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    Gestion des collections et projet de service

    Le cas d'Evry

    Par Dominique Peignet, Directeur bibliothèquespubliques d'Évry

    Le contexte local

    Une ville nouvelle de la grande banlieue parisienne (agglomération de 80 000 habitants), avec la présence d'une université (6 000 étudiants en 1995, 10 000 aujourd'hui) et une population jeune. Une commune principale, Évry (50 000 habitants), siège de la médiathèque principale, et trois communes plus petites, Courcouronnes (14 000 habitants), Lisses (7 000 habitants) et Bondoufle (10 000 habitants).

    Les bibliothèques, comme le théâtre et l'école de musique, sont gérées par la structure intercommunale, le syndicat d'agglomération nouvelle (SAN) d'Évry. Le réseau constitué en 1989 comprend la médiathèque principale (3 000 m2) et six petites annexes (autour de 100 m2) implantées dans trois des quatre communes. Avant 1989, ces petites bibliothèques étaient gérées directement par les communes : certaines ont une origine associative, d'autres sont d'anciennes BCD développées par la commune d'Évry. Des travaux de rénovation et d'agrandissement significatifs de la médiathèque de l'Agora (ouverte en 1975) ont eu lieu en 1993 et en 1997.

    Ce réseau récent a connu une histoire mouvementée (cinq annexes sur onze en 1990 fermées en 1992 à la suite d'une crise financière de la structure intercommunale) et il est fortement déséquilibré entre la médiathèque principale et les annexes, que tout différencie. La médiathèque principale concentre 75 % des collections et tout le multimédia. Elle répond à une demande diversifiée, universitaire, cultivée, grand public, et connaît une fréquentation intense, quand le public des annexes est nettement plus ciblé et axé sur l'enfance.

    Un réseau enfin où les personnels des annexes (souvent à l'origine de la création des bibliothèques) sont fortement impliqués dans la vie de leur établissement, mais séparés de leurs collègues de la médiathèque par la perception du métier et du fait d'une formation technique insuffisante.

    Pendant la période considérée, malgré la situation financière délicate du SAN d'Évry, le budget de fonctionnement reste préservé à son niveau d'avant la crise, des crédits d'investissements sont ouverts sur la base de projets précis et une augmentation réelle de la masse salariale prend en compte les besoins en personnel et la reconnaissance de la qualification des agents présents. Le budget d'acquisition est globalement stable au niveau de 1,2 million de francs, 38 personnes animent le réseau avec un taux d'encadrement qui n'a cessé de se renforcer (3 conservateurs, 3 bibliothécaires et 17 agents de catégorie B, dont un nombre significatif d'assistantes qualifiées de conservation expérimentées en 1999).

    Pendant la décennie considérée, le réseau ne cessera de s'améliorer : travaux de rénovation de la bibliothèque de prêt adultes en 1993, réinformatisation en 19951996, augmentation de surface (+ 400 m2) et rénovation de 1 700 m2en 1997, informatisation et développement des collections des annexes, mise en place d'un service de prêt et de consultation de cédéroms en 1998-1999, accès internet public et sur les postes de travail des bibliothécaires en 19981999.

    Le projet de service

    Unifier le réseau et les équipes, rationaliser les tâches techniques, développer les compétences individuelles et collectives, renforcer la présence du personnel auprès des usagers et ses capacités à répondre à la diversité des demandes, améliorer l'offre documentaire, tels étaient les objectifs.

    Ma participation en 1993 à un séminaire portant sur l'évaluation des bibliothèques, organisé par le CNFPT, m'a permis de commencer à me doter d'une approche à la fois systémique et analytique du service. Elle m'a aussi convaincu que la bibliothèque mobilisait deux types de ressources, des documents et des bibliothécaires, avec un objectif principal : servir l'usager. Je m'étais étonné depuis longtemps du peu d'intérêt des bibliothécaires pour une vision unitaire et rationnelle des collections et j'étais intimement convaincu de l'insuffisance des méthodes de travail traditionnelles. J'étais aussi persuadé que la qualité du service se mesurait à la qualité des personnels et de leur travail, et que celui-ci reposait sur la formation et sur l'aptitude à capitaliser son expérience, à s'intégrer dans une action collective, à exercer différentes fonctions dans un même lieu et de préférence dans plusieurs bibliothèques.

    La situation locale était difficile et l'horizon budgétaire peu encourageant, des mutations technologiques s'annonçaient. À mon arrivée, il n'y avait qu'un PC pour tout l'établissement, les différentes composantes du service étaient faiblement intégrées. Heureusement, le niveau de compétence était bon et la motivation importante chez des collègues habitués à travailler dans des conditions changeantes et difficiles.

    La mise en oeuvre d'une politique commune de gestion des collections s'est donc inscrite dans le cadre d'une réorganisation globale du service. L'ensemble de l'activité de la bibliothèque se polarise sur le service aux usagers, et le métier de bibliothécaire prend tout son sens dans la médiation entre l'usager et les documents. Les bibliothécaires doivent consacrer plus de temps aux usagers et améliorer la qualité de leurs relations. L'organisation du travail s'inscrit autour de deux pôles :

    • * Les services communs, associant fonctions de direction et fonctions logistiques : direction et relations avec la tutelle, développement stratégique, administration et finances, formation du personnel, communication et activités culturelles, informatique et mise en place des nouvelles technologies, et circuit du document centralisant progressivement le traitement, indexation, élaboration des notices catalographiques et équipement, de tous les documents.
    • * Les services au public, rassemblant la gestion centralisée des transactions avec le public, la gestion des salles et le rangement, l'accueil et le renseignement du public, la mise en oeuvre des animations, les politiques d'acquisition et de désherbage.

    Cette division de type managé-riale ne recoupe pas celle, profondément inscrite dans l'habitus du bibliothécaire, qui existe entre travail interne et service public, fondée sur la séparation entre le document et le public. De ce fait, son degré de compréhension et d'acceptation au sein de l'équipe est très variable. Les comportements réels, informés par des vieilles habitudes, ne suivent pas toujours les discours. La mise en place de la nouvelle organisation va prendre plusieurs années, et doit composer avec l'ancienne division en sections au sein de la médiathèque principale et avec les particularités de chaque unité du réseau. La mise en oeuvre des services communs a pris trois ans, celle du pôle services aux publics restait encore problématique en 1999.

    La situation à modifier

    Penser la collection comme une unité par-delà les supports, les contenus, les publics visés et les lieux conduisait à interroger la segmentation traditionnelle de l'organisation des acquisitions de documents. À Évry comme ailleurs, elle reposait sur une typologie des documents, des supports et des publics, et sur l'opposition fic-tion/documentaire. Elle était également informée par les modes de classement et de présentation des collections.

    Cette segmentation est un produit de l'histoire du réseau. Conçue à l'origine par un conservateur d'État, la bibliothèque principale portait la trace d'une vision de la bibliothèque comme lieu d'étude et de référence, l'espace noble étant réservé aux documentaires, les préoccupations de lecture publique (romans, paralittérature, littérature pour la jeunesse) étant maintenues à la périphérie comme les nouveaux supports disques et vidéogrammes, bien qu'ils aient très tôt fait partie des collections de la bibliothèque.

    Quant aux annexes, elles portaient la trace de leur origine et étaient fortement marquées par une vision de la bibliothèque associée à l'école ou conçue d'abord comme lieu de lecture, l'aspect information et documentation étant jugé secondaire. Chaque segment était fortement intégré et valorisé par les bibliothécaires qui en avaient la charge, et il faut bien reconnaître que pour certains, tels que les livres pour les petits, les collections de documents sonores, l'investissement personnel des collègues dans la maintenance et la connaissance des collections était et reste très fort.

    L'autonomie dans l'acquisition des documents pour sa bibliothèque ou son secteur est une prérogative où s'exprime l'identité professionnelle ; cette prérogative peut être basée soit sur une qualification réelle, ouverte à la critique professionnelle, soit simplement sur une expérience particulière. Il y a donc une histoire objective de chaque élément de ce tout disparate que constitue la collection, et une histoire subjective de ceux qui ont pris en charge ces segments. Cette segmentation s'est aussi cristallisée dans des attributions budgétaires et des stratégies négociées d'acquisition.

    Le suivi des acquisitions se poursuivait aussi par le traitement des documents qui, au début des années 1990, était assuré par les sections et bibliothèques, voire par des personnes particulières, les contraintes de la normalisation et du logiciel assurant un minimum d'ordre. Ces méthodes, bien entendu chronophages, étaient fortement revendiquées par les collègues qui, bien naturellement, y voyaient le lieu d'affirmation de leur professionnalisme.

    Il s'agissait donc de passer d'un système empirique et fédéral, où chacun achète et traite ses documents en fonction de son champ d'action, à une vision unitaire et globale où chacun participe à un effort commun et accepte de se soumettre au regard de l'autre.

    La mise en oeuvre d'une politique commune de gestion des collections

    La mise en oeuvre de la politique de gestion des collections a été initiée dans son principe à partir de 1994 avec deux objectifs. Un objectif économique : améliorer la performance des dépenses d'acquisition et préparer à budget quasi constant l'introduction de nouveaux supports. Et un objectif de management général : améliorer la compétence globale de l'équipe dans ce domaine. Elle s'est faite en parallèle avec une réflexion sur l'accueil du public, sur la logistique générale et sur la mise en cohérence du réseau et des services.

    Elle a dû s'inscrire dans la vie mouvementée du service, confronté à la réinformatisation, à des travaux importants et au renouvellement d'un tiers du personnel au cours de la période allant de 1991 à 1999. Elle a accompagné le mouvement progressif de réorganisation du service entre services communs et services aux publics.

    Elle a mobilisé des moyens humains et des moyens techniques et organisationnels, et elle a suivi un calendrier étalé sur plusieurs années et tenant compte d'inévitables impondérables.

    Une mise en place progressive

    En 1994 est mise en place, à côté de l'équipe de direction restreinte qui assiste les conservateurs, une nouvelle structure baptisée comité de direction. Elle regroupe treize cadres choisis plus en fonction de leur qualification et de leur expérience que dans le souci de représenter la totalité du service. Cette instance n'est pas une instance de décision, c'est un espace de débat et de confrontation professionnelle où chacun présente aux autres son activité ou traite d'un sujet particulier.

    Ainsi, les responsables de la bibliothèque des enfants et de la discothèque présentent leur activité, une collègue fait un rapport sur les relations de la population des 15-25 ans à la bibliothèque, etc. Peu à peu se constitue une vision commune et globale. Dans une deuxième phase, la discussion se concentrera sur la problématique de la gestion des collections. En 1996, ce comité de direction élabore une « charte des collections " qui sera discutée ensuite en réunion de service, validée et communiquée à l'ensemble du personnel.

    Fin 1995, un groupe de travail constitué de quatre personnes dont le directeur tient cinq réunions et élabore un document programmatique relatif à la gestion des collections, établissant la nécessité de procéder à une évaluation globale et de lier de manière précise acquisition et désherbage. Ce document sera présenté début 1996 au comité de direction.

    Parallèlement, depuis 1995, les acquisitions font l'objet d'une programmation globale avec des objectifs budgétaires et quantitatifs fixés à chaque bibliothèque et à chaque secteur. D'autres activités concourent à créer une culture commune, fondée sur le dialogue et le partage, face aux documents. Des réunions de lecture rassemblant tout membre de l'équipe, quel que soit son niveau de responsabilité, sont ainsi organisées régulièrement : chacun peut y participer pourvu qu'il ait un document à y présenter. À l'occasion de brochures thématiques (L'Enfant et la lecture, Les Cultures noires, Vingt Ans de création en France 1975-1995), des collègues d'horizons divers sélectionnent des documents pour les présenter.

    Fin 1996, la mise en oeuvre du nouveau logiciel permet la gestion informatisée des commandes et le passage à la récupération des notices. Un service commun du traitement des documents, d'abord limité aux livres, est mis en place. D'importants travaux à la médiathèque de l'Agora en 1997 nous conduiront à surseoir aux activités de gestion des collections. Délocalisé dans des locaux extérieurs, le nouveau service commun de traitement des documents va montrer toute sa pertinence en traitant sans retard la totalité des acquisitions alors que la médiathèque est en travaux, des dizaines de milliers de documents étant déménagés puis remis en place après les travaux.

    Trois années plus tard, ce service gère le traitement technique des commandes et le catalogage et l'équipement de la totalité des documents quel que soit leur type. Le circuit de traitement du document va accélérer la mise en oeuvre d'une gestion des collections en nous faisant gagner du temps, en améliorant la qualité du catalogue et en faisant passer la totalité des documents acquis en un seul point, concrétisant ainsi aux yeux de tous l'unité de la collection.

    En 1998, la collection étant répartie en domaines, plusieurs groupes, sous l'autorité de chefs d'équipe, commencent à évaluer les différents segments de la collection. Pour la première fois, l'ensemble des agents est associé directement au processus. Les équipes mélangent des collègues issus de succursales et de la médiathèque centrale, des bibliothécaires pour enfants et des bibliothécaires pour adultes. Sur les six groupes constitués, seuls deux ont proposé une restitution écrite de leur travail. Cette expérience aura donc moins valu par ce qu'elle aura produit objectivement que par son existence même, où les plus expérimentés auront pu mieux mesurer leur connaissance d'un domaine et où les moins qualifiés auront pu mesurer la difficulté de l'exercice.

    On peut voir aussi qu'en 1998, soit quatre ans après le lancement du processus, le service n'est toujours pas capable de produire une évaluation globale formelle et d'y articuler une politique d'acquisition et d'élimination systématique. Le pilotage des acquisitions, fondé sur une analyse des statistiques d'activité et la remise en ordre progressive des segments les plus obsolètes, reste malgré tout empirique et est toujours le fait du directeur et de quelques responsables. Néanmoins, il est accepté par l'équipe et permet en 1998 de réduire tous les budgets de secteurs et bibliothèques afin de dégager un budget significatif pour l'achat d'une collection de cédéroms.

    En 1998, la nouvelle organisation du service est globalement intégrée par l'ensemble des collègues et la participation de tous à la gestion des collections est acceptée. La coordination des acquisitions entre la médiathèque principale et les succursales, longtemps difficile pour les acquisitions de livres destinés aux adultes, devient plus consensuelle. La quasi-totalité du personnel maîtrise la technique complexe de récupération des notices sous Électre et d'élaboration des commandes sous le logiciel AB6.

    Les commandes sont élaborées avec plus de soin et plus collectivement, et il est clair que le niveau d'information moyen de chaque collègue sur la collection a augmenté, améliorant ainsi la qualité d'information au public. Le cloisonnement entre secteurs et bibliothèques est beaucoup moins prégnant. La gestion des périodiques reste centralisée, mais chaque responsable de domaine identifie avec précision le coût et l'impact des périodiques associés, et d'une manière générale l'exploitation documentaire des périodiques dans le renseignement au public est améliorée.

    La procédure budgétaire

    En 1999, une nouvelle étape est franchie : le budget pour l'imprimé (papier et électronique) est réparti non plus en fonction des secteurs d'usage, mais en segmentant entre budget fléché et budget libre et entre documentaires et fictions. Le budget libre, laissé à l'appréciation du conservateur et de la bibliothécaire en charge du suivi de la gestion des collections, permet de gérer la nouveauté, les demandes de lecteurs. Le budget fléché fixe des objectifs précis par type d'achats et est structuré par un échéancier, coordonné avec la responsable du service commun de traitement des documents.

    Les équipes chargées des objectifs regroupent des collègues d'horizons divers et coopèrent librement quand les objectifs ont des points communs. Un document de travail commun est diffusé et discuté avec chaque groupe d'acquéreurs en début d'année. Les deux responsables assurent le suivi, conseillent, valident et veillent au respect des délais et à la qualité de l'exécution technique. Pour la première fois de leur vie professionnelle dans le service, des collègues d'une annexe ou récemment arrivés dans le service gèrent des acquisitions pour l'ensemble du réseau à l'intérieur d'une procédure soumise à contrôle et à discussion.

    Parallèlement, les outils techniques se perfectionnent, les bibliothécaires disposent en réseau sur leurs postes de travail du catalogue, d'Électre, d'un accès à internet et d'un accès en ligne à Références (outil de dépouillement de périodiques). Ils utilisent aussi les logiciels bureautiques pour créer des petites bases de données internes, telles qu'une base de données sur les abonnements aux périodiques avec des indications sur les coûts, le nombre d'abonnements, les thèmes abordés, les catégories statistiques, mais aussi des listes de titres, etc. Un jeune collègue chargé des polars et de la science-fiction élabore une petite base de données sur les fonds de base dans ce domaine. Ce travail lui permettra dans la même année de créer à titre personnel un site internet consacré à la littérature policière :

    (http ://www.multimania.com/ mauvaisgenres/).

    L'année 1999 est aussi celle où est introduite l'utilisation du logiciel d'infocentre Business Object, qui devrait permettre une connaissance plus fine de la collection et de ses usages. Ceci devrait relancer les procédures d'évaluation de la collection, que le module statistique du logiciel ne permettait pas d'assurer de manière rationnelle et appropriée.

    Épilogue

    Je m'étais fixé deux objectifs quant aux collections en 1994 : développer une vision unitaire et collective et améliorer la formalisation des activités de gestion des collections. J'entends par formalisation la capacité des bibliothécaires à enregistrer et organiser par écrit leur activité, constituant ainsi une mémoire objective facilitant la transmission aux nouveaux arrivants. Le premier objectif me semble avoir été atteint ; il faut bien reconnaître que le second ne l'a pas été, du moins pas encore.

    Les préconisations de Bertrand Calenge, intellectuellement cohérentes et pertinentes, s'avèrent difficiles à mettre en place dans des bibliothèques de taille moyenne, sauf à spécialiser des personnels dans cette tâche. Les aspects de la gestion technique et économique des acquisitions et des ouvrages désherbés pèsent plus qu'on ne l'imagine sur le fonctionnement de la bibliothèque, et ne sont pas toujours en phase avec le découpage synthétique des collections en domaines.

    Il aurait été possible de concentrer sur un petit groupe de bibliothécaires ayant une bonne connaissance de l'édition, capables de gérer des processus complexes avec des outils informatiques, l'évaluation de la collection et la gestion des acquisitions, ainsi que le désherbage pour l'ensemble du réseau. Il m'a semblé plus utile de tenter d'associer au maximum les collègues, car cela me semble avoir une vertu pédagogique : faire entrer un acte simple, conçu comme le socle naturel de la légitimité professionnelle, dans l'espace des actes problématiques, supposant l'acquisition d'un savoir et réalisé dans un espace mutualisé, ouvert au dialogue, à la critique constructive.

    Ainsi, chaque collègue, quels que soient sa formation et son niveau de responsabilité, est amené à se poser des questions simples : que font les producteurs, que sont les produits, qu'est-ce qu'être un acheteur, qu'est qu'un budget, pour qui fais-je cet achat ? Se poser en permanence ces questions me semble la clef d'une compétence réelle pour gérer une collection. Il s'agit de maîtriser et de synthétiser en situation la totalité de la chaîne par laquelle un livre existe, est sélectionné et classé, et rencontre ses lecteurs.

    On ne peut donc vraiment parler de gestion des collections pour le réseau des bibliothèques d'Évry en 1999, les procédures de désherbage étant encore peu systématisées et le lien entre évaluation et acquisition restant à renforcer, mais l'intelligence collective et la qualité des services rendus se sont, elles, incontestablement renforcées. La plupart des responsables ont pris l'habitude de rédiger un bilan annuel d'activité du service qu'ils gèrent, la dimension coopérative et la ligne hiérarchique coexistent mieux.

    Dans un article récent sur les statuts et leur lien à la représentation du métier qu'ont les différentes catégories de personnels, Dominique Lahary (1) , avec son humour habituel, évoquait le « cerveau reptilien des bibliothécaires. Travailler à la gestion des collections, plus que l'application de techniques, me semble un moyen pour modifier le paradigme de notre activité et déplacer son centre de gravité du document vers l'usager. Il nous reste à consacrer le même temps et la même énergie à acquérir, à classer et à analyser les documents et nos usagers et leurs demandes.

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    Annexe

    1. Dominique Lahary, Sous le statut, l'idéologie!- BBF, n°1, 2000, pp. 50-61 retour au texte