La politique contractuelle s'est instaurée pour la documentation des établissements d'enseignement supérieur à partir de 1983. Bien que nouvelle pour ces établissements, la politique contractuelle comme mode de relation entre l'État d'une part, les collectivités locales, entreprises ou établissements publics d'autre part, a connu une grande extension ces quinze dernières années.
Elle consiste à élaborer des programmes d'action commune à partir de conventions, l'État accordant certains avantages, - notamment des subventions - à une personne publique qui, en contrepartie, s'engage à réaliser une opération ou à mener une politique agréée par l'État, leur élaboration résultant d'une véritable négociation.
La loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification confère à ces accords une nature purement contractuelle, c'est-à-dire - et c'est là la nouveauté - que les partenaires s'engagent, par un accord de volonté à certaines réalisations; il ne s'agit plus de constater simplement des intentions communes. Cette loi fait des contrats les instruments d'exécution du plan de la nation. Elle prévoit plusieurs types de contrat : les contrats conclus entre l'État et les régions qui sont les plus importants et les contrats que peuvent passer l'État ou la région avec toute autre personne publique ou privée (1) .
Une relation contractuelle a été établie entre l'État et les établissements d'enseignement supérieur pour la recherche d'une part et l'enseignement d'autre part avec la mise en place progressive de la réforme du premier cycle. Dans les deux cas, des crédits documentaires d'accompagnement ont été accordés. Mais pour la réforme du premier cycle, le montant des subventions accordées au titre documentaire étant limité et la région n'intervenant pas comme partenaire, nous n'aborderons ici que la procédure des contrats mise en place par la direction de la Recherche du ministère de l'Éducation nationale.
(2) En 1982, la direction de la Recherche du ministère de l'Éducation nationale a défini une politique nationale de la recherche universitaire autour de cinq objectifs spécifiques : assurer la formation par et pour la recherche; susciter l'émergence et assurer le soutien des jeunes équipes et des domaines spécifiques nouveaux ; pratiquer une politique active de soutien aux formations de qualité ; favoriser l'insertion régionale de la recherche universitaire; enfin, développer les relations internationales.
Pour réaliser cette politique nationale, tout en respectant l'autonomie des établissements d'enseignement supérieur et leur contribution au développement régional affirmées par la loi du 26 janvier 1984 relative à l'enseignement supérieur, la direction de la Recherche a mis en place la procédure des contrats.
Le contrat dont la durée est fixée à quatre ans constitue pour chaque établissement un véritable plan de développement scientifique. Son contenu est triple : il définit les priorités de l'établissement en matière de recherche ; il prévoit la répartition indicative des crédits par objectifs scientifiques et par type de formation; il fixe le plan d'équipement en matériels scientifiques pour la durée du contrat. A la fin des contrats, les résultats sont appréciés par le comité national d'évaluation (créé par décret n° 85-258 du 21 février 1985). Il est en effet nécessaire de pouvoir effectuer au terme du contrat un bilan dont les aspects positifs et négatifs permettent à chaque partenaire de faire le point avant de s'engager pour une nouvelle période.
L'élaboration du contrat se décompose en trois phases successives :
Les contrats pluriannuels de développement de la recherche se sont mis en place progressivement et ont concerné en
Ils reprendront en 1987 pour la première zone.
Dès 1982, année de la mise en oeuvre des premiers contrats pluriannuels de recherche, un volet documentaire (annexe V ou VI, dite de politique documentaire d'université) était joint aux dossiers adressés aux universités. L'objectif demandé était l'organisation - au profit de la recherche - d'une politique documentaire harmonisant et rationalisant les rôles respectifs de la bibliothèque universitaire et des bibliothèques d'unités d'enseignement et de recherche. Un financement spécifique complémentaire était assuré, d'abord par la direction de la Recherche, puis, conjointement à partir de 1985, par la direction de la Recherche et la direction des bibliothèques, des musées et de l'information scientifique et technique, à raison d'un million de francs chacune. Les titulaires des contrats sont les universités, mais par souci de clarté ne seront dénombrées ici que les bibliothèques universitaires concernées.
Douze bibliothèques (sur soixante bibliothèques universitaires ou interuniversitaires) ont ainsi obtenu l'attribution de crédits pluriannuels pour le soutien de l'opération «documentation des contrats de recherche » sept en province (sur trente-neuf bibliothèques universitaires ou interuniversitaires) et cinq à Paris (sur vingt et une bibliothèques universitaires ou interuniversitaires).
Une certaine diversité caractérise les modalités de financement de ces contrats dont les montants annuels varient pour l'État entre 100000 et 500000 F. Lorsque la région est partie prenante le financement se fait à parts égales.
Le bilan a des aspects décevants : aucune bibliothèque interuniversi-taire, exception faite de celle de Jussieu n'a fait l'objet d'un contrat pluriannuel, et il n'y a pas eu, au niveau national, demande de financement partagé concernant un domaine documentaire précis commun à plusieurs équipes de chercheurs. Mais le volet documentaire des contrats pluriannuels de recherche aura cependant eu comme avantages non négligeables de familiariser les bibliothécaires avec la politique contractuelle, de poser des jalons auprès des universitaires pour une contractualisation de la documentation recherche, et enfin de mieux intégrer la documentation à l'activité recherche de l'université et à l'environnement régional.
Ces premières expériences de contrats ont aussi permis de dégager deux idées essentielles: les contrats pluriannuels sont l'occasion d'accréditer auprès des différents interlocuteurs l'idée qu'il doit y avoir correspondance entre un niveau recherche et un niveau de documentation; et aussi que dans le cadre d'un budget limité, une progression de la documentation ne peut être garantie que par voie contractuelle, ce qui suppose l'identification d'objectifs.
Pour les premiers contrats documentaires il a été tenu compte des efforts d'organisation rationnelle de la documentation dans l'université - mais en 1987 le nouveau décret sur les services communs de la documentation sera entré en application. La deuxième génération des contrats devra donc s'orienter vers un contenu beaucoup plus précis afin que les diverses parties en présence : université, ministère de l'Éducation nationale, collectivités territoriales, sachent clairement à quoi elles s'engagent. Les services communs de la documentation seront amenés à faire apparaître des priorités documentaires correspondant aux priorités de recherche de l'université. Les contrats se présenteront alors sous forme de véritables programmes documentaires - adoptant un schéma commun pour qu'ils puissent être évalués et comparés - par disciplines ou sous-disciplines, et qui ne pourront être élaborés qu'après une évaluation des collections existantes dans le domaine concerné, la définition d'un niveau documentaire souhaité et les moyens nécessaires pour atteindre ce niveau pendant la durée du contrat.
Si les subventions accordées à la suite des contrats ne constituent encore - tout au moins pour la documentation - qu'une faible part de l'enveloppe documentaire globale, il convient de souligner que la politique contractuelle introduit une répartition des crédits ne reposant plus sur des critères normés mais sur une négociation. Elle exigera donc de la part du futur service commun de la documentation une collaboration étroite avec son environnement.