Index des revues

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    BNF

    Des nouvelles technologies pour la recherche

    Par Daniel Renoult, Directeur des systèmes d'information BNF

    Lors d'un récent article du Bulletin de l'Association des bibliothécaires français (1) a été présentée une synthèse des programmes successifs d'informatisation de la Bibliothèque nationale de France, depuis les premières expériences d'automatisation de la Bibliographie de la France jusqu'aux différents projets nés avec la création de la Bibliothèque de France. Après plusieurs années de préparation, la plupart de ces réalisations seront mises à disposition du public lors de l'ouverture du niveau recherche du site François-Mitterrand en octobre 1998. Les journées des bibliothèques d'art ont fourni l'occasion de faire le point sur ces grands chantiers et surtout de mettre l'accent sur les avantages que les chercheurs pourront tirer des innovations technologiques en cours.

    Un système d'information ouvert et intégré

    Sans doute faut-il d'abord rappeler les principaux choix structurants qui ont inspiré la réalisation du système d'information : système ouvert et intégré (par opposition aux actuels systèmes propriétaires et modulaires), architecture client/serveur à trois niveaux, réseau à haut débit (ATM à 155 mégabits de bout en bout), importante capacité de stockage (6 téraoctets), et grande puissance transactionnelle (temps de réponse compris entre 2 et 4 secondes pour 80 % des transactions) vont rendre possible une large gamme de services. Le premier d'entre eux se présente sous forme de bornes d'information interactives. A partir d'octobre 1998, aussi bien sur le site Richelieu que sur le site de Tolbiac/François-Mitterrand, les lecteurs pourront utiliser dès leur entrée dans les bibliothèques des écrans tactiles pour trouver rapidement les renseignements leur permettant de s'orienter dans les bâtiments et dans les collections et prendre connaissance des services qui leur sont proposés. Ce module d'information du public, développé comme une application Intra-net, est une interface qui s'appuie essentiellement sur les modes intuitifs et visuels pour fournir des informations à caractère général (conditions d'accès, actualités des expositions, concerts et manifestations culturelles, bref historique des départements) ou très pratique (par exemple localisation des collections en libre accès par thème, localisation des photocopieurs, etc.).

    Sur le site François-Mitterrand le haut niveau d'intégration des applications entre elles va permettre d'offrir un seul type de poste pour l'ensemble des services mis à disposition du public. Leposte d'accès aux services est un micro-ordinateur de type PC qui offre aux lecteurs toutes les fonctions souhaitées à partir d'une seule machine : information générale, accès au catalogue, demande de communication d'un ouvrage associée à la consultation du catalogue, consultation d'un réseau de cédérom (200 titres prévus) et interrogation de bases de données externes. Ces postes seront disséminés dans l'ensemble des salles de lecture : au niveau recherche, ils permettront d'obtenir la communication de la collection patrimoniale. L'accès à un catalogue unique incluant l'ensemble des documents imprimés et audiovisuels, soit 7 millions de références bibliographiques en ligne, va représenter pour les lecteurs de nouvelles possibilités de recherche d'autant que ce catalogue, conçu comme une base de données relationnelle à partir du moteur Oracle, pourra être interrogé aussi bien en langage contrôlé (cinquante index au total) qu'en langage libre.

    Déjà disponibles depuis l'ouverture du Haut de jardin en décembre 1996, les postes audiovisuels sont conçus suivant la même logique d'intégration. Chaque poste donne à la fois accès au catalogue et aux documents eux-mêmes. Une partie des images fixes, des documents sonores et des bandes vidéo sont servis par une régie numérique utilisant un réseau à haut débit, d'autres étant fournis par une régie analogique. Pour le lecteur, le résultat est spectaculaire puisque grâce à un double clic de la souris il peut passer de la référence aux images ou aux enregistrements demandés, et qu'il peut ensuite travailler sur les documents de manière interactive. En octobre 1998 l'inauguration du niveau recherche se traduira par l'ouverture d'une salle spécialisée permettant l'accès à la collection patrimoniale et l'élargissement de la collection numérisée. Rappelons que le programme prévoit la numérisation de 300000 images fixes, 100 000 étant déjà réalisées. Enfin, l'installation dans les mêmes locaux de l'Institut national de l'audiovisuel, dépositaire des archives de la radio et de la télévision constituera pour les chercheurs un atout supplémentaire du site François-Mitterrand.

    La bibliothèque numérique

    Parmi les innovations les plus attendues figure la bibliothèque numérique. Constituée aujourd'hui de près de 87 000 titres numérisés en mode image et d'environ 2 700 titres en mode texte, elle couvre l'ensemble des disciplines depuis l'Antiquité à nos jours. Une majeure partie des oeuvres est issue d'auteurs de langue française, les XVIIe, XVIIIeet XIXesiècles étant les plus représentés. Un accord cadre, signé avec le Syndicat national de l'édition en mars 1997, précise les conditions dans lesquelles les oeuvres sous droits pourront être consultées. Dotés d'écrans de grande dimension (21 pouces) et de haute définition, les postes de consultation de la bibliothèque numérique seront aussi pourvus d'une importante capacité de stockage permettant de décharger les ouvrages consultés sur le poste client. L'accès aux documents numérisés s'effectue par le biais du catalogue, la communication étant assurée par des serveurs spécialisés via le réseau haut débit. Les chercheurs disposeront d'un ensemble de fonctionnalités permettant notamment l'annotation, le sur-lignage, l'apposition de balises, la création de liens hypertexte, traitement de texte et traitement de l'image. Ils pourront obtenir des copies papier ou numériques de leur travail. La même logique de station intégrée prévaut pour ces postes très évolués ; le chercheur dispose de l'intégralité des fonctions du poste d'accès aux services et l'on devine l'avantage par exemple de pouvoir accéder à d'autres documents numérisés via Internet ou d'interroger les bases de données internes ou externes d'un même poste.

    Vignette de l'image.Illustration
    Gallica : Actuellement, le site accueille 35 000 visiteurs par mois

    L'accès à distance

    L'accès à distance est enfin une dimension majeure du développement des nouvelles technologies. Dans ce domaine la BnF a opté pour une stratégie Internet. Ouvert en 1996, le site de la BnF (www.bnf.fr) offrait déjà une assez grande variété de services : visite virtuelle du site François-Mitterrand, expositions virtuelles, bases de données en ligne (OPALE et OPALINE), catalogue des documents en libre accès, informations pratiques et professionnelles. Mais en 1997 la BnF répondait avec l'expérience Gallica à une attente souvent exprimée : offrir les documents numérisés à distance via Internet. Il s'agit pour le moment d'une expérimentation portant sur environ 2 800 titres et 7 000 images représentatives de la culture française du XLXesiècle dans les domaines politiques artistiques, scientifiques ou littéraires. Une partie des images proviennent du fonds Atget (photographies de Paris), de la maison Pierre-Loti et du Musée de l'Homme. Destinée à évaluer les réactions et les demandes du public vis-à-vis d'une offre nouvelle aussi bien sur le plan scientifique que technique, cette expérience met déjà en ligne 1 million de pages. Le format PDF a été choisi de façon que le public puisse utiliser un logiciel gratuit et téléchargeable (Acrobat Reader) pour charger les documents sur son matériel. Pour faciliter les modes de consultation, des critères variés ont été mis à disposition du public : consultation via les critères bibliographiques classiques (auteur, titre, éditeur, année), mais aussi via une chronologie ou encore par des accès thématiques dans lesquels les liens hypertextes permettent de sélectionner les documents. Chaque discipline a fait l'objet d'une présentation pédagogique. Une particularité importante de Gallica est la numérisation systématique des tables des matières et des légendes des images qui permet une interrogation par mots de l'ensemble du corpus. Depuis son ouverture le site accueille environ 35 000 visiteurs par mois, les encyclopédies et dictionnaires, les généralités sur les sciences et les arts ayant le plus la faveur du public. Les messages les plus encourageants proviennent des départements de lettres et sciences humaines des universités françaises ou étrangères, d'enseignants isolés, de centres culturels français à l'étranger.

    Parmi les innovations en cours, il faut enfin mentionner le Catalogue collectif de France, réalisé par la BnF en liaison avec le ministère de la Culture et le ministère chargé de l'Enseignement supérieur. L'année 1998 va en effet correspondre à la première phase de sa mise en oeuvre avec l'introduction sur Internet du Répertoire national des bibliothèques et des centres de documentation. Les étapes suivantes (consultation des catalogues et prêt entre bibliothèques) sont prévues en 1999.

    Pour les chercheurs en histoire de l'art, pour les bibliothèques d'art l'ensemble de ces services nouveaux constitueront dès 1998 une avancée significative qu'il s'agisse d'accès à l'information, aux catalogues ou aux documents eux-mêmes. La Bibliothèque nationale de France prépare déjà les étapes suivantes et notamment la future intégration des collections spécialisées dans le système d'information. Les campagnes de conversion rétrospective sont désormais consacrées à la base de données OPALINE. Riche aujourd'hui de 600000 références, celle-ci devrait à échéance de quelques années atteindre le million de références : d'importantes opérations sont en effet en cours ou programmées au Département des estampes, des cartes et plans, des arts du spectacle (fichier des spectacles) ou encore à l'Arsenal, tandis que des programmes de coopération scientifique permettent des enrichissements dans le domaine des manuscrits ou de la musique. Ainsi, dans le cadre du Répertoire international des sources musicales ont été récemment chargées sur OPALINE les notices du patrimoine alsacien qui sont accessibles en ligne.

    Deux remarques en conclusion. Rappelons en premier lieu que l'exploitation et la mise en service d'un système d'information font partie d'un projet. A cet égard, la BnF a choisi de confier sous la forme d'un marché d'infogérance l'exploitation et l'administration de son système afin de se concentrer le plus possible sur son coeur de métier : le développement et la mise en valeur des collections et des services de bibliothèques. En second lieu, on ne pourra qu'insister sur le rôle accru du personnel qualifié pour accompagner la mise en service de l'ensemble de ces innovations. Renseigner, conseiller, orienter, former aux nouveaux outils et par conséquent bien les maîtriser fait aussi partie de ces nouveaux projets et la formation des personnels de la Bibliothèque nationale de France comptera parmi les plus importants chantiers précédant l'ouverture.

    1. Renoult, D. -L'informatique au service du public: de la Bibliothèque nationale à la BnF-. Bulletin d'information de l'Association des bibliothécaires français, n0174, 1" trimestre 1997, pp 85-90. retour au texte