Index des revues

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    Par Marc Chauveinc, Inspecteur général
    Ed Krol
    Pierre Cubaud, trad
    Jacques Guidon. -, trad

    Le monde Internet

    Guide et ressources

    Paris : Éditions O'Reilly International Thomson. - 2eéd. 1995. 543 p. ISBN : 2-84177-000-1.

    Les publications sur Internet se multiplient en France, correspondant au développement du réseau et à la croissance des connexions. Parmi les dernières, citons l'ouvrage d'Olivier Andrieu chez Eyrolles, celui de Hahn et Stout, de John Levine et Carol Baroudi chez Sybex, de Jean-Bernard Condat et Ni-colas Pioch chez JCI, de Mark Butler chez Dunod, et celui de Engst diffusé par Eyrolles. On peut citer aussi les articles d'Alexandre Bezsonoff dans le BBFno 6 de 1994, d'Elisabeth Cherchai dans le BBF n° 4 de 1993, de Pierre Barthélémy dans Micro-Bulletin n° 47 de 1992/1993, etc. Ces articles ont dû familiariser les bibliothécaires avec Internet.

    La première édition de l'ouvrage de Ed Krol, datant de 1992, a dû être refondue pour satisfaire une nouvelle génération d'utilisateurs non spécialistes de l'informatique et non familiarisés avec ce nouveau réseau. Il fallait les aider à pénétrer ce monde si riche et si complexe qu'un néophyte ne peut aborder sans une préparation minimale. De plus, les traducteurs ont adapté le texte américain au lecteur français, non seulement en donnant les équivalents français des termes américains mais en ajoutant les serveurs français raccordés à Internet. Le livre répond avec clarté à toutes les questions que l'on peut se poser sur le réseau : Qui le dirige ? Qui paye ? Qui le compose ? Quel est son avenir ? Comment fonctionne-t-il ? Toutes interrogations qui assaillent un débutant cherchant à comprendre les raisons du succès de cette entreprise et surtout ce qu'Internet peut lui apporter.

    Il ne paraît pas nécessaire, dans ce compte rendu, de reprendre l'histoire et la description d'Internet telles qu'elles apparaissent dans le livre d'Ed Krol et dans les publications mentionnées ci-dessus car elles commencent à être connues des lecteurs, mais il est important de montrer ce que ce livre apporte de nouveau.

    Ses principales qualités sont la richesse et le détail des explications qu'il fournit sur chaque point étudié. L'auteur a, en effet, été le responsable du premier réseau NFSnet créé par le « National Center for Super Computer Applications et connaît donc bien celui-ci. Il décrit avec précision l'origine d'Internet à partir d'ARPANET (armée américaine), de NSFnet (universités américaines) et de l'utilisation du protocole IP (Internet protocol) fourni par UNIX. Ce protocole a, pour le moment, court-circuité la norme « Open System Interconnexion de l'ISO. Il explique aussi la notion de » réseau de réseaux » qui caractérise Internet puisque sa substance (c'est-à-dire les fichiers) est localisée dans plus de 3 500 000 ordinateurs reliés par 36 000 sous-réseaux.

    Il décrit l'aspect juridique de la cohabitation entre les réseaux universitaires et les réseaux commerciaux, en précisant que les premiers, financés par les États, sont réservés aux organismes publics de recherche et que les autres, plus chers, sont attribués aux organismes commerciaux. Les sociétés françaises FDN, Eunet, Oléane, France Télécom sont considérées comme des fournisseurs commerciaux. RENATER comme un réseau de recherche. Le réseau de réseaux étant, comme on le sait, d'origine universitaire, c'est-à-dire convivial et gratuit, cherche donc à se protéger contre deux menaces qui le guettent : des usages non conformes aux objectifs (jeux, pornographie, racisme, sabotage) et la publicité envahissante. Ed Krol précise aussi qu'Internet n'est pas gratuit, mais payé par les organismes d'État afin de faciliter la recherche, sauf pour les organismes commerciaux et que les ordinateurs ne sont pas toujours librement accessibles. Certains exigent un mot de passe et donc un compte payant au nom de l'utilisateur. De plus, le financement public tend à disparaître.

    L'organisation laisse pantois un Français moyen mais peut se comparer, selon l'auteur, à une Église : pas de directeur, mais un conseil des sages (IAB ou Internet architecture board), un organe d'orientation (Internet society) composé de volontaires et un groupement d'utilisateurs (IETF ou Internet engineering task force) qui discute des problèmes techniques. Pour attribuer un nom à un ordinateur, Internet utilise le système des noms de domaines qui précise le pays, le secteur d'activité (éducation, commercial, gouvernement, militaire), l'organisme (université) et le nom de la machine raccordée. Par exemple : president@whitehouse.gov ».

    Parmi les détails intéressants, il est fait mention, par exemple, dans l'Annexe A, Se connecter à l'Internet », des connexions potentielles par la société ou l'université dont on fait partie, puis des différents niveaux de services auxquels on peut accéder (messagerie, recherche, bulletins). Sont ensuite indiqués les différents accès possibles : accès Internet dédié, SLIP et PP pour des accès presque dédiés par ligne téléphonique, RNIS pour une ligne téléphonique numérique dédiée, réseau téléphonique commuté non dédié, accès UUCP pour ceux qui travaillent sous UNIX, accès par d'autres réseaux comme Compuserve, par des points d'accès locaux (en France Eunet, FranceNet, Calvacom, Oléane, Transpac, RENATER, etc.). Les possibilités françaises d'accès sont décrites dans un serveur du CNAM dont la commande est: www http ://www.cnam.fr/-Network/Internet-access ».

    L'auteur donne ensuite une liste partielle des fournisseurs d'Internet dans tous les pays d'Europe et d'Amérique. Il faut aussi rappeler que les grands logiciels utilisés dans Internet sont localisés sur des serveurs qu'il faut connaître, car vous ne pouvez accéder à un fichier qui n'a pas d'abord installé ce logiciel. Par exemple, Archie et Gopher sont localisés en France à l'université de Rennes et la commande sera donc soit: archie.univrennesl. fr soit «gopher.univ-rennesl.fr». On peut aussi utiliser les serveurs français ftp ftp.urec.fr ou « ftp ftp.inria.fr;login anonymous;cd network pour récupérer ces logiciels gratuits sur sa propre machine.

    L'ouvrage fournit aussi un catalogue des principales ressources, c'est-à-dire des fichiers accessibles par Internet, classées par sujet (agriculture, animaux, cinéma, droit, éducation, voyages, etc.). Or, on sait qu'un des problèmes d'Internet est la richesse et la diversité des ressources disponibles et qu'on l'a souvent comparé à une bibliothèque sans catalogue. Comme dit l'auteur: « Le problème est donc d'être au courant de ce qui existe. » Il a les outils classiques d'Internet qui permettent de localiser une ressource, comme Archie, Gopher, WAIS, WWW, et il y a aussi le service InterNIC qui fournit un répertoire des participants à Internet et le « Global Network Na-vigator qui permet d'explorer le réseau. Mais l'ouvrage apporte une liste des principales ressources classées par sujet et donne la commande pour y accéder. Par exemple, vous avez l'ensemble des textes littéraires français numérisés par l'Association des bibliophiles universels sur le serveur du CNAM (accès : ftp ftp.cnam.fr;login anonymous;cd pub/ABU) ou les textes littéraires anglo-saxons du projet Gutenberg (accès : ftp ftp.cnam.fr;login anonymous;cd pub/Gutenberg).

    Ceci étant, l'ouvrage de Krol décrit en détail les logiciels principaux qui font la force d'Internet : TELNET (connexion à un ordinateur éloigné pour, par exemple, consulter le catalogue d'une bibliothèque comme si vous y étiez, c'est-à-dire avec ses propres commandes), FTP (ou transfert de fichiers), le courrier électronique avec Mail, Mime et les listes de diffusion Listserv, les News d'USENET (forums internationaux sur un sujet donné), Archie (recherche de fichiers par consultation d'un index des noms de fichiers ou des sujets), Gopher (accès à des fichiers par menus) complété par Véronica, WAIS (recherche de documents par mots clés dans les catalogues de bibliothèques), World Wide Web ou WWW (recherche d'information par hyper-texte, c'est-à-dire en suivant des liens établis entre les mots appartenant à des fichiers différents) complété par Mosaic. Pour chaque service, l'ouvrage donne les procédures de connexion, les limitations et les principales commandes selon les machines utilisées, ce qui est une manière concrète et pratique d'apprendre. Les exemples de connexion et de dialogue sont nombreux et vous permettent de travailler directement sur un terminal avec le livre à côté pour se guider.

    On peut signaler cependant quelques petites maladresses de traduction, bien compréhensibles quand on est immergé dans ce monde très anglo-américain. On dit plutôt sauvegarder sur un ordinateur que sauver (p. 9), une archive de fichiers n'est pas très utilisée en français pour désigner une série de fichiers stockés dans un ordinateur donné, on dirait plutôt une base de données, mais il est vrai que c'est le terme américain (p. 6). Faut-il dire se loger pour l'anglais log in (p. 8) ? Certaines phrases peuvent aussi choquer les puristes, comme : « il faut en connaître un rayon en informatique pour arriver à ça Mais ceci est bien véniel par rapport à la richesse de l'ouvrage et aux détails donnés par un auteur qui connaît manifestement le réseau de l'intérieur et a testé toutes les procédures qu'il conseille.

    Le livre d'Ed Krol me paraît donc indispensable pour tous ceux qui veulent, concrètement, se connecter à Internet.