Tenu dans le cadre de l'ouverture du congrès de Dunkerque, ce séminaire a réuni à Lille une trentaine de personnes d'origines diverses : bibliothécaires de lecture publique (BM, BCP), personnels d'administration centrale (Ministère de la coopération, DLL, Ministère de l'Education Nationale), responsables d'associations (La Joie par les livres Afrique/Monde noir, Bibliothèques sans frontières, Regards croisés), un libraire, un élu de la ville de Lille, un bibliothécaire zaïrois et un assistant technique au Cameroun.
D'origines diverses, les participants étaient cependant tous fortement motivés, voire eux- mêmes acteurs d'activités d'échange et de partenariat.
Le résultat d'une année de travail au sein de la commission "francophonie" a servi de point de départ et d'introduction à la réunion. Une réflexion menée avec des partenaires dont certains se retrouvent à cette rencontre a permis de dégager un certain nombre de principes : pourquoi et comment échanger, les règles fondamentales qui permettent de mettre sur pied et de poursuivre des échanges qui doivent s'inscrire durablement dans une politique de développement.
Un mémento de 32 pages a donc été élaboré collectivement, et distribué à tous les participants.
M. Pauwels, élu de la ville de Lille, est chargé du jumelage avec Saint-Louis du Sénégal. Son intervention permet de définir l'un des cadres possibles d'échange : le jumelage de ville à ville. Il décrit le fonctionnement et le contenu d'échanges très anciens, établis principalement dans le domaine scolaire, l'enseignement supérieur, la santé, le développement économique.
La culture y tient peu de place, et le livre n'existe que sous forme de manuel scolaire.
Autre cadre d'échange : l'initiative de l'Etat : l'exemple de la DLL envers les bibliothécaires roumains après les événements de l'hiver 90. Michèle Gasc décrit l'accueil des bibliothécaires roumains en juin 1990. Elle indique que la DLL ne peut que jouer un rôle de coordination et d'incitation d'une aide dans le domaine de la formation professionnelle, et d'expertise et d'assistance dans le domaine de la conservation.
Toujours par rapport à la Roumanie, Alain Bonnefoy, Conservateur de la BM de Caen, décrit la mise en place d'un cadre associatif : Caen, Calvados, Roumanie qui a permis de conjuguer les ressources du financement et les moyens humains d'une ville et d'un département. Le budget est reconductible sur 4 ans. Deux objectifs : le livre (25.000 ouvrages viennent d'être envoyés) et le matériel médical. Alain Bonnefoy souligne les difficultés dues aux incertitudes politiques. Il insiste sur la forte implication des personnels sans laquelle une telle opération n'aurait pû être montée.
Les Amitiés Franco-cambodgiennes sont aussi un exemple de cadre associatif dans lequel se mettent en place des échanges avec Pnom-Penh. Dans un contexte de destruction totale, la demande d'aide est très forte pour la reconstitution de la BN : reconstitution des fonds, formation du personnel, conservation de manuscrits anciens. Les échanges démarrent à très petite échelle, ils doivent être soutenus. Marie Gamonet-Delale, bibliothécaire à la ville de Paris, est membre de l'association "les Amitiés Franco-Cambodgiennes" qui lui a demandé une mission à la BN de Pnom-Penh.
L'après-midi sera entièrement consacrée aux échanges avec l'Afrique. Régine Fontaine, chef du bureau du livre au Ministère de la coopération décrit le cadre institutionnel : 14 pays ont signé des accords de coopération avec la Fran-ce pour le développement de la lecture publique. Il n'y a pas de modèle unique de développement des réseaux. Ceux-ci s'établissent à partir des MJC, ou des mairies, ou encore d'organismes confessionnels. Les accords de coopération prévoient une assistance technique et l'envoi de documents.
Christian Fioretti, assistant technique auprès du ministère de la culture du Cameroun, décrit la mise en place d'un réseau de lecture publique dans ce pays, à partir d'un service central de lecture rattaché à la BN. Cinq BM vont être aménagées dans cinq villes, cinq autres le seront dans une 2ème tranche. Les municipalités sont parties prenantes de ce réseau. La formation du personnel a été mise en place au départ, sous forme d'un premier stage de 3 semaines au début de l'année 90.
La bibliothèque de Rennes, représentée par Jacques Branchu, a depuis plusieurs années développé des échanges avec Bandiagara (au Mali), tandis que le département d'Ille-et-Vilaine jumelé avec la région de Mopti travaille en concertation avec les responsables de l'opération Lecture Publique au Mali. Après plusieurs années, ces échanges dans lesquels les professionnels sont fortement impliqués, s'inscrivent maintenant dans la durée : envoi de documents, aide à la formation professionnelle, échanges de stagiaires, d'écrivains et de conteurs. Ils se placent dans le cadre d'une politique de coopération décentralisée mise en place par la ville et le département qui concerne le développement rural, la santé, l'éducation, la culture.
Avant de détailler comment dans le cadre associatif on peut définir et favoriser les échanges avec les bibliothèques du sud, Jean-Claude Le Dro rappelle quelques principes de base sur lesquels un certain nombre de professionnels et d'associations s'étaient mis d'accord dans le cadre d'un groupe informel "Collectif Afrique", principes qui ont été repris dans les réunions de la commission "francophonie". Bien que faiblement développée, la lecture publique en Afrique a des exigences : . Ce que peut être la lecture publique en Afrique : un décalque de ce qu'elle est en Occident ou une formule originale? Les avis divergent, mais se retrouvent sur le fait que la lecture de loisir n'est pas première.
Ensuite, Jean-Claude Le Dro rappelle l'action de "Regards croisés", association qui est à l'origine de nombreuses actions de solidarité avec des communautés villageoises. Dans le domaine culturel, "Regards croisés" a développé cinq actions : un réseau de bibliocases en Casamance (Sénégal), deux centres de lecture au Sénégal, et l'aide aux manifestations culturelles autour du livre comme le salon du livre de Dakar, rencontres avec des écrivains, conteurs, artistes.
Une autre association : "Bibliothèques sans frontières" s'est fixé pour objectif l'envoi de livres en favorisant la mise en relation des professionnels et le jumelage d'établissements. "Biblio-thèques sans frontières" est présidée par Jacques Cuzin, conservateur à la Ville de Paris.
Cette journée très dense et très riche s'achevait sur un consensus. Celui même qui se trouve résumé dans la brochure : les besoins sont évidents mais pour tenter d'y répondre il faut avant toute chose des principes clairs, une véritable volonté d'échanges et beaucoup de temps.
L'ABF compte continuer à jouer son rôle de mise en relation des professionnels.
L'absence de Francisco d'Almeida, de "Culture et développement" ne doit pas faire oublier son projet "bibliothèques partenaires" auquel se sont rattachées certaines bibliothèques. Les membres de la commission "francophonie" ont rendu leur copie mais ils sont appelés à se retrouver ponctuellement pour gérer et animer cette mise en relation.