Les bibliothécaires le savent d'expérience : la bibliothèque personnelle d'un érudit, d'un chercheur scientifique, d'un enseignant et même d'un membre d'une congrégation religieuse - comme c'est le cas ici - est toujours révélatrice. Lucien Febvre l'a déjà dit dans un de ses articles (1) : l'inventaire post-mortem de ces collections constitue un document fascinant. On y entre en quelque sorte sur la pointe des pieds dans une demeure du passé, on y effleure une vie quotidienne qu'on croyait à jamais effacée. Il ne faut cependant pas s'y tromper : les livres n'existaient pas chez les pauvres, alors qu'ils pouvaient au contraire se trouver en grand nombre chez les puissants et chez ceux qui savaient lire, hommes de loi, médecins, membres des universités, ecclésiastiques.
Ainsi grâce aux deux volumes du catalogue-inventaire de la bibliothèque (2) Leonardo Ximenes, nous pouvons savoir quels furent les intérêts (voire les passions) et la culture scientifique d'un Italien du XVIIe siècle, placé il est vrai dans une position privilégiée ; L. Ximenes fut en effet le "géographe impérial » et le « mathématicien » officiel d'un grand (le comte de Richecourt) en plus d'être astronome et ingénieur hydraulicien ! Les ouvrages recensés dans les deux abondants tomes publiés grâce à la Région Toscane reflètent aussi la conscience professionnelle de leur possesseur et laissent encore transparaître le poids de la censure religieuses (3) .
Les trois index qui complètent cet inventaire sont à la fois bien utiles et révélateurs : index chronologique, index des titres, index par langue. On y voit la place alors prépondérante prise par les auteurs savants de chez nous : en dehors des livres écrits en italien et naturellement en latin, sont recensés 508 ouvrages imprimés en français, 71 en anglais, 18 en allemand. Une autre époque.