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    Recenser les besoins en formation

    L'exemple d'un CFCB

    Par Sylvie BARBIER, bibliothécaire à Médiaquitaine CFCB de Bordeaux.
    Par Laurence TARIN, conservateur à Médiaquitaine CFCB de Bordeaux.

    MÉDIAQUITAINE EST L'UN DES DOUZE CENTRES DE FORMATION AUX CARRIÈRES DES BIBLIOTHÈQUES (CFCB) placés sous la tutelle de la sous-direction des bibliothèques du ministère de l'Éducation nationale.

    Ces centres ont pour mission première la formation continue des personnels des bibliothèques d'État, donc, en province, essentiellement les personnels des bibliothèques des universités. Cependant, par convention avec les Directions régionales des affaires culturelles qui peuvent subventionner les CFCB et grâce à des accords passés localement avec certains CNFPT régionaux, les CFCB proposent également des formations aux personnels des bibliothèques de lecture publique.

    Le propos de cet article est de mettre en relief, à travers l'expérience de Médiaquitaine, la façon dont les besoins en matière de formation continue des personnels des bibliothèques peuvent être recensés et analysés par un CFCB.

    Recenser les besoins

    Rappelons tout d'abord que les actions de formation continue s'inscrivent nécessairement entre deux impératifs : faciliter la promotion sociale et l'évolution de carrière des agents et permettre l'adaptation des compétences de ces mêmes agents aux évolutions de l'environnement des bibliothèques et aux objectifs poursuivis par les établissements.

    Le recensement des besoins ne peut donc se réaliser qu'au moyen d'un ensemble de mesures visant à croiser des informations émanant des organismes de tutelle et des directions des établissements d'une part, et, d'autre part, des agents eux-mêmes.

    Le recueil d'informations auprès des ministères de l'Éducation nationale et de la Culture est relativement facile. Leurs souhaits s'expriment d'ailleurs tout simplement sous forme de commandes au CFCB.

    Ainsi, il a été demandé à tous les CFCB d'organiser des formations aux pré-requis nécessaires à l'implantation du système universitaire de documentation dans les bibliothèques des universités.

    De même, la DRAC Aquitaine incite fortement Médiaquitaine à réaliser des formations dans le domaine des technologies de l'information et de la communication dans le but d'accompagner sa politique de subventionnement des bibliothèques publiques dans ce domaine.

    Quant aux établissements euxmêmes, ils peuvent bien entendu avoir des politiques de développement qui leur sont propres.

    La situation des bibliothèques des universités est assez simple. Les grandes orientations des universités s'expriment à travers un document facilement identifiable : le contrat quadriennal (entre l'État et l'université). De plus, les Services Communs de la Documentation des universités (SCD) réalisent des plans de formation continue qui sont ensuite proposés aux CFCB.

    Le cas des bibliothèques publiques est beaucoup plus complexe de par la multiplicité des collectivités territoriales qui ont bien évidemment des politiques différentes en matière de lecture, du fait également qu'un CFCB n'est la plupart du temps pas l'interlocuteur direct de la collectivité puisque la formation continue des personnels territoriaux relève statutairement du CNFPT.

    Théoriquement, les collectivités territoriales doivent effectuer des plans de formation continue et les transmettre au CNFPT. Dans la réalité, peu de collectivités réalisent de plan et lors-qu'elles en bâtissent, la bibliothèque n'est pas toujours prise en compte.

    Construire un plan de formation

    Face à cette situation, comment peut se construire l'offre d'un CFCB tel que Médiaquitaine pour les bibliothèques territoriales ?

    Une réunion annuelle rassemblant des représentants du CNFPT, de la DRAC et du centre de formation permet de concilier les besoins d'accompagnements de la politique de la DRAC et les besoins des établissements que le CNFPT a pu recueillir de façon empirique. Cela aboutit à un programme annuel de stages que le CFCB peut réaliser. Cela ne constitue cependant pas un recensement satisfaisant des besoins des établissements. Il a donc été organisé, sous l'égide de la DRAC et en présence du CNFPT, des rencontres entre Médiaquitaine et les directeurs des bibliothèques départementales de Prêt et des bibliothèques municipales des villes de plus de 10 000 habitants. Ces réunions ont permis d'expliquer le dispositif de formation continue mais aussi d'appréhender les difficultés rencontrées par les directeurs d'établissement en matière de formation continue et surtout, ont été pour Médiaquitaine l'occasion de sensibiliser les directeurs à l'intérêt qu'il y a à réaliser un plan de formation continue.

    En ce qui concerne les besoins des agents, le recensement peut être effectué au moyen d'un questionnaire envoyé par le CFCB à tous les personnels des bibliothèques de son secteur. Cela permet de dégager des grandes tendances. Mais ce type de questionnaire, qui s'adresse à tous, ne s'adapte pas toujours très bien aux besoins de chacun. De plus, comme il s'adresse directement aux agents, il ne permet pas de recueillir l'avis des chefs de service et donc de vérifier la pertinence des souhaits des personnels par rapport à la politique de développement de l'établissement. L'idéal pour le CFCB reste donc l'existence d'un plan de formation.

    Formations en BU

    Pour permettre aux SCD de réaliser des plans de formation et aussi d'en assurer le suivi, la sous-direction des bibliothèques du ministère de l'Éducation nationale a mis en place en 1994 un dispositif afin d'encourager les SCD à s'inscrire dans cette démarche. Il fait d'ailleurs actuellement l'objet d'un diagnostic, une étude sur le réseau de la formation continue des personnels des bibliothèques universitaires ayant été commanditée à une société de conseils par le ministère de l'Éducation nationale. Ce dispositif s'articule à l'heure actuelle de la façon suivante : un service de la sous-direction des bibliothèques du ministère de l'Éducation nationale, le bureau de la formation, de l'édition et des systèmes d'information, s'occupe de la formation continue des personnels des bibliothèques d'État en liaison avec l'ENSSIB (École nationale supérieure des Sciences de l'Information et des Bibliothèques), les CFCB et bien entendu les bibliothèques dont les directeurs doivent désigner un correspondant formation. Ces correspondants formation sont responsables de la gestion de la formation continue au sein de l'établissement. Ils sont en particulier chargés de rédiger, avec le directeur, le plan de formation. Ils doivent donc recenser les besoins des agents et ceux de l'établissement. Ils sont ensuite chargés de l'exécution du plan (suivi des départs en formation, conseils aux agents...), ainsi que de son évaluation.

    En 1999, Médiaquitaine a proposé aux correspondants formation des SCD d'Aquitaine et à leurs directeurs de leur apporter un soutien méthodologique dans l'élaboration de leurs plans.

    Différentes étapes ont été nécessaires afin d'aboutir à la réalisation d'un plan par service. Tout d'abord, l'évaluation des besoins des personnels mais aussi des établissements a été entreprise.

    Dans un premier temps, une réunion dans chaque SCD avec le directeur et, parfois, l'ensemble de l'équipe de direction, le correspondant formation et Médiaquitaine, a permis de mettre au point la méthode de travail, le calendrier prévisionnel et de rappeler les axes prioritaires du SCD définis dans le contrat quadriennal. Dans l'idéal même, si ce n'est pas toujours facile à organiser, il conviendrait également d'associer des représentants des personnels à l'élaboration du plan.

    Pour recenser les besoins des personnels, plusieurs possibilités existent :

    • Il la réalisation d'entretiens individuels, soit par les directeurs au moment de la notation des agents, soit par les correspondants formation dans une relation de conseil et d'orientation ;
    • M l'établissement d'un questionnaire à remplir directement par chaque agent.

    C'est cette dernière solution qui a été retenue, pour des raisons pratiques (en particulier de calendrier).

    Une ébauche de questionnaire a été réalisée par Médiaquitaine. Cette proposition a été soumise aux différents partenaires. Lors de plusieurs échanges, ce questionnaire a été complété afin d'en combler les lacunes et de répondre ainsi aux besoins des services. Il a ensuite été validé par les directeurs avant diffusion.

    Il comportait plusieurs parties :

    • H identification du service (BU, BUFR...) et de l'agent (nom, âge, grade, niveau d'étude, dernière formation continue suivie...). Les agents pouvaient, s'ils le désiraient, garder l'anonymat. Ceci peut sembler paradoxal mais a contribué à rassurer certains personnels. Les autres parties concernaient directement les besoins en formation ;
    • B la plus importante portait sur les techniques des bibliothèques (avec différentes sous-parties : documents, publics, informatique...) ;
    • B une autre sur la culture générale (en relation avec le travail en bibliothèque) ;
    • B la dernière, liée directement à la promotion des personnels, concernait la préparation d'examens ou de concours.

    Une fois ce questionnaire établi, ses modalités de diffusion ont été définies. Il a été généralement décidé d'associer tous les types de personnel (titulaires et contractuels de l'établissement principal mais également de l'ensemble du SCD). La question se posait essentiellement du bien fondé d'enquêter auprès des agents non titulaires qui sont généralement en poste de façon provisoire, mais il a été admis que leurs besoins étaient à prendre en compte.

    Pour la diffusion du questionnaire, une réunion, regroupant l'ensemble du personnel, a été organisée dans les établissements. Cette réunion, menée, dans la majorité des cas, par le directeur de l'établissement, le correspondant formation et Médiaquitaine. avait pour but d'expliquer l'objectif du questionnaire, c'est-à-dire le recensement des besoins et l'élaboration d'un plan de formation. Les projets de l'établissement pour les années à venir étaient présentés par le directeur afin que les agents situent le contexte dans lequel allait se dérouler le plan de formation. Le questionnaire était également commenté.

    Ensuite, le dépouillement de l'enquête a été effectué. Dans un premier temps, il en a été retiré des données globales qui ont été croisées et présentées sous forme de tableaux. Ceci a abouti à un document de travail qui a permis d'analyser les besoins que l'enquête avait fait ressortir. En effet, l'expression de certains besoins peut avoir plusieurs sens. Ainsi, une personne qui souhaite suivre des formations correspondant non pas à ses fonctions mais à celles du grade supérieur exprime peut-être aussi l'envie de préparer un concours interne.

    Après ce stade de recensement et d'analyse des besoins, nous avons abordé l'établissement du plan à proprement parler.

    Dans un premier temps, à partir des souhaits exprimés par les agents et des besoins de la direction, des thèmes de formation ont été retenus en fonction des priorités des établissements. Puis, il a été établi des fiches de stage précisant le thème, le contenu, la durée, l'organisme de formation concerné, le nombre de personnes à former et leur catégorie. Ces propositions de formation ont été classées par grandes rubriques et réparties sur la durée du plan qui avait été fixée à trois ans. Les plans finalisés comportaient une partie de présentation du service et de ses projets, ainsi que des propositions de formation.

    Ces plans ont le mérite de servir de base de travail pour la programmation des formations. En effet, en début de chaque année universitaire, une réunion regroupe les directeurs de SCD, les correspondants formation et Médiaquitaine afin d'établir le programme détaillé des formations qui seront confiées au CFCB l'année suivante. Les formations prévues dans le plan sont étudiées et programmées de façon précise. Cette mise à jour est effectuée chaque année pour intégrer des besoins non prévus initialement et procéder à d'éventuels réajustements de calendrier.

    Élargir le champ d'action

    Cette expérience avec les SCD a été très positive pour Médiaquitaine. Il a donc semblé opportun au CFCB de proposer aussi aux collectivités territoriales intéressées d'accompagner leurs bibliothèques dans ce type de démarche. Inciter à l'élaboration de plan de formation semble en effet primordial.

    Cependant, il convient de laisser la possibilité au CFCB de se positionner aussi comme une force de proposition en matière de formation.

    Certes, une offre catalogue qui ne se baserait pas sur une réelle analyse des besoins n'est plus à l'ordre du jour, mais il n'en demeure pas moins qu'un CFCB se doit d'être attentif à tout changement qui intervient dans le domaine des bibliothèques. Il a tout intérêt à exercer une veille en matière de formation afin d'être en mesure d'accompagner, voire même d'anticiper tout changement. Cela amène parfois le centre de formation à proposer des formations pour lesquelles un besoin n'est pas encore apparu et qui ne figurent donc dans aucun plan de formation. C'est ainsi, par exemple, que Médiaquitaine a organisé, en collaboration avec rURFIST de Bordeaux, des journées d'études sur les livres électroniques qui ont rassemblé un grand nombre de participants qui n'avaient nullement fait part, du moins de façon explicite, de besoins de formation dans ce domaine.

    En conclusion, on notera que le recensement des besoins demeure un exercice difficile pour les CFCB qui doivent concilier les intérêts de partenaires et d'un public très variés. Les plans de formation, sans être exclusifs d'autres démarches, semblent bien être un outil essentiel pour bâtir l'offre du centre.