La Section des Bibliothèques-Musées des Arts du spectacle s'est réunie le mardi 10 mars à la Bibliothèque du Musée des Arts décoratifs.
Cette bibliothèque possède un nombre important d'ouvrages et de documents sur le théâtre, les costumes et les décors. Près de cinq mille recueils d'iconographie constitués par Jules Maciet sur des sujets divers sont à la libre disposition des lecteurs : il y a là une source précieuse de documents sur les spectacles. Il faut signaler aussi un important fonds d'affiches, particulièrement riche pour la période 1860-1920. La visite des locaux de la Bibliothèque, récemment réaménagés et augmentés d'une petite salle de conférence et d'exposition, fut dirigée par M. René Salanon, conservateur en chef.
Le thème de la séance de travail, placée sous la présidence de M. André Barsacq, concernait Les Enregistrements de pièces de théâtre et leur valeur documentaire. Un comédien, M. Michel Etcheverry, un acteur et metteur en scène, M. Jean Deschamps, un éditeur de disques spécialisé dans les Arts du spectacle, M. Lucien Adès, présentèrent tour à tour de façon fort animée et agréable leur point de vue sur ce problème.
Une audition d'extraits de pièces enregistrés dans des conditions diverses précéda immédiatement le débat ; on entendit en particulier :
La discussion fut essentiellement centrée sur trois questions :
Le point de vue du professionnel de théâtre, de l'éditeur de disque, du documentaliste et de l'amateur montrent là dessus quelques divergences.
Les acteurs, par exemple, estiment que même dans les cas où la technique de l'enregistrement est imparfaite, voire défectueuse, écouter la voix d'un illustre devancier leur apporte un enseignement très précieux : le témoignage tout à fait lisible pour un professionnel (articulation, respiration, mouvement) échappe un peu au profane.
Le dialogue acteur-public est considéré par tous comme très important : un texte comique apparaît vidé de tout sens s'il n'entraîne pas les réactions d'un public mais alors, que penser des rires à contre-sens ou de ceux qui sont provoqués par un élément visuel du spectacle ? L'auditeur se sent agacé, frustré et éprouve un sentiment de solitude. La perfection technique de l'enregistrement par ailleurs est difficilement conciliable avec les impératifs du spectacle. Il apparaît donc que les deux sortes d'enregistrement : sans public (en studio ou de préférence sur une scène) et avec public sont complémentaires et intéressants l'un et l'autre à des points de vue divers.
Quant à la question de savoir s'il convient de faire des enregistrements d'oeuvres intégrales ou si l'on doit préférer les extraits, il serait bien impossible d'y répondre de façon absolue : compte tenu des moyens dont on dispose actuellement il semblerait souhaitable de réserver l'enregistrement intégral à des oeuvres exceptionnelles.
Une conclusion s'impose à ce débat : les enregistrements sous quelque forme qu'ils se présentent, apportent indiscutablement un témoignage tout à fait valable pour la documentation des professionnels du spectacle et les documentalistes ou bibliothécaires doivent avoir le souci de les recueillir même quand ils n'ont pas atteint la perfection souhaitable.