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    La médiathèque de Bourges

    Par Elisabeth Dousset, Médiathèque de Bourges

    La programmation de la médiathèque de Bourges est le fruit de la petite histoire locale. La bibliothèque municipale, celle issue des confiscations révolutionnaires, a été installée en 1964 dans un hôtel particulier du XVIIIe siècle légué à cet usage définitif (1) . Pour loger toutes les collections, la ville dut acheter deux immeubles contigus et les transformer en magasins sur quatre niveaux et en salle pour les adultes. À peine 25 ans plus tard, les édiles étaient conscients que l'établissement était trop petit : 200 m2sur 1 400 m2 étaient concédés à la lecture publique, pour une ville de 80 000 habitants.

    La médiathèque à construire ne devait pas prendre en compte un déménagement total. Encore fallait-il choisir. L'organisation en accès indirect désignait nécessairement les fonds patrimoniaux et locaux, mais où situer la limite parmi les livres du XXesiècle ? Finalement c'est le CD-ROM BN-OPALE qui fut déterminant : ses notices autorisaient le transfert des livres à la médiathèque, l'absence de notices, le maintien sur place ; il fallait faire vite.

    Les services

    Mais déjà, j'entre dans le détail. Revenons à la programmation. À mon arrivée en 1989, les élus avaient décidé la construction d'une médiathèque ; c'était une idée générale et même vague : ils souhaitaient inclure une artothèque et ne pas trop dépenser pour l'ensemble. J'ai fait plusieurs propositions en insistant sur la priorité des documents à acquérir tels que livres, disques, vidéocassettes. Finalement, les élus se sont rangés à mon avis et ont abandonné l'artothèque. Le programme de construction a alors été rédigé.

    L'informatisation a été préparée en 1990 et mise en oeuvre à partir de 1991. Je la cite à cause de l'organisation prévue : la médiathèque devant être le coeur du réseau composé de la bibliothèque patrimoniale, deux bibliothèques de quartier, un bibliobus, le portage à domicile et, à terme, d'autres collections municipales (musées, muséum...).

    Parmi les services à offrir à la médiathèque, nous avons réfléchi aux partitions et aux méthodes de langues. Sur ces deux points il fallait examiner la situation dans la cité pour créer d'éventuelles synergies. Je me suis donc rapprochée de l'école de musique : la prévision d'une construction plusieurs fois retardée a amorcé une réflexion de restructuration dans cet établissement mais la question des partitions à la médiathèque a été repoussée.

    Quant aux méthodes de langues, il se trouve qu'à Bourges deux propositions existent, toutes deux excellentes : celle de la chambre de commerce et d'industrie, bien entendu payante et même onéreuse, et celle de l'Institut municipal d'éducation permanente, très bon marché. Cette dernière structure pèse sur le budget municipal, il n'était donc pas question de faire double emploi. Mais nous avons installé « les télévisions du monde » en empruntant l'idée et l'expression à la médiathèque de Lorient. C'est-à-dire que nous sélectionnons, sur trois récepteurs de télévision, des programmes uniquement étrangers. Il faut reconnaître que depuis deux mois ceci ne marche pas très bien car nous ne sommes pas compétents pour prendre en charge ce service, asphyxiés que nous sommes déjà par l'afflux massif du public. Nous devons aussi déplacer cette installation dans un lieu plus favorable que le hall d'accueil.

    En fait, nous n'avons donc pas beaucoup de spécificités dans cette médiathèque, la présence de CD-ROM pour le public a été repoussée à plus tard pour des raisons financières. Ce qui nous reste, c'est un tout petit ensemble installé à l'entrée de l'espace pour adultes qui s'appelle "chemins de traverse ». Il a été créé pour aider les jeunes qui quittent leur espace, à aborder celui des adultes ; il l'a aussi été en pensant à tous les adultes, parfois sans référence ni critère de choix, afin de les aider à trouver quelques points de repères. Il ne s'agit pas d'un condensé ou d'une réduction de l'offre générale mais d'une sélection de 2 000 textes au maximum (albums, romans, documentaires) pour ce public ciblé. Si une assistante qualifiée en est particulièrement chargée, c'est toute l'équipe de cette salle qui fait vivre ce petit domaine.

    Voilà, c'est très maigre, c'est tout humble, et avec deux mois de recul seulement, je ne peux vous en dire plus. Ce qui me semble important c'est d'essayer d'avoir un bâtiment suffisamment souple pour pouvoir faire rapidement des modifications : après deux mois d'ouverture nous en sentons déjà la nécessité.

    Médiation ou service social

    Réfléchir à une programmation c'est prendre date pour un rendez-vous avec l'avenir. Au moment de l'ouverture, il y a déjà parfois un décalage. Le public se presse dans les médiathèques avec un enthousiasme dont nous n'avions pas forcément imaginé l'ampleur. Les médiathèques, à la fois lieux de mémoire et de contemporanéité, semblent convenir au public. Mais ne sommes nous pas écartelés entre notre mission stricte de médiateurs de documents et celle de service social, une mission d'éducation ou de complément à l'éducation et une autre d'action culturelle? La programmation semble alors de plus en plus délicate à établir car notre profession est en mutation pour les formes d'intervention - et nos élus ne savent pas très bien ce qu'ils veulent, si ce n'est une bonne fréquentation.

    Il est donc urgent que des études et des recherches soient entreprises pour nous éclairer et nous aider à faire des propositions à nos tutelles. Je veux dire que les quelques certitudes que je pouvais avoir quand j'ai commencé la programmation... sont en train de s'effriter à cause de la réaction du public (2) .

    1. On trouve une description de cet Hôtel Témoin dans le Bulletin d'informations de l'ABF, n° 24 de novembre 1957. Le bibliothécaire de l'époque, Jean Jenny, y affirme qu'il vaut mieux - tenir que courir. et que bâtir une bibliothèque neuve serait un projet satisfaisant à première vue, mais dépassant les possibilités d'une ville de 54 000 habitants... - (NDLR). retour au texte

    2. En janvier 1996, presqu'une année après mon intervention, ma perplexité est moins profonde et l'équipement fait preuve d'une souplesse intéressante. retour au texte