En 1993 le ministre chargé de l'Enseignement supérieur a chargé l'Inspection générale des bibliothèques d'un certain nombre d'études générales sur le fonctionnement des bibliothèques. Parmi ces études une enquête sur les politiques d'acquisition des BU a été conduite. C'est sur les résultats de cette enquête que se fonde le rapport de Marc Chauveinc, inspecteur général des bibliothèques.
La première partie de ce rapport propose une synthèse de l'enquête, des conclusions et des propositions. La deuxième partie présente des études détaillées sur cinq bibliothèques (Aix-Marseille-I, Amiens, Le Mans, la Sorbonne et Toulouse) et permet d'affiner les résultats nationaux et les conclusions générales de la première partie.
L'enquête a porté sur un échantillon de 27 Bu et les années retenues pour l'analyse des données vont de 1987 (dernière année de la période de pénurie) à 1992, soit une évolution sur six années.
Cette étude fait apparaître une progression des autres dépenses (fonctionnement courant, achat de matériel, amélioration des locaux, maintenance du matériel...) à peu près équivalente à celle des dépenses documentaires. Dans ces conditions on constate que le pourcentage des dépenses documentaires des bibliothèques universitaires françaises par rapport aux dépenses totales a baissé de 55 % à 52 %, et cela malgré une forte augmentation de la subvention ministérielle (218 %), des recettes totales (128 %) et des dépenses totales (119%). Si les dépenses documentaires ont connu une progression en valeur de 109 % (de 99 à 207 MF) cette progression reste moins forte que celle des « autres dépenses » (130 %). Du coup, les achats de livres ont doublé et les abonnements ont progressé de 36 %. Ainsi pour les périodiques on est passé de 63 392 abonnements en 1987 à 86 000 en 1992. A titre de comparaison, le total des abonnements des BUallemandes est de 360 000.
La raison principale de cette progression insuffisante mais régulière (en moyenne 20 MF par an, sauf en 1992) semble être le choix fait par les BU de mener de front la rénovation des locaux, l'amélioration des services et l'accroissement des collections. L'état des bâtiments rendait nécessaires ces travaux. Par ailleurs les bibliothèques se sont modernisées (antivol, prêt automatisé, CD-ROM, informatique, libre accès) avec pour corollaire une augmentation de leurs dépenses d'entretien, de maintenance et de gestion. De plus la faiblesse des crédits d'équipement conduit trop souvent à prélever les dépenses matérielles sur le budget de fonctionnement, avec des transferts indus du budget de fonctionnement au budget d'équipement.
Une amélioration de cette situation s'impose. Et si la croissance des collections est essentielle, il ne faut surtout pas arrêter la modernisation des BU françaises. A cet égard, le rapport de l'Inspection générale des bibliothèques avance plusieurs propositions :
Les bibliothèques doivent développer leurs ressources propres et les subventions des collectivités, en fournissant des services aux entreprises locales. Le budget des BU reposant à 82 % sur la subvention ministérielle et les droits étudiants, il ne serait pas excessif d'augmenter ces droits pour qu'ils atteignent la valeur moyenne d'un livre français (entre 150 F et 200 F).
Les BU doivent mettre en oeuvre une véritable politique documentaire. Cela commence, bien sûr, par une répartition équitable entre les sections, car on s'aperçoit que si certaines sections augmentent leurs achats, d'autres ne le peuvent. Chaque bibliothèque devrait établir, avec les enseignants et le Conseil de la documentation, une véritable charte documentaire. Pour cela, les bibliothèques doivent avoir une véritable gestion budgétaire, avec choix préalables et répartition claire des dépenses dans les différentes fonctions.
L'organisation des commandes et du catalogage doit faire l'objet d'un soin attentif de la part des directeurs afin qu'elle soit performante et efficace (commandes permanentes de collections, procédure de l'office, récupération des notices dans les bases bibliographiques...).
Souhaitons que cet ensemble de propositions soit entendu et que l'orientation suivie depuis quelques années par les bibliothèques universitaires se poursuive. Car c'est en continuant à moderniser leurs méthodes de travail, à mieux y associer les enseignants-chercheurs et à améliorer la satisfaction de leur public, en proposant notamment des collections d'ampleur et de qualité satisfaisantes tant dans une perspective d'enseignement que de recherche, que les bibliothèques universitaires françaises gagneront le pari lancé en 1989 par le rapport Miquel.