conventions régionales DRAC/ ARH (Agence Régionale d'Hospitalisation) ont été signées, en particulier en Limousin, Rhône-Alpes et Picardie, d'autres sont en cours. Pour soutenir ces projets, une circulaire du ministère précise l'emploi de ces crédits déconcentrés des DRAC pour développer la lecture en milieu hospitalier. Par ailleurs, des partenariats locaux (Dijon, Rennes, Orléans, Troyes, etc.) avec les BM et les BDP sont établis sans être toujours formalisés dans les conventions. Il est malgré tout souhaitable de formaliser les partenariats pour éviter les arrêts intempestifs d'une activité qui a souvent mis du temps à s'installer, arrêts liés à un changement de direction par exemple. D'autre part. l'élaboration d'une convention locale permet aussi d'associer les personnels de l'hôpital à la réflexion sur les bibliothèques et l'action culturelle en direction des malades et d'eux-mêmes.
Une antenne de la bibliothèque municipale dans un centre de gérontologie : un exemple de collaboration BM/Hôpital.
La création d'un partenariat entre la bibliothèque municipale et le centre de gérontologie s'est faite au travers d'une histoire singulière dans un contexte à l'origine particulièrement favorable. D'une part, la volonté d'une équipe engagée dans la démarche d'un projet d'établissement, celui du centre hospitalier, ouvert sur l'extérieur. D'autre part, une ville inscrite dans une orientation sociale et socioculturelle très marquée en direction des publics spécifiques par des actions fortes pilotées par le CCAS et la bibliothèque.
L'établissement hospitalier est situé sur le lieu-dit Serre-Cavalier colline boisée de 8 hectares, et accueille un centre de résidence et de soins pour personnes âgées de 600 lits, le tiers étant réservé à des résidents de longs séjours. Les personnels (aides-soignants, kinésithérapeutes, ergothérapeutes. médecins) se sont associés dans une démarche collective de resocialisation des personnes âgées. La création d'une « rue d'animation » où se côtoient un coiffeur, un restaurant, une boutique, une bibliothèque, ouverts indifféremment aux résidents, aux personnels et aux habitants des quartiers environnants, a rencontré l'adhésion du plus grand nombre ainsi que celle des partenaires. Ainsi, dès les premiers échanges, l'opportunité qui a été offerte de constituer une bibliothèque de 110 m2, émanant d'un choix concerté par l'ensemble des équipes et des comités de quartiers locaux, a conforté la direction de la Bibliothèque du Carré d'Art dans sa volonté de répondre à cette sollicitation.
Une convention est venue consolider les engagements de chacun des partenaires entre la ville de Nîmes et le Centre hospitalier universitaire, similaire à celle établie avec l'Éducation nationale pour engager les écoles élémentaires des quartiers à s'impliquer dans des projets intergénérationnels.
La ville a pris à sa charge la constitution des collections (livres, périodiques, CD), la programmation de l'animation, la formation du personnel et la communication. Le recrutement du personnel sur des profils de médiateurs du livre, l'achat du matériel informatique, le mobilier bibliothèque (RBC) ont été dévolus au CHU.
Le fonctionnement actuel permet de gérer la bibliothèque comme une véritable antenne : visites de classes, venue de conteurs, participation à « Lire en fête ». La politique d'acquisition s'oriente vers une offre documentaire large tout en répondant aux demandes spécifiques liées à l'établissement. En 2001, une enveloppe de 70 000 francs a été dédiée à cette opération pour l'achat des collections. Les heures d'ouverture de la bibliothèque tiennent compte à la fois des besoins internes (ouverture à 13 h pour la relève des personnels), et de ceux du quartier (du mardi au samedi jusqu'à 18 h). Un nombre d'heures est affecté aux visites dans les chambres pour les personnes qui ont perdu leur autonomie.
Le public est majoritairement le personnel et les habitants des quartiers. La fréquentation est en hausse constante. Celle des résidents est plus faible. Elle tient essentiellement à l'investissement personnel que peuvent avoir les équipes médicales en place, et à la difficulté, pour certains patients atteints de la maladie d'Alzheimer, d'avoir des activités régulières. Une coordination au sein du CHU se fait de façon régulière entre la bibliothèque, et les responsables de Serre-Cavalier. Les liaisons possibles avec les personnels soignants sont à la fois nécessaires et difficiles à mettre en place, rencontres qui devraient permettre de prendre en compte la dimension documentaire et culturelle dans les activités proposées.
Le succès rencontré plaide en faveur de la validation de ce type de projet mixte, sans obérer le fait qu'une telle proposition appelle une adhésion des équipes en place que l'on doit constamment solliciter. Dans son activité, le CHU intègre toujours la bibliothèque. La mise en oeuvre d'une programmation d'animations régulières exigerait des budgets conséquents compte-tenu des demandes. Enfin, le personnel de cette bibliothèque est intégré, à la fois aux équipes de la Bibliothèque du Carré d'Art, par une participation active aux différentes réunions (animation, acquisitions, etc.) et aux équipes du CHU, dont il dépend administrativement. Cette volonté affirmée de privilégier l'intégration du personnel aux équipes du CHU a permis d'asseoir le projet dans la collectivité très hiérarchisée de l'hôpital. Toutefois, il ne faudrait pas omettre de dire que le statut à la fois précaire des emplois-jeunes et l'absence de possibilité d'intégration dans le cadre d'emploi de la filière hospitalière met à mal la poursuite de cette expérience sur le long terme. D'une façon générale, se pose le problème récurrent du statut des personnels impliqués dans ces partenariats, question à laquelle il faudra bien répondre pour sortir ces projets du mode de l'expérience.
L'absence d'un statut de bibliothécaire ou documentaliste dans certaines fonctions publiques, comme la fonction publique hospitalière, a été déplorée. Notre collègue, Monique Chegaray, bibliothécaire du groupe hospitalier du Havre, termine sa carrière comme maître ouvrier principal (cat. C).
Le ministère de la Justice a embauché des emploi-jeunes agents de justice ». Quelle est leur formation ?
Quelle sensibilisation leur est faite à la lecture et l'action culturelle ?
L'ABF peut-elle participer à cette réflexion ?
Le manque de sensibilisation dans les BM aux problèmes physiques des handicapés a été évoqué : actions de formation à multiplier, meilleure information sur les équipements spécifiques pouvant aider les personnes handicapées, relance par la DLL d'un groupe de travail sur les publics non-voyants pour les personnels des BMVR, remise à jour par la mission handicap de la BPI de la publication « Bibliothèques publiques et personnes handicapées »...
La place du bénévolat dans ces lieux de lecture « hors les murs » a également été posée : formation, encadrement, offre de lecture diversifiée sans censure...
Le manque de temps a clos cet atelier alors que de nombreuses questions auraient encore permis des échanges fructueux.