Index des revues

  • Index des revues
    ⇓  Autres articles dans la même rubrique  ⇓
    Par Hugues Van Bésien

    Livres d'enfance, livres de France

    The Changing face of children's literature in France Sous la direction d'Anne Renonciat. Hachette Jeunesse : International Board on Books for Young people (France), 1998. - 288 p. - ISBN 2012097022. br. 115 F

    Ouvrage collectif bilingue, avec le texte français (164 pages) et sa traduction : une histoire de la littérature de jeunesse en France, genre par genre, presse comprise, depuis le XVIIIesiècle. La bibliographie à la fin de chaque article omet les références des éditions anciennes. Le parti-pris, pour chaque genre, est assez strictement chronologique. L'ouvrage traite donc successivement la littérature (F. Marcoin et Nie Diament), le conte (Jean Perrot), les livres illustrés et les albums (S. Le Men, A. Renonciat, Claude -Anne Parmegiani), la bande dessinée (Jean-Pierre Mercier), la presse (Annie Fourment), les livres scientifiques (D. Raichvarg, G. Leguem), les documentaires (M. Manson), les livres contemporains sur l'art (Elisabeth Lortic).

    La littérature pour la jeunesse se constitue en même temps que les genres modernes des littératures nationales, adapte ou développe des genres spécifiques reconnaissables dans la longue durée. De ce point de vue, l'album défini comme narration par l'image est la grande acquisition des années 1980. Cette forme de littérature se transforme, plus que le reste de la littérature, avec les changements des techniques de fabrication. Elle représente dès le début du XIXesiècle un secteur économique non négligeable qui contribue largement à asseoir la fortune de certaines maisons d'édition : côté républicain, par exemple, celle d'Hachette avec la Bibliothèque Rose (années 1850) ou, côté catholique, celle de Mame avec les livres de prix.

    Cette polarisation n'est pas fortuite : orientée par les débats sur l'éducation, la littérature jeunesse l'est aussi par les luttes idéologiques : républicaine ou cléricale, elle participe à l'embrigadement des esprits au cours de la première guerre mondiale, connaît un avatar pétainiste, se fait antiautoritaire après 1968... Elle connaît aussi, à intervalles réguliers, des réactions bibliophiliques contre sa propre industrialisation notamment au début du siècle, dans l'entre deux guerres et dans les années quarante, deux moments de multiplication des importations de « séries » américaines. En ces occasions, sont renoués les liens avec la création contemporaine, qui, évidents à l'époque romantique, sont plus épisodiques depuis.

    On regrettera l'absence totale d'illustrations, contre lesquelles on aurait bien échangé la version anglaise ! Il est en effet peu fréquent, dans une bibliothèque courante, de pouvoir manipuler directement des productions anciennes, tandis que le néophyte risque fort de n'avoir aucune idée des multiples procédés graphiques abordés. Ce livre est en quelque sorte un « manuel » d'histoire de la littérature jeunesse : on n'y trouvera pas de thèses nouvelles, mais un panorama utile où placer des jalons, les uns par rapport aux autres : Bécassine et les Pieds nickelés, Hetzel et Le Père Castor, Tomi Ungerer et Benjamin Rabier... Il est à noter que les auteurs, venus d'horizons très différents (journaliste, bibliothécaires, universitaires) ont des appréciations divergentes sur la loi de 1949 concernant les publications sur la jeunesse.