Index des revues

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    Par Laurence Tarin
    Jean-Pierre Augustin, dir
    Daniel Latouche, dir

    Lieux culturels et contextes de villes

    Bordeaux, Maison des sciences de l'homme d'Aquitaine, 1998. - 212 p. 140F.

    Cet ouvrage collectif est le résultat d'études menées par les centres de recherche associés à la Maison des sciences de l'homme d'Aquitaine (MSHA) et par des chercheurs de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS) de Montréal (Canada). Il est consacré à la place de la culture dans les différentes villes occidentales et pose différentes questions sur l'organisation urbaine, la fonction des équipements et le rôle des espaces publics.

    Il s'articule en trois parties. La première, intitulée « Les sites locaux, les réalités locales et les recherches », s'ouvre sur la communication de Claude Sorbets (Institut d'études politiques de Bordeaux), qui s'interroge sur les effets que peut avoir la position du chercheur (ancrage dans le milieu local, relations avec les praticiens, etc.) sur les résultats de sa recherche. L'intervention de Jean-Claude Callède (MSHA) qui lui fait suite s'appuie sur un ensemble d'études concernant les politiques culturelles de plusieurs villes moyennes d'Aquitaine. Elle met en évidence quelques caractéristiques majeures du développement culturel et permet de comprendre la diversité des pratiques. Pour clore cette première partie, un court mais très intéressant article de Xan Bouzada (université de Vigo, Espagne) analyse la distance sociale et symbolique des publics par rapport aux équipements culturels et apporte des éléments d'explication aux échecs de certaines tentatives de démocratisation culturelle.

    La deuxième partie, « Territoires d'expériences et pistes d'analyse », souligne le retour du territoire en tant que support des nouvelles cultures urbaines. Tout d'abord, Michel Favory (IEP de Bordeaux), à partir de l'exemple du spectacle vivant dans le département de la Gironde, analyse le développement culturel local sur un territoire donné en insistant sur les stratégies des différents acteurs locaux (collectivités locales, associations, etc.) qui oscillent entre concurrence, autonomie et collaboration. Il s'attache en particulier à montrer l'importance pour les élus de l'aménagement culturel du territoire, préoccupation qui se concrétise le plus souvent par la création d'équipements. Quant à Thierry Berthet (IEP de Bordeaux), il s'interroge sur le rôle de la culture dans les politiques sociales. Il explique comment le social s'est introduit dans le champ culturel et, à travers l'exemple des actions développées par les missions locales, il souligne le rôle de la culture dans l'insertion sociale. Hélène Laperrière (INRS Montréal) considère, elle, que le paysage culturel des villes est un bon indicateur des changements des sociétés urbaines. Elle identifie dans son article trois périodes dans l'histoire culturelle récente de Montréal :

    • l'âge de la légitimation (1879-1963), où de grands équipements prestigieux contribuent à imposer un caractère de grande ville et à inscrire Montréal dans le cadre du « rêve métropolitain » ;
    • l'âge de la démocratisation (1963-1990), où la fonction dominait largement sur la forme ;
    • l'âge de la rentabilisation (depuis 1990), où plus qu'une activité les arts et la culture sont devenus une véritable stratégie de développement.

    Enfin, Françoise Paulhiac (université Michel de Montaigne-Bordeaux-3, et culture-ville Montréal) évoque les difficultés de la programmation de l'action publique. En s'appuyant sur le cas montréalais, elle présente l'exemple d'une planification urbaine négociée avec la population.

    La troisième partie de cet ouvrage s'intéresse aux « anticipations culturelles. Daniel Latouche (INRS Montréal) y a rédigé un article particulièrement intéressant sur la notion de ville cosmopolite chère à Montréal. Son analyse s'appuie sur le cas des maisons de la culture mais fait également allusion aux bibliothèques. Il rappelle les classiques contradictions entre lieu de diffusion au service de la population d'un quartier et lieu de création localisé dans un quartier mais ouvert sur le monde. Surtout, il montre les limites d'une politique de promotion de l'interculturalité. Celle-ci se résume en effet souvent à la juxtaposition de manifestations relevant de cultures différentes et n'aboutit que rarement à l'instauration d'un véritable dialogue interculturel. Sylvain Lefebvre (INRS Montréal) s'attache à expliquer comment le sport est devenu une composante vitale de nos sociétés urbaines. Il montre l'enjeu que représente la création d'équipements sportifs dans les centres des villes nord-américaines et comment ces projets s'insèrent dans le cadre de ce qu'il appelle la ville festive. Il entend par là qu'il y a aujourd'hui une multiplication des festivals, des fêtes, des spectacles et d'événements divers et que cela prend de plus en plus de place dans les métropoles urbaines. Pour finir, Gilles Sénécal (INRS Montréal) s'interroge sur les équipements « post-modernes ». À travers l'exemple du projet de réseau vert montréalais, il indique que les espaces et les équipements doivent aussi répondre à de nouveaux besoins.

    En conclusion, on notera que cet ouvrage rassemble des textes d'intérêt inégal pour les professionnels des bibliothèques. Certains n'évitent pas l'écueil très universitaire de l'interrogation sur son propre questionnement, qui aboutit parfois à une rhétorique un peu stérile, mais d'autres ouvrent des perspectives de réflexion tout à fait intéressantes.