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    Une organisation pour un bâtiment

    Par Catherine Krebs, Bibliothèque universitaire de Haute-Alsace

    Dès l'annonce d'un projet de D construction, avaient été mis D en place quelques dispositifs qui devaient permettre une réunion harmonieuse, dans un même bâtiment, des deux sections Lettres et Sciences, scindées depuis leur origine soit approximativement depuis un quart de siècle. Mais en dehors de ces mesures (travail sur les numéros d'inventaire, coordination de certaines acquisitions...), restait à mener une véritable réflexion et à trouver les meilleures solutions possibles.

    Ne faire qu'une bibliothèque avec ce qui concrètement en constituait deux posait un certain nombre de problèmes d'organisation, insoupçonnés au départ de l'

    M Quelques données du problème

    Le plan du bâtiment et la dimension somme toute modeste de la bibliothèque nous obligeaient à dépasser l'idée de la simple juxtaposition des deux fonds et à raisonner en terme de fusion. En corollaire il ne pouvait être question de faire cohabiter deux équipes travaillant pour deux sections. C'est une équipe unique qu'il fallait constituer : moment rêvé pour redistribuer les tâches, redéfinir certaines fonctions et optimiser les actions.

    Cette grande option étant posée, restait à la mettre en oeuvre dans un bâtiment dont les contraintes se révélaient importantes, au fil d'une lecture plus pointue du plan et des visites de chantier.

    De ces contraintes, je n'évoquerai que les plus remarquables : ainsi, l'abandon du magasin clos pour favoriser l'accès direct aux collections, le renoncement à un bureau pour bibliothécaires adjoints et magasiniers au profit de locaux à vocation purement fonctionnelle (manu-tention-catalogage, recherche documentaire informatisée), locaux malgré tout bien exigus. Il fallait prévoir des adaptations.

    L'avant-projet sommaire présentait ce bâtiment comme une "coque vide", afin d'être plus modulable, malheureusement, une fois construit, les surfaces ne permettaient pas les cloisonnements que l'on pouvait souhaiter pour modifier certaines données.

    Le sort des hommes et des documents : des débats pas toujours clos...

    Les problèmes fonctionnels se sont d'emblée posés en terme d'espace : où allait-t-on inventorier ? Où cataloguer (4 postes) ? Où équiper et réparer les ouvrages ? Où se connecter en ligne ? Comment "partager" les locaux disponibles entre les diverses activités dites techniques ? Lesquelles pourraient être compatibles avec les permanences du service public?...

    "Outil" prévu pour le public - selon sa vocation il est vrai - le bâtiment avait été conçu dans une certaine méconnaissance des tâches bibliothéconomiques. Mais il n'était plus temps d'épiloguer sur ce point.

    Pendant que le plan intérieur du bâtiment connaissait encore des modifications pour prendre en compte les besoins exprimés (en 1990, 4 ans s'étaient écoulés depuis l'approbation de l'APS), une organisation virtuelle se mettait en place. A l'issue d'une négociation ouverte mais néanmoins âpre, et dans le cadre d'une réflexion planifiée, chaque équipe investissait théoriquement la part des locaux qui lui était dévolue.

    Quoique teintée de désenchantement, cette étape a eu le mérite d'instaurer des échanges suivis et motivés entre les personnels des deux sections. Conséquence fortuite et qui, dans un premier temps, est apparue comme une opportunité : l'identité de chaque "corps de métier" s'est renforcée dans le cadre de ces débats. Ce fut l'occasion toute naturelle de mettre à plat les attributions des uns et des autres et d'en redistribuer certaines en tentant de rééquilibrer les charges.

    M Polyvalence

    Dans une petite équipe, la polyvalence est de mise, inévitable, nécessaire mais aussi quelquefois source de dispersion. Dans l'équipe agrandie le choix s'est orienté vers un recentrage des fonctions de chacun conformément à son statut et, ce faisant, vers une meilleure efficacité dans le cadre de ses compétences respectives.

    Il a été décidé que les tâches et notamment celles des BA se répartiraient sans distinguer l'appartenance à l'une ou l'autre section. Nous avons voulu en profiter pour les diversifier et favoriser une connaissance plus entière de la bibliothèque par chacun. Un tel aura la charge du prêt inter sciences et du suivi des commandes lettres, tel autre sera responsable de la gestion des commandes scientifiques et cataloguera plus particulièrement le fonds littéraire, etc... Nous avions espéré, et cela s'avère vrai, qu'un tel choix renforcerait le sentiment d'équipe unique, une équipe qui a tout de même changé de taille du jour au lendemain et non pas à l'issue d'une croissance progressive normale.

    Ø Et les chefs de section ?

    Cela avait-il encore un sens que chaque section continue à être dirigée par un conservateur "attitré" quand toutes deux étaient si étroitement mêlées ? L'alternative résidait bien sûr dans le maintien de la situation antérieure ou dans une redéfinition des fonctions, complètement transversale. Le contexte rendait la première option indéfendable mais c'est une solution médiane qui a cependant été arrêtée. En effet, appliquer le second cas de figure de manière absolue risquait de cantonner, ou presque, un conservateur dans les seules tâches de gestion matérielle et administrative et de réserver au second tout l'aspect documentaire ; partager les choses sur ce dernier point paraissait artificiel.

    Or il nous a paru essentiel que les enseignants-chercheurs, le public dans sa totalité mais aussi les membres du personnel pour tout ce qui a trait aux collections, aient encore un interlocuteur clairement identifié, possédant une maîtrise privilégiée du fonds concerné.

    Au-delà de la responsabilité des collections de chacune des sections, les deux conservateurs se partagent désormais des attributions "transversales" (gestion du personnel, suivi comptable, animation, enseignement-formation, suivi des bibliothèques d'UFR).

    M Un fonds, deux fonds ?

    Il a fallu raisonner en terme de fonds unique à scinder entre un magasin ouvert au public et des rayonnages en salle de lecture, bref : "bricoler".

    La séparation des fonds s'est faite sur la base de l'importance des prêts dans les divers domaines ainsi que sur celle des formations concernées par les collections au sein de l'université en tentant de respecter de surcroît une parité entre les enseignements de littérature et de sciences humaines et ceux de sciences exactes et appliquées.

    Le résultat consiste en un savant mélange dans les deux salles. Ce qui peut paraître curieux à première vue n'a pourtant guère provoqué d'étonnement chez nos utilisateurs qui se sont très facilement accommodés de ces choix, d'autant plus qu'en tous lieux une trame commune leur rappelle l'unicité de nos collections. Car nous avons, en effet, tenu à fusionner réellement sur les rayons les parts de nos fonds qui le permettaient, quitte le cas échéant à procéder à une recotation générale. Nous avons ainsi créé un gros rayon "usuels" commun, toutes disciplines confondues. De même, nous avons regroupé en "salle des chercheurs" l'ensemble des bibliographies et ouvrages de référence du niveau recherche. Les périodiques enfin ont fait l'objet du même traitement tant en salle de lecture où l'on trouve les quotidiens et hebdomadaires d'actualité et quelques titres les plus généraux, qu'en salle de recherche où sont présentés les titres plus spécialisés.

    Un bâtiment unique et des salles ne pouvant qu'être communes aux deux sections, tel était le pari qui, avec du recul, nous paraît plus osé que nous ne l'avions imaginé ! Nous avons joué le jeu d'une fusion absolue des fonds. A certains égards le choix pouvait paraître bâtard pour l'utilisateur mais il faut reconnaître que la gestion en est aisée et que les lecteurs s'y retrouvent très bien.

    La signalisation : un enjeu stratégique

    Le point d'orgue de cette organisation était, bien entendu, une signalisation qui clarifie au mieux la situation. C'est volontairement que nous avons attendu les 6 premiers mois d'usage effectif de nos locaux pour choisir notre signalétique qui a été la toute dernière réalisation de notre aménagement intérieur et pas la moins réussie parce que mûrie à l'épreuve de notre quotidien et choisie à l'aune de nos particularités telles qu'elles ont été acceptées par notre public.

    L'expérience relatée ici n'est pas encore parvenue à son terme. Deux années après l'installation dans notre nouvelle bibliothèque nous allons encore, en vue d'un meilleur mariage de nos deux sections, définir des pratiques communes pour le prêt entre bibliothèques, les procédures de commande, la présentation des listes d'acquisition et des listes des périodiques. Ce sont là également les prémices d'une réflexion à l'informatisation proche, étape qui consacrera définitivement notre fusion.

    Compte tenu des possibilités du bâtiment et de nos perspectives de développement, il est déjà question d'extension... voire d'une autre construction. Peut-être nous faudra-t-il alors réfléchir à une "défusion" ?