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    La tradition judéo-chrétienne et les livres

    Congrès de Montpellier, 6-10 septembre 1999 de l'Association des bibliothèques chrétiennes de France (ABCF)

    Par Jacques Dedeyan, Conservateur en chef BNUS

    R éunissant une bonne cinquantaine de participants, venus de toutes les régions de France, le 16e congrès de l'ABCF, anciennement ABEF, s'est déroulé du 6 au 10 septembre dernier à Montpellier, au Centre Saint-Guilhem, au coeur de la ville historique.

    Il comprenait, comme d'habitude, conférences, nouvelles professionnelles, visites et excursion.

    Il commença, mardi matin, par une conférence, éblouissante de clarté, d'André Gounelle, professeur émérite à la Faculté libre de théologie protestante de Montpellier et théologien, sur La Réforme ef/es/n/res ou plutôt sur les Réformes, y compris la Réforme catholique, dont chaque courant a une interprétation différente de la Bible. Fut présentée la production imprimée du temps de la Réforme : tracts, ouvrages destinés aux catéchètes, ouvrages de piété, traités théologiques.

    Nous étions ensuite conviés à une visite de la bibliothèque de la Faculté de médecine de Montpellier, la plus ancienne de France (1180), logée dans i'aiiexv!r'sièc!e de l'ancien évêché. La bibliothèque possède un fonds ancien très riche (100 000 volumes antérieurs au XIXe siècle, 800 manuscrits, 2 à 300 incunables), constitué par Gabriel Pernelle, professeur de médecine et inspecteur des dépôts littéraires sous la Révolution. Puis nous avons vu la belle collection du Musée Atger, un des fonds les plus remarquables de dessins des Ecoles française, italienne et flamande du xvie au XV!!'' siècle, rassemblés par Xavier Atger, un montpellierain passionné de physiognomie qui en fit don à l'Ecole de médecine.

    L'après-midi, après une présentation de l'ABES par sa directrice, Suzanne Santiago, avait lieu une visite de la Bibliothèque de la Faculté libre de théologie protestante, créée en 1800 à Montauban. Le transfert à Montpellier a eu lieu en 1905. Les fonds comprennent 110 000 volumes (théologie mais aussi philosophie, psychologie, histoire et linguistique), dont 12 000 livres anciens. Comme nous le précisa, au cours d'une réception, le doyen Laurent Gambarotto, la Faculté, installée dans l'ancienne villa de Charles Gide, l'oncle d'André Gide et qui a été agrandie pour y loger les étudiants, constitue avec Paris, Strasbourg et Genève, le principal lieu de formation pour un public de futurs pasteurs mais aussi de laïcs.

    La soirée fut consacrée à une table ronde sur les orientations de l'Association, le rôle du bureau et à une présentation par M. Machelard, son président, de l'Association des archivistes de l'Église de France, forte de 500 membres.

    La journée du mercredi commença par une brillante conférence de Christian Amalvi, ancien conservateur à la Bibliothèque nationale et professeur d'histoire contemporaine à l'Université Paul Valéry, sur le thème suivant : "Les personnages historiques exemplaires des catholiques et de la Réforme, proposés en modèle au peuple et à la jeunesse en France au dix-neuvième siècle (1814-1914)". Cette liste de personnages exemplaires a été établie d'après les nombreuses biographies parues entre 1826 et 1914 et recensées dans le Catalogue de l'histoire de Froncede la Bibliothèque Nationale. Pour les catholiques, dresser la liste de ces personnages, c'est aussi une façon de s'opposer aux adversaires, les libéraux, les républicains. Ce panthéon catholique a une dimension cléricale et, par opposition, il y a des réprouvés, tels Voltaire et les Réformés. Chez ces derniers, on trouve des héros fondateurs (Calvin, Luther, Coligny, le Pasteur Oberlin) mais rien de cette hiérarchie qui existe chez les catholiques. Curieusement, Saint Bernard de Clairvaux va faire l'unanimité dans les deux camps. Frère Antoine Desfarges présenta ensuite le site web de l'ABCF, hébergé sur celui de la Conférence des évêques de France (http ://www. cef. fr/abcf] et ouvert en février. On y trouve de nombreuses rubriques, dont les bibliothèques, classées par région, des liens hypertextes avec d'autres sites (ABF, Bibliothèque nationale de France, le Vatican, etc.).

    L'après-midi, après une démonstration des cédéroms de Bibliopolis par Charles Myara, avait lieu l'assemblée générale au cours de laquelle des informations furent données sur les collections de la Bibliothèque des Fontaines : la Compagnie de Jésus en a cédé la gestion pour 50 ans à la Bibliothèque de la Part-Dieu à Lyon, où elles occupent deux étages et demi sur 17. Les 60 000 Jesuitica ont été mis dans un dépôt, et 1 100 m de rayons en continu ont été dégagés au Centre Sèvres pour accueillir les ouvrages de philosophie. Jesuitica et ouvrages de philosophie seront consultables au Centre Sèvres à partir du 15 octobre. D'autre part, Jacqueline Diot a été chargée d'harmoniser la politique documentaire des bibliothèques parisiennes de la Compagnie.

    Etait prévue ensuite, sous la houlette de son directeur, Gilles Gudin de Valerin, une visite de la Bibliothèque municipale dont les nouveaux bâtiments, oeuvre de Paul Chemetov et Borja Huidrobo, sont situés dans le célèbre quartier d'Antigone, construit par Ricardo Bofill. La médiathèque (15 000 m2) comprend deux bâtiments, l'un, fermé au Sud, réservé à la conservation, l'autre, côté nord, avec une façade en transparence, destiné à l'accueil du public. Les points importants : la place du mu!time-dia, les espaces publics, grands plateaux modulables, 13 magasins (3 m de haut et le quart de la surface) dont certains sont mobiles et où l'on a adopté les normes internationales en matière d'hygrométrie (55 °/o au lieu de 45 °/o pour les normes françaises), la circulation verticale et des passerelles pour passer d'un point à un autre, une organisation en départements thématiques. Les collections patrimoniales avec, en particulier, un fonds de bibliophilie contemporaine (cf don Sabatier d'Espéran) sont regroupées au dernier étage avec, à proximité, une salle de documentation régionale et le Service des archives municipales. Enfin, il existe une salle d'actualité de 500 m2, une salle des collectivités pour les écoles et une bibliothèque de mai-voyants. L'ouverture au public est prévue pour l'an 2000.

    Jeudi, la matinée commença avec la conférence de Danièle lancu, spécialiste du judaïsme provençal : « Du copiste au collectionneur : manuscrits et bibliothèques des juifs de la Provence médiévale". Après avoir évoqué la présence de communautés juives dans le comté de Provence, elle aborda les sources hébraïques : responsa rabbiniques (correspondances entre rabbins), actes notariés qui donnent des exemples sur la circulation de manuscrits hébraïques, contrats de copistes, contrats de mariage, legs testamentaires, inventaires après décès, tel celui d'un médecin juif d'Aix-en-Provence, possesseur de 179 manuscrits (c'est la bibliothèque juive la plus importante au Moyen Âge). Ces bibliothèques juives peuvent même être conservées par les juifs convertis.

    Le reste de la matinée était réservé à un éditeur et à un libraire. Max Chaleil, écrivain et éditeur, présenta la maison qu'il a fondée, les Presses du Languedoc, spécialisée dans le protestantisme et le patrimoine de la région. M. Sevestre, quant à lui, est à la fois directeur de la Librairie Sauramp, deuxième librairie de France et président du syndicat des libraires.

    L'après-midi fut occupée par différentes interventions professionnels : présentation de !'Universitatsbibliothek de Tubingen (http ://uni-tuebingen. de/ub) et de ses réalisations par Thomas Ripplinger, exposé par Jacques Dedeyan sur l'évolution récente du pôle d'excellence Sciences religieuses de la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, (http ://www-bnus. u-strasbg. fr), compte- rendu par Françoise Dupuy (Centre national de pastorale liturgique) des travaux du groupe piloté par Michel Albaric sur le catalogage des livres liturgiques, présentation par son directeur, le Pasteur Bost, d'Eudes théologiques et religieuses, la revue de la Faculté libre de théologie protestante de Montpellier.

    Le vendredi ce fut la traditionnelle excursion : un magnifique périple en car qui nous permit de découvrir Anduze et son vaste temple, le Musée du Désert au Mas Soubeyran, où chaque année, en septembre, ont lieu des assemblées de protestants, les gorges de l'Hérault et la splendide abbaye romane de Saint Guilhem le Désert.