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    La numérisation des archives photographiques

    Par Pascal Tanésie, Chargé d'études documentaires médiathèque de l'Architecture du Patrimoine

    Historique

    La première commande publique de photographies est à l'origine du Service des archives photographiques. En effet, dès 1851 la Commission des monuments historiques avait confié à cinq photographes de renom (Baldus, Bayard, Le Gray, Le Secq et Mestral) la tâche de dresser un inventaire iconographique des monuments français les plus prestigieux.

    Si cette orientation architecturale et patrimoniale est demeurée l'un des axes principaux de l'accroissement des collections, les acquisitions ou commandes ultérieures n'ont pas été limitées au patrimoine architectural et concernent aussi bien les portraits (Nadar, Harcourt) que le paysage, la vie quotidienne (Gilletta, Séeberger...), i'evenementie! (Première Guerre mondiale, Exposition universelle, inondation de Paris...).

    Créées en 1947, transférées en 1982 au fort de Saint-Cyr, les Archives photographiques doivent assurer une double mission de conservation et de diffusion. Longtemps assurée par la seule consultation de tirages, cette dernière aurait pu connaître un nouvel essor grâce à la réalisation d'un vidéodisque, qui est malheureusement devenu obsolète pendant la phase de conception de la base de données associée et n'a donc jamais été publié.

    L'âge du numérique

    La consultation

    * Les publics

    L'essor du numérique a ouvert de nouvelles orientations et constitue une solution idéale à la diffusion. L'image numérique doit alors être envisagée du point de vue de sa définition, de ses modes de consultation, de la précision de sa base de données associée. Le public concerné est le grand public (éditeurs, publicitaires, spécialistes de la photo, particuliers), mais aussi les personnes intéressées d'un point de vue professionnel par l'architecture et la construction (architectes privés ou publics, étudiants en architecture...).

    Ces dernières recherchent en priorité nos fonds architecturaux ou monumentaux. Quatre-vingts pour cent d'entre elles seront satisfaites par la consultation du fichier numérique et éventuellement l'impression de la photographie au format A4. Il faut toutefois envisager le cas où elles souhaiteraient "zoomer"sur un détail de la photographie, ce qui impose une définition supérieure à celle d'un moniteur.

    Quant au grand public, s'il peut s'intéresser aux collections monumentales, il sera surtout attiré par nos fonds de portraits, de vie quotidienne, de paysages ou d'événements. Il est rare qu'il se satisfasse d'un tirage numérique même de bonne qualité. Sa préférence ira encore pour quelque temps à l'argentique. Dans son cas, une définition d'image de qualité écran permettant la visualisation et le choix des photographies est suffisante.

    * La base de données

    La base de données associée à ces dernières devra bénéficier d'une indexation plutôt fine s'attachant à la description de la photographie. Alors que, dans le cas des photographies d'architecture, une base de données contenant des renseignements succincts sur la localisation, le sujet et la date de la prise de vue sera suffisante.

    'Le format de numérisation

    Le choix retenu pour les photographies est une définition de 3 000 x 2 000 pixels, ce qui dans le cas d'images noir et blanc permet d'obtenir des fichiers de 6 Mo. Les clichés numérisés par les photographes des Archives photographiques directement à partir du négatif sont stockés sur CD, puis rééchantillonnés et chargés sur le réseau du Ministère. Ils peuvent être visionnés au format vignette (en même temps que la fiche associée) ou en plein écran.

    La possibilité de zoom sur l'image du cédérom sera réservée aux lecteurs de la future Médiathèque de l'architecture et du patrimoine.

    * Les filières de numérisation

    Pour certains fonds, nous avons fait appel à la sous-traitance du point de vue tant de la numérisation que de la saisie des bases de données. Toutefois, nous n'avons pas obtenu de résultat immédiatement utilisable dans un cas comme dans l'autre. Les photographies ainsi saisies, de même que les bases correspondantes, doivent faire l'objet d'une correction par les photographes et les documentalistes du service.

    La dernière filière est la numérisation à partir du vidéodisque. Cette méthode, qui présente l'intérêt d'être rapide et de ne mobiliser aucun photographe, permet d'obtenir des vignettes et des images plein écran de qualité médiocre mais suffisante pour un choix en vue d'un tirage argentique. Toutefois, elle constitue une solution provisoire et il est souhaitable que les fichiers ainsi obtenus soient ultérieurement remplacés par des photographies de meilleure qualité.

    * Réalisation de photographies numériques directes

    Depuis octobre 1998, le SAP a entrepris la numérisation directe de reproductions de peintures murales au moyen d'un appareil photo numérique Fuji à capteurs CCD (cou-pied charge device), permettant l'acquisition en JPEG au format 1 280 x 1 024 pixels. Ce format est satisfaisant pour une diffusion sur Internet et pour des tirages de lecture, mais insuffisant pour l'édition.

    Les autres utilisations du numérique

    *La conservation

    Le numérique peut être aussi envisagé du point de vue de la conservation. En effet, si la conservation signifie en priorité le stockage dans des conditions satisfaisantes de température et d'hygrométrie, elle nécessite souvent la duplication sous forme de contretypes des négatifs fortement dégradés. Le remplacement du contretype argentique par un contretype numérique qui peut être aisément retouché, de façon à éliminer cassures, taches, manques de gélatine, a été étudié.

    En raison du poids important de ces fichiers, du coût élevé d'une telle opération et des problèmes déontologiques que pose la retouche, la filière numérique a pour l'instant été abandonnée au profit de la filière argentique pour tout ce qui concerne la conservation.

    ' Édition et exposition

    • Lédition : toute image publiée a été traitée de façon numérique, et le SAP a dans certaines circonstances fourni directement des fichiers numériques à des fins d'édition. Toutefois, la résolution demandée est telle (355 ppp au format réel) que, dans la plupart des cas, la photographie doit être spécialement numérisée pour l'édition.
    • L'exposition : en collaboration avec le Musée national de la coopération franco-américaine, le SAP a réalisé une exposition constituée en totalité par des tirages numériques au format 24 x 30 cm. Ces tirages étaient des reproductions d'autochromes datant de la Première Guerre mondiale. Le procédé de l'autochrome (granulation), se prêtant bien à la restitution sur des imprimantes à jet d'encre, a facilité la réalisation de cette exposition.

    Les problèmes juridiques

    Les images ainsi obtenues sont devenues des images nomades, dont la circulation est difficile voire impossible à contrôler. Toutefois, le problème ne se limite pas à Internet, aujourd'hui toute image publiée peut être copiée. Si nous ne voulons pas enfermer les photographies dans nos dépôts, nous devons courir le risque du piratage. Mais nous devons nous efforcer de le limiter, en particulier grâce à des moyens juridiques, et nous prémunir face au danger tout aussi grave que représente la possibilité d'apporter des modifications aux clichés.