De l'ensemble des travaux de la Division des bibliothèques desservant le grand public nous aurions pu extraire un certain nombre de sujets dont l'actualiét se vérifie également pour les Bibliothèques publiques françaises, par exemple :
Finalement, un thème semble avoir été au coeur des interventions et débats - tantôt sous-jacent, tantôt clairement abordé - sans pour autant avoir fait l'objet d'une communication particulière : la formation des utilisateurs. Ce sujet aura, rétrospectivement, d'autant plus retenu notre attention qu'il vient d'être choisi comme thème du prochain Congrès de l'A.B.F.
En ce qui concerne les Bibliothèques publiques, les travaux se sont articulés sur deux communications : celle de M. Ben Rugaas, Directeur de l'Ecole de bibliothéconomie d'Oslo, intitulée : « Comment la bibliothèque publique peut-elle atteindre tous les membres de la communauté ? » et celle de Mme Marie-Anne Hulshoff, du Centre hollandais de lecture publique et de littérature, portant sur : « l'UAP : interaction entre bibliothèque et communauté ; quelques expériences aux Pays-Bas ».
Pour B. Rugaas, parmi les concepts qu'il est nécessaire d'adopter ou les moyens qui doivent être mis en oeuvre pour tendre vers l'accès universel aux publications (la tolérance et la lutte contre la censure, l'unité des professionnels, la gratuité de la communication des documents, les possibilités offertes par l'informatique, etc...), figure la prise en compte de plus en plus grande des besoins des utilisateurs et de leurs difficultés à exprimer ces besoins. Comment traduire cette préoccupation dans la pratique professionnelle ?
Les bibliothécaires doivent d'abord entreprendre un effort portant sur le langage qu'ils emploient. Les utilisateurs se heurtent en effet à « la barrière du langage bibliothéconomique ». Il s'agit donc, pour le bibliothécaire qui détient sinon le savoir, du moins le langage qui permet d'accéder au savoir, de rendre ce langage compréhensible par tous les utilisateurs, en l'adaptant, le simplifiant.
Mais cela n'est certainement pas suffisant : pour susciter l'intérêt des gens, il faut leur parler de ce qui les concerne et, de préférence, dans leur propre langue. Or le bibliothécaire n'est pas forcément en mesure de la faire. Il doit donc avoir recours aux interprètes que sont les enseignants, les aides-sociaux, les responsables d'associations ou groupements : toutes les « personnes-clefs » de la communauté.
En second lieu, les bibliothécaires doivent s'attacher à aider les utilisateurs à exprimer leurs propres besoins documentaires. En effet, pour être complètement efficace, un système d'accès aux documents, même bien adapté au niveau des usagers, ne peut se passer d'un intermédiaire humain. C'est une des fonctions essentielles du bibliothécaire en lecture publique. Il faut donc veiller particulièrement aux problèmes d'accueil et d'orientation du public, effort complété par des actions pour familiariser les usagers avec les instruments de recherche de base, tels que les dictionnaires et encyclopédies, les catalogues, les index.
Cependant, les bibliothécaires n'auront garde d'oublier que la capacité des utilisateurs à exprimer leurs besoins dépend aussi (et avant tout) de facteurs extérieurs aux bibliothèques, notamment l'organisation politique et économique de la communauté et de ses institutions scolaires et éducatives
Enfin, pour M. Rugaas, il faut considérer que les utilisateurs des bibliothèques publiques ne sont pas seulement des utilisateurs mais aussi des utilisateurs potentiels. Il constate qu'une tendance actuelle de l'enseignement professionnel ne concentre plus uniquement ses recherches sur les usagers traditionnels des bibliothèques, mais s'intéresse aux moyens de toucher tous les membres de la communauté et c'est - conclut- il - l'aspect le plus intéressant et le plus prometteur des progrès de la bibliothéconomie d'aujourd'hui.
La communication de Mme M.-A. Hulshoff s'appuyait sur la même conception des bibliothèques qui sont un des agents de la libre circulation de l'information. Elle porte le même accent sur la nécessaire limitation des obstacles à la libre circulation de l'information. Elle enregistre le même constat : les utilisateurs actuels des Bibliothèques publiques se recrutent en majorité parmi ceux qui occupent une position privilégiée ou dominante dans la communauté, et ce sont les structures et les évolutions de la vie sociale, politique, éducative, qui restent déterminantes pour modifier l'utilisation des bibliothèques. Mais surtout, elle insiste sur la nécessité d'exploiter des relais pour la formation des usagers (pas seulement « les personnes-clefs » dont parle B. Rugaas, mais des groupes constitués) et sur les efforts à déployer en direction du non-public.
Cette conception s'appuie sur l'expérience menée en Hollande du Nord depuis huit ans, avec l'aide du Centre départemental de lecture publique de Hollande du Nord. Cet organisme a pour mission d'apporter son aide aux bibliothèques des municipalités de moins de 30.000 habitants (50 bibliothèques). En 1970, on a créé au sein de cet organisme un service socio-culturel auquel on a fixé pour tâche d'orienter les services des bibliothèques vers les non-usagers.
Sous l'impulsion de ce Centre départemental, l'action des bibliothèques publiques dans ce sens se caractérise par la recherche d'une coopération avec différents organismes : garderies d'enfants, écoles élémentaires, centres de formation professionnelle pour adultes, ou encore groupes de femmes, institutions regroupant des personnes âgées, etc...
Cette coopération peut prendre des formes diverses : organisation commune de réunions d'information sur les activités de la bibliothèque ; discussions sur le choix des documents et leurs utilisations ; élaboration commune d'expositions réalisées à la bibliothèque ou à l'extérieur; visite de la bibliothèque par des groupes.
Pour mener à bien ce travail, c'est le Centre départemental qui, du moins au début, entreprend les démarches de contact, ce qui décharge les bibliothécaires qui n'ont pas tous le temps ou l'aptitude nécessaire à l'accomplissement de ce travail. Mais pour que ces démarches puissent être poursuivies et approfondies par les bibliothécaires euxmêmes, le Centre départemental leur assure une formation spécifique dans ce domaine. Cet enseignement est fondé sur des expériences concrètes, amplement discutées au cours des cycles de formation et il se prolonge par un travail de publication.
Enfin, après sept ans de fonctionnement, on a ressenti la nécessité d'une étude et d'une aide à l'échelon national. C'est pourquoi depuis l'an dernier (1977) le Centre hollandais de lecture publique et de littérature, qui exerce sa compétence sur l'ensemble du pays, se préoccupe également de ces questions au niveau de la recherche.
Il nous semble que l'on peut, notamment, tirer de ces communications les conclusions suivantes :