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    "Opérations-mobilier" dans les Yvelines

    Par Aline Antoine, Conservateur en Chef BDP des Yvelines

    C'est dans le Département des Yvelines, qu'est née, à la fin des années 70, l'idée de prêter du mobilier de bibliothèque, au même titre que des livres, afin que ces derniers soient mieux accueillis dans des petites communes-souvent peu ou pas équipées en bibliothèque.

    En 1978 : la bibliothèque centrale de prêt s'interroge sur sa desserte : comment toucher un public plus varié et développer les petites bibliothèques municipales ?

    En effet l'analyse des systèmes de prêt laissait apparaître des insuffisances flagrantes et montrait que tout une frange du public ne profitait pas des livres de la bibliothèque centrale de prêt. Les communes qui bénéficiaient du prêt direct étaient pour la plupart des commîmes dortoirs, les emprunts de livres étaient faits par des enfants ou des personnes âgées. Le prêt par dépôt qui s'effectuait, pour plus des trois quarts, dans des établissements scolaires ne déservait pas non plus la population adulte active.

    Mais dès cette époque, le réseau des bibliothèques municipales commençait à se renforcer et quelques communes, ne se satisfaisant plus d'une armoire dans un coin de la mairie ou de l'école, envisageaient la création d'une bibliothèque.

    Mme Blanchard, directrice de la bibliothèque centrale de prêt constatait qu'il existait un terrain favorable à la création de petites bibliothèques dans certaines communes et où étaient réunis les gages de la réussite : des bénévoles très convaincues, des locaux et une équipe municipale ouverte à une action de lecture publique dans la commune.

    Un coup de pouce

    Mais il manquait le coup de pouce qui allait conduire à la réalisation.

    C'est ainsi qu'est née l'idée de "prêt mobilier" qui dure jusqu'à maintenant, sous une forme un peu différente.

    Suite à une demande de la BCP, le Département des Yvelines en 1978 aloue une subvention de 50 000 F à la Société des Amis de la BCP. Cette somme permet d'acheter de quoi meubler, soit une bibliothèque de 100 m2 environ, soit 2 petites, soit de compléter du mobilier existant. Les conditions d'achat du mobilier sont très avantageuses, le constructeur, voyant là une occasion promotionnelle importante, consent des rabais appréciables.

    Le mobilier est prêté pour deux ans. Plusieurs communes voient ainsi leurs projets bibliothèque se concrétiser et se rendent compte qu'en ayant l'outil en main, elles ne peuvent plus s'en passer. Cette opération a permis de faire tomber bien des réticences d'élus. En effet, on pouvait aller voir des petites bibliothèques en fonctionnement et comprendre que l'opération était viable.

    Certaines conditions étaient nécessaires pour bénéficier de ce prêt et les premières opérations se sont faites avec des communes déjà bien engagées dans un processus "bibliothèque". Elles devaient garantir, la création d'une bibliothèque ouverte à tous, au moins 10 heures par semaine, voter un crédit de fonctionnement pour la bibliothèque et accepter l'aide et les conseils de la BCP. Un mobilier simple et démontable a été choisi, pouvant s'adapter à des plans variés (2 bureaux de prêt, des étagères, des tables et des chaises des bacs à albums).

    Quand le mobilier devait être rendu, la commune préférait souvent le garder et en racheter pour la BCP, évitant ainsi des déménagements délicats. Les premières bibliothèques lancées par ce procédé se retrouvent actuellement parmi les bibliothèques les plus dynamiques du département.

    Ø Une opération nationale

    En 1983, la Direction du livre, séduite par cette démarche, la propose à l'ensemble des BCP et des crédits supplémentaires sont votés, avec, dans chaque département la possibilité d'acheter pour la valeur de 150 000 F de mobilier pour les petites bibliothèques rurales.

    Ce mobilier, qui reste propriété de l'Etat est mis à la disposition des communes avec des garanties assurant la pérennité de la bibliothèque : surface des locaux, heures d'ouverture. Il est conseillé aux BCP de s'adresser en priorité aux communes de moins de 3000 habitants.

    Parallèlement à ces sommes réservées aux mobiliers (13 MF), l'Etat prévoit 7 MF pour l'achat d'usuels et de livres de références, afin d'en faire profiter les bibliothèques nouvellement meublées.

    Nombreuses ont été les bibliothèques centrales de prêt qui ont bénéficié de ces "opérations mobilier" pour leurs bibliothèques rurales.

    Ce soutien de l'Etat s'est renouvelé les années suivantes et dans le cas des Yvelines, il a été complété par des crédits du Département. En 1984 une convention culturelle entre le Département des Yvelines et l'Etat a été signée qui inscrivait cette action dans son protocole.

    Décentralisation

    Depuis 1986 le Conseil Général vote une enveloppe de 300 000 F chaque année pour le mobilier des bibliothèques des communes de moins de 2500 habitants, ce qui permet de meubler environ 4 à 6 bibliothèques. En complément à ces créations de bibliothèques dans les petites communes, le Centre National de Lettres soutient l'achat d'usuels qui viennent garnir le coin de lecture de ces bibliothèques très fréquentées par les collégiens du village. La BCP prête un fonds de livres important (1 500) afin que la bibliothèque puisse être immédiatement opérationnelle. En effet certaines d'entre elles, commencent sans livres et le financement de la commune ne permet pas un accroissement rapide, d'autres sont encombrées de fonds vieillots et inutilisables.

    Pour en revenir au mobilier, les principes d'attribution de cette aide restent les mêmes, c'est-à-dire : surface adaptée à la taille de la commune, locaux en état, participation financière de la commune, et surtout formation du personnel bénévole.

    La Bibliothèque Départementale a donc mis sur pied une formation d'auxiliaire de bibliothèque (diplôme de l'Association des Bibliothécaires Français) qui est ouverte à tous les personnels des bibliothèques du Département, mais en priorité, aux bénévoles qui créent une bibliothèque. Sans formation, pas de mobilier, les élus le savent et n'hésitent pas à payer les formations des responsables de leurs petites bibliothèques.

    Voici 8 ans que cette formation existe et l'on peut actuellement dénombrer environ une centaine de bénévoles formées sur les 500 que compte le réseau de la Bibliothèque Départementale. Presque toutes animent des bibliothèques où le mobilier a été mis à disposition (49 bibliothèques). Il est indéniable que la formation est l'axe prioritaire de ces "opérations mobilier" et c'est par elle que peut être assuré l'avenir de la bibliothèque. Il est nécessaire que plusieurs personnes soient formées sur les sites et que cette formation soit renouvelée lors d'un changement de l'équipe bénévole.

    Certaines communes, suite au développement de leurs bibliothèques ont crée des postes de salariées, on en compte 38 dans notre réseau.

    Dans les Yvelines, ces "opérations mobilier", comme dans d'autres départements, sont soutenues par un régime de subventions départementales à l'investissement. En effet les communes peuvent se faire aider pour la création ou l'aménagement des locaux à hauteur de 40% de la dépense hors taxe. Cette aide est également attribuée aux communes plus importantes qui ne bénéficient pas de l'opération mobilier réservée qui reste aux communes de moins de 2 500 habitants.

    Il reste certes dans notre département des communes qui pourraient bénéficier "d'opérations mobilier", il y a encore parfois des livres dans des placards, avec des prêts parcimonieux et confidentiels. Il y a aussi les toutes petites communes à qui l'on suggère, quand il y a une "envie bibliothèque", de penser à se regrouper avec des communes voisines et des projets commencent à se faire jour incités par cette loi sur l'intercommunali-té de février 1992.

    Ces "opérations mobilier" ont permis d'harmoniser les réseaux de lecture publique en créant des points d'ancrages de qualité, dans la plupart des petites communes.