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    La réorganisation en départements thématiques

    Par Anne-Christine Collet, Bibliothèque municipale de Lyon

    Présentation de la bibliothèque de la Part-Dieu

    Le poids de l'architecture

    La bibliothèque centrale de Lyon située dans le quartier de la Part-Dieu, seul établissement concerné par la réorganisation thématique, a été construite en 1972. Pour unbâtiment deprès de27000 m2, 12 000 m2sont réservés au stockage, presque 10000 m2aux circulations et espaces internes. Restent 5 500 m2de salles réellement exploitables ouvertes au public. Ces espaces publics sont répartis sur sept niveaux et cloisonnés en 10 salles de 250 m2à 600 m2sans aucune possibilité d'extension de ces plateaux.

    Organisation actuelle des espaces

    Du rez-de-jardin (niveau - 1 par rapport à l'entrée du public) au 5e étage, la bibliothèque s'organise autour de services traditionnels, de plus en plus spécialisés au fur et à mesure que l'on monte :

    • rez-de-jardin : la bibliothèque-discothèque des enfants ;
    • rez-de-chaussée : la salle de prêt adultes, la salle d'information générale (salle d'actualité, consultation sur place), la vidéothèque, d'abord de consultation sur place, ensuite de prêt depuis octobre 1994, les salles d'exposition ;
    • 1er étage : la discothèque ;
    • 2e étage : deux grandes salles de consultation sur place, l'une consacrée aux lettres (littératures, arts, histoire), l'autre aux sciences exactes et sciences humaines ;
    • 3e étage : la salle de référence (fichiers et bibliographies) ;
    • 4e étage : la documentation consacrée à la région Rhône-Alpes (consultation sur place), Espace patrimoine (espace d'exposition) ;
    • se étage : Fonds ancien.

    Les collections

    Le fonds de la bibliothèque de la Part-Dieu compte plus d'un million de documents. Seuls 140 000 sont en accès direct, dont environ 100 000 au prêt ; 900 000 sont en accès indirect dont 500 000 ne sont pas des documents patrimoniaux.

    Au fil des ans, l'écart entre les secteurs dits « lecture publique (le prêt, la discothèque, la bibliothèque enfants, la vidéothèque et la salle d'information générale) et les secteurs dits « étude (salles de consultation Lettres et Sciences) s'est creusé et les lecteurs pouvaient fréquenter une partie de la bibliothèque en ignorant totalement l'existence d'autres secteurs et d'autres ressources. Les contraintes architecturales et la conception du bâtiment (demi-étages, système complexe d'escaliers, d'ascenseurs et d'escalators ne desservant pas de la même façon tous les étages) renforçaient cette organisation.

    Le projet de départementalisation

    La départementalisation a pour objectif de rompre avec ce fonctionnement et de recentrer la bibliothèque sur les contenus.

    L'idée force du projet part du constat d'une exigence plus grande du public qui veut obtenir dans un domaine spécifique une documentation complète et précise, avec dans le même temps un brouillage des frontières entre les niveaux et les usages.

    D'un point de vue fonctionnel, il s'agit aussi de rompre avec la stratification des bibliothèques selon les médias, qui juxtapose des secteurs en fonction du type de documents et non pas du contenu de ces documents (livres d'un côté, salle des périodiques de l'autre, discothèque et vidéothèque, logithèque, etc.) et ne mélange pas les usages (prêt et consultation sur place, scission particulièrement marquée à la bibliothèque de la Part-Dieu par le grand nombre de documents en consultation sur place).

    Sur ces constations se greffent l'introduction massive des nouvelles technologies et leur intégration nécessaire aux collections comme nouveaux moyens de transmission du savoir et non pas comme nouveaux médias à traiter à part. La bibliothèque doit donc être organisée à partir des contenus, à partir des thèmes, sur lesquels viennent se brancher des outils, des services, des usages.

    Chaque département doit être :

    • multisupport: c'est-à-dire proposer indifféremment des livres, des revues, des vidéos, des CD-ROM, des bases de données...
    • multiservices : accueillir le public et donner les renseignements, offrir des documents en prêt ou en consultation sur place et des places de travail, assurer le suivi (désherbage) et la conservation de ses collections, en promouvoir la mise en valeur (par le biais d'expositions, de rencontres, de conférences...) ;
    • multiniveaux et multipratiques : la distinction entre fonds d'étude et fonds de lecture publique n'existe plus et tous les usages (loisirs, information, éducation, recherche, initiation...) sont possibles et peuvent cohabiter.

    Les premières réflexions sur la départementalisation datent de 1991. Trois départements thématiques préexistent à la réorganisation, le Fonds ancien par la spécificité de ses collections et de son accès, la Documentation régionale par sa thématique géographique, et la bibliothèquediscothèque des enfants par la spécificité de son public.

    Cinq départements sont prévus :

    • le département Sciences et techniques couvre toutes les disciplines scientifiques et techniques (sciences exactes, santé, techniques, informatique, phénomènes inexpliqués et cuisine) ;
    • le département Arts et loisirs regroupe les arts appliqués, la photo et le cinéma (et le fonds de fiction de la vidéothèque de prêt), le tourisme et les loisirs (sports, jeux...), une artothèque est également intégrée à ce département. Rattachée au futur département Arts et loisirs, la discothèque a été, pendant l'été 1994, précurseur puisque tous les documents concernant la musique y ont été regroupés (disques bien sûr mais aussi revues, livres, vidéo en prêt et en consultation sur place) ;
    • le département Langues et littératures doit mettre particulièrement l'accent sur les langues et les littératures étrangères, proposer un fonds conséquent en langues originales et dans la mesure des moyens un laboratoire de langues ;
    • le département Société traite des questions économiques, sociales, sociologiques et juridiques. Il joue un rôle important d'intégration sociale et propose déjà un « Point Ressource qui regroupe une documentation fournie dans les domaines de l'emploi et de la formation ;
    • le département Histoire et civilisation, pendant du département Société, s'inscrit davantage dans une perspective temporelle et couvre l'histoire, l'ethnologie, les religions, la philosophie et la psychologie.

    Mise en place des départements

    La centralisation du prêt en janvier 1995

    Toutes les transactions (prêts, retours, inscriptions) sont regroupées dans le hall d'entrée de la bibliothèque, qui, rénové et réorganisé autour d'un poste d'accueil central permet une meilleure distribution des espaces.

    L'installation du département Sciences et techniques

    Au 3eétage de la bibliothèque, une salle de 275 m2, utilisée pour des conférences, peut être investie. Pourquoi commencer par ce département ? Question pratique : la surface de la salle correspond aux besoins des collections scientifiques. Mais surtout le fonds scientifique et technique permet logiquement d'intégrer les nouveaux médias, propose un niveau de spécialisation moins élevé que les autres départements, et la fonction de transmission du savoir y est plus développée.

    Le département Sciences et techniques doit expérimenter toutes les options choisies pour les autres départements, notamment le classement multisupport qui intègre tous les types de documents et tous les usages sur un même rayonnage ; les usagers trouvent côte à côte les livres, les vidéos ou tout autre type de documents qu'ils soient en prêt ou en consultation sur place. Une signalisation adaptée permet de s'orienter. Les revues sont regroupées sur des tablettes inclinées en début de section, ceci pour des raisons évidentes de présentation.

    La salle destinée au département Sciences et techniques a été rénovée, repeinte et du mobilier neuf a été acheté, d'un modèle complètement différent du reste du mobilier de la bibliothèque puisque toutes les autres salles avaient été équipées il y a plus de vingt ans.

    Redéfinition des espaces

    L'architecture de la bibliothèque correspond au fonctionnement d'origine : spécialisation de plus en plus grande au fur et à mesure que l'on monte les étages et organisation des espaces autour du « silo - 17 étages de magasins - affirmé comme le coeur de l'édifice.

    Il faut repenser ce bâtiment en suivant la logique d'un nouveau type de fonctionnement, sachant que les espaces dévolus au Fonds ancien, à la Documentation régionale et à la bibliothèque-discothèque des enfants ne bougent pas.

    L'installation de salles au rez-de-chaussée où il faudra acheminer des documents du silo pour la consultation sur place (ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent puisque le rez-de-chaussée était consacré au prêt et à la salle d'actualité) nécessite également une réorganisation de la distribution des ouvrages en magasin (environ 500 000 documents hors patrimoine), puisque seuls trois points de distribution existent actuellement : au Fonds ancien, à la Documentation régionale et au 2eétage à proximité des deux grandes salles de consultation (poste central de distribution). Les questions de superficie ne posent pas de vrai problème, les quatre salles disponibles étant à peu de chose près de même surface.

    Autre contrainte, tous les déménagements et travaux éventuels doivent se faire sans fermeture complète de la bibliothèque, mais par "glissements » successifs des collections d'une salle à l'autre.

    Après de nombreuses discussions, une logique s'est affirmée. La grande salle du rez-de-chaussée, proche de l'entrée, accueillera le département Arts et loisirs. Cette salle dispose d'une grande baie vitrée et a toujours été pensée comme la vitrine de la bibliothèque. Le département Arts et loisirs se prête tout à fait à cette fonction notamment grâce à la présence de l'artothèque et à la présentation dès l'entrée des vidéos de fiction et des documents consacrés aux loisirs, sports et jeux... Autre raison pratique liée au prêt d'estampes : il est plus commode en raison des formats des oeuvres et de la manutention qui en résulte de ne pas trop éloigner l'artothèque de l'entrée de la bibliothèque.

    Le département Langues et littératures occupera la seconde salle du rez-de-chaussée. Les emprunteurs de littérature restent majoritaires et il ne paraît pas nécessaire de les faire circuler dans toute la bibliothèque. Enfin, les départements Société et Histoire et civilisation doivent être contigus, les domaines couverts étant très proches ; les deux salles de consultation du 2eétage semblent convenir aux besoins.

    Après analyse, les solutions ne sont plus très nombreuses car elles doivent à la fois intégrer des réflexions intellectuelles et des questions très concrètes de déménagement et de manutention.

    Analyse des pratiques du public

    Ces réflexions sur les espaces et les collections vont de pair avec une analyse des pratiques du public. La bibliothèque municipale de Lyon, comme la plupart des établissements des grandes villes, est massivement investie par les étudiants et les scolaires (plus de 55 % des lecteurs inscrits) et les deux salles de lecture sont devenues de véritables salles d'étude, particulièrement le samedi après-midi. C'est aussi avec cet état de fait que la bibliothèque veut rompre par la départementalisation et le regroupement du prêt et de la consultation sur place. On recherche un mélange des publics.

    La circulation des usagers dans le bâtiment

    La question est complexe car la structure en étages ne facilite pas cette circulation. Inévitablement les usagers devront se déplacer s'ils ont plusieurs centres d'intérêt. On espère pallier cet inconfort relatif par la qualité de l'accueil aussi bien au sein de chaque département que dès le hall de la bibliothèque.

    La signalisation complète de la bibliothèque doit également être repensée et totalement refaite. Actuellement, une signalisation faite de panneaux type Forex et de lettres adhésives permet d'être à jour en dépit des transformations constantes !

    Autre question : les usagers risquent de perdre de vue la globalité de la bibliothèque, si les pratiques diffèrent trop d'un département à l'autre (risque également encouru par les bibliothécaires). Cet inconvénient existe déjà dans l'organisation traditionnelle où coexistent des services consacrés à un seul type de média. Afin de le limiter, des services communs (acquisitions, base bibliographique, informatique, gestion des flux, service du public, animations et relations publiques) sont chargés de maintenir une cohérence transversale entre les différents secteurs de la bibliothèque de la Part-Dieu et entre cette bibliothèque centrale et les quatorze bibliothèques de quartier.

    Après quatre mois de fonctionnement du département Sciences et techniques

    Le département Sciences et techniques a ouvert en septembre 1995 avec un fonds d'environ 12 000 documents, 50 places de consultation, deux postes de visionne-ment vidéo, deux stations multimédia, un poste de consultation Internet, cinq postes équipés de branchements pour ordinateurs portables (1)

    Une première constatation s'impose : 275 m2s'avèrent insuffisants et il semble nécessaire d'investir rapidement la salle des catalogues adjacente.

    Le public réagit de façon fort positive à l'offre thématique et multimédia. Il réclame davantage de nouveaux supports (disquettes, logiciels et CD-ROM) et plus de documents en prêt. Ceci nous conforte dans notre choix puisque l'un des principaux objectifs de la départementalisation est d'augmenter le nombre de documents en prêt (le classement commun des ouvrages permet d'ailleurs d'opérer des changements facilement et de passer des usuels en prêt). Enfin, malgré le mélange d'activités (prêt et consultation sur place) cette salle est très calme et les publics s'y côtoient sans problème.

    L'installation du département Arts et loisirs est prévue pour le printemps 1996. L'ancienne salle d'Information générale sera rénovée et équipée du même mobilier que le département Sciences et techniques.

    Les trois autres départements seront vraisemblablement mis en place d'ici à la fin de l'année 1996 ou au début 1997 sans que la bibliothèque ait les moyens de faire les travaux de rénovation et de modernisation pourtant bien nécessaires. En dépit de ces difficultés, le choix a été fait d'aller au bout du projet, dont la cohérence pour la bibliothèque de Lyon se confirme.

    1. En janvier 1996. Anne-Christine Collet peut compléter l'information donnée en février 1995, lors de la journée d'études (NDLR). retour au texte