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    Autour du patrimoine, quels réseaux

    Séminaire de Valenciennes, 28 septembre 1990


    Le site choisi pour ce pré-séminaire (une bibliothèque municipale classée dans une ville moyenne, Valenciennes), la composition du public présent (BN, BdF, BS) ont permis de rappeler l'extrême complexité de la cartographie du patrimoine des bibliothèques françaises et de renouveler le souhait de l'ABF (cf. "Réseaulument") de ne pas voir s'instaurer un réseau à "plu-sieurs vitesses".

    Le patrimoine des bibliothèques a été abordé de manière dynamique : il a d'emblée été défini comme l'ensemble des documents graphiques, photographiques, imprimés, manuscrits, audiovisuels, magnétiques, etc. à conserver pour l'avenir. En introduction à la journée organisée par Marie-Pierre Dion (BM Valenciennes) et Albert Poirot (BM Dijon), Jean-Marie Arnoult (BN) a rappelé les recommandations du groupe de réflexion "conservation" de la Bibliothèque de France et Albert Poirot a résumé les débats suscités par la réforme du dépôt légal. Anne-Françoise Leurquin a alors présenté la politique de l'I.R.H.T. (C.N.R.S) en matière de reproduction.

    Jean-Paul Oddos (Bibliothèque de France) évoquait quant à lui la problématique de l'information bibliographique spécifique aux fonds anciens.

    Yves Le Rocq (BM du Mans) a récapitulé les actions menées en région au cours des dernières années.

    D. Pallier, Inspecteur Général, a retracé l'essor des bibliothèques de dépôt à l'étranger et explicité les problèmes bibliothéconomiques que posent les silos.

    En conclusion, B. Huchet (DLL) précisait quels contrôles se mettaient aujourd'hui en place pour assurer la durée et la qualité des actions.

    La description du paysage actuel des réseaux en matière de patrimoine a fait apparaître tout au long de la journée encore bien des disparités ou des incertitudes :

    • Sur le plan technique (quelle configuration informatique ? quel mode de reproduction ? quel conditionnement des documents ?) ;
    • Sur le plan des structures administratives et politiques de la France (quel rôle pour les régions ? quel rôle pour les administrations déconcentrées de l'Etat ?) ;
    • Sur le plan de la législation (la propriété des fonds et la notion de classement) ;
    • Sur le plan des réalités quotidiennes (moyens financiers et humains).

    Mais ces dernières années ont été marquées par des choix et des prises de conscience décisifs, par des initiaves individuelles ou concertées qui autorisent un optimisme mesuré. Il convient désormais de favoriser la coordination des actions, de concevoir des réponses d'ensemble à des problèmes envisagés dans leur globalité, de préférer au spectaculaire les mesures d'urgence.

    Deux axes de coopération se dessinent :

    • Le réseau national dynamisé par le projet de la BdF et un dépôt légal déconcentré.
    • Le réseau régional à l'aide des agences de coopération, autour de grandes médiathèques régionales plus ou moins associées avec la BdF.

    Mais d'autres modèles sont possibles pour les élus comme pour les professionnels ou le public et ils doivent étayer les précédents :

    • les réseaux, local et départemental (cf. la BCP de la Loire qui dispose depuis 1987 d'un bibliothécaire spécialisé pour le traitement des fonds anciens des petites communes).
    • le réseau associatif (l'ABF qui favorise la réflexion, l'A.R.D.I.B. ou Association Régionale des Directeurs de Bibliothèques du Nord-Pas-de-Calais comparable à une association de conservateurs de musées, et qui s'est déjà associée autour de certains projets aux collègues des archives et des musées)
    • le réseau à dominante scientifique autour d'un centre de recherche comme l'LR.H.T (C.N.R.S.)

    Les nouvelles compétences des collectivités territoriales permettent toute liberté aux concepteurs de projets. L'exemple des FRAB est ainsi significatif de la marge laissée aux régions.

    Yves Le Rocq a parfaitement décrit les trois thèmes de travail relatifs au patrimoine, privilégiés par la plupart des agences de coopération : sensibilisation, conservation, mise en valeur. Les Agences de coopération ont ouvert des perspectives dans de nombreux domaines mais il reste beaucoup à faire en matière de sensibilisation des élus, de formation professionnelle, de repérage de fonds anciens, de mise en place de plans de sauvegarde.

    Si les objectifs sont clairs, les structures et les méthodes se précisent peu à peu :

    • des structures globales de conservation régionale ou interrégionale sont-elles réalistes ? Ne s'oriente-t-on pas plus vraisemblablement vers un partenariat régional associant plusieurs établissements, les agences de coopération assurant le rôle de pivot ?
    • les nouveaux supports se développent : vidéodisque (fonds iconographiques) CD Rom (catalogue de fonds locaux), DON (presse).
    • des méthodes de catalogage allégées, associées si nécessaire à la photographie des pages de titre s'imposent. Mais il reste à déterminer la liaison entre les catalogues locaux et un réservoir national de notices de livres anciens.

    D'autres domaines devraient retenir l'attention au cours des prochaines années comme la mise en place d'une politique de conservation "à la source" brièvement évoquée. En aval, la notion de réseau aboutit naturellement au concept de silo.

    D. Pallier a opposé la fréquence de ce thème de réflexion en France depuis 1980, à la rareté des réalisations (sauf Centre de prêt et BU parisiennes en projet). Un silo représenterait une véritable "soupape de sécurité" pour les bibliothèques publiques. Il conviendrait donc d'en étudier la viabilité en comparaison avec les modèles scandinaves et de régler quelques problèmes bibliothéconomiques et économiques importants :

    • la propriété des fonds, la désaffection des collections,
    • l'accessibilité intellectuelle et matérielle à ces fonds,
    • la finalité de ces dépôts : peut-il simplement s'agir de "s'alléger" de fonds peu consultés ; ne faut-il pas définir des objectifs nationaux voire internationaux pour espérer des financements...

    MM. Le Rocq, Pallier et Huchet ont chacun à leur manière rappelé la nécessité d'une politique nationale et d'un contrôle pour garantir la durée et la qualité de ces actions.

    Le transfert des compétences aux collectivités territoriales s'est accompagné d'une volonté de contrôle technique accru (décret du 9 Novembre 1988, arrêté du 9 Mai 1989).

    La création d'un Conseil National Scientifique du Patrimoine a permis à l'Etat de se doter d'un outil de définition et de prescription pour une politique nationale. If reste à l'Etat à se donner les moyens de cette politique ...

    • une politique repose sur la connaissance des fonds auxquels elle s'applique. Le recensement (refonte d'un répertoire général des fonds) et le catalogue collectif sont des priorités pour le Conseil et la DLL (rétrocon-version de catalogues à l'étude).
    • une politique repose aussi sur la définition précise des fonds. Le décret du 9 novembre 1988 s'applique aux "documents anciens, rares et précieux" indépendamment de la date et de l'appartenance à l'Etat. Il reste à définir des obligations (fonds classés) pour parvenir à des procédures uniques.
    • une politique homogène doit enfin s'appuyer sur des services d'Etat déconcentrés aptes à établir les priorités et exercer un contrôle (ex: avis sur restauration).

    Au terme de la journée, le cadre régional est apparu comme le niveau de réflexion, de financement (investissement) et de coopération le mieux adapté à la mise en place d'un réseau national véritablement pensé.

    Pour peu qu'une coordination nationale technique mais aussi politique se mette en place entre les collectivités territoriales, les bibliothèques de celles-ci pourraient ne pas manquer le rendez-vous de la Bibliothèque de France.