Index des revues

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    Atelier sur le thème

    Le besoin de recherches sur les bibliothèques dans des contextes multiculturels (the need for research in multicultural librianship)

    Par Michèle Petit, Chercheuse Laboratoire LADYSS, CNRS, Paris

    Cet atelier, coorganisé par la section Études et recherches bibliothéconomiques et la section Services auprès des populations multiculturelles , s'est tenu le 20 août et a rassemblé une quarantaine de participants.

    La section Études et recherches a présenté deux communications, après que Lis Byberg, présidente de la section, eut rappelé que les recherches sur ce sujet étaient rares...

    • 1. L'étude réalisée par Mirja livonen, Diane Sonnenwald, Maria Parma et Evelyn Poole-Kobern, de l'université de Oulu (Tampere, Finlande) avait pour thème : « Analyser et comprendre les différences culturelles ».

    Tout au long de son exposé, Mirja livonen a insisté sur la nécessité, pour les bibliothécaires appelés à être en relation avec des usagers de différentes origines culturelles, d'avoir une meilleure connaissance de ces cultures, et de se défendre de l'ethnocentrisme ou de l'esprit de clocher - la culture étant définie comme quelque chose qui encadre notre vie, influence nos valeurs, attitudes et comportements, mais dont nous pouvons être aussi les acteurs. Elle a également insisté sur les différences dans les formes d'utilisation du langage et les styles de communication, qui peuvent être autant d'occasions de quiproquo, et suggéré que de telles différences soient enseignées aux bibliothécaires.

    À titre d'exemple, elle a évoqué les différences culturelles apparues lors d'un enseignement dispensé simultanément en Finlande et en Caroline du Nord (USA), au cours duquel les étudiants en bibliothéconomie et sciences de l'information de deux universités ont eu des échanges suivis, sous forme de vidéoconférences sur Internet. Elle souligna combien ces étudiants étaient devenus curieux de la culture de l'autre, combien les différences culturelles pouvaient être enrichissantes. Mais elle souligna que les nouvelles technologies ne rendaient pas automatiquement plus aisées une réelle communication et collaboration entre personnes de différentes cultures si leur utilisation n'était pas précédée ou accompagnée d'un effort d'ouverture mutuel.

    • 2. Lors du deuxième exposé, Michèle Petit (Laboratoire LADYSS, Centre National de la Recherche Scientifique, Paris) a présenté une recherche réalisée auprès de jeunes usagers des bibliothèques dans des « quartiers sensibles » des villes françaises. Publiée en 1997 sous le titre « De la bibliothèque au droit de cité », elle a été réalisée à la demande de la direction du livre et de la lecture du ministère de la Culture, ainsi que de la Bibliothèque publique d'information, et avait pour objet d'apprécier le rôle des bibliothèques publiques dans une lutte contre les processus d'exclusion (voir compte rendu dans le Bulletin de l'ABF, n° 175 du 2etrimestre 1997).

    Michèle Petit a rappelé que cette recherche était fondée sur l'analyse des déplacements, réels ou symboliques, que la fréquentation d'une bibliothèque avait rendu possibles. L'attention portée à la singularité des parcours de ces jeunes, à leurs façons de s'approprier la bibliothèque et les biens qui s'y trouvent appelait une méthode qualitative, fondée sur des entretiens approfondis.

    L'analyse de ces entretiens a fait apparaître la multiplicité des formes d'utilisation de la bibliothèque. Parmi celles-ci, Michèle Petit a insisté sur celles qui sont relatives à la construction de soi, peu connues et pourtant essentielles : en élaborant leur subjectivité, ces jeunes se décollent des stéréotypes ou des images stigmatisantes, ils sortent des places assignées et trouvent une marge de manoeuvre dans leur destin individuel et social. Par des trouvailles faites en bibliothèque, ceux qui sont issus de l'immigration en particulier conjuguent leurs appartenances et sont plus capables d'élaborer une identité ouverte, plurielle.

    • 3. Plusieurs expériences de professionnels ont ensuite été présentées par la section des services pour les populations multiculturelles.

    Gary E. Strong, directeur de la Queens Borough Public Library (New York, USA), est intervenu sur le thème « Approches non traditionnelles au service des nouveaux Américains ». Le Queens compte presque 2 millions d'habitants, dont 44°/o parlent chez eux une langue autre que l'anglais. Plus de 100 langues sont en fait parlées dans ce quartier, dont les habitants proviennent de 120 pays, faisant du Queens le quartier ethniquement le plus diversifié des États-Unis.

    Depuis plus de vingt ans, les bibliothécaires travaillent en partenariat étroit avec les organisations des différentes « communautés ». Les collections sont développées et mises à jour en tenant constamment compte de l'évolution de la composition démographique. Soixante-dix cours d'anglais sont assurés par la bibliothèque et incluent une initiation à son usage. Des textes en langue d'origine sont envoyés aux nouveaux résidents. Des services Internet sont à la disposition des usagers ne parlant pas anglais - une initiation à l'informatique et à la navigation sur le Web étant assurée. Par le biais de conférences et d'ateliers, des informations pratiques sont communiquées aux immigrants pour les aider à s'insérer. Des spectacles et animations célèbrent l'héritage culturel de cent nationalités représentées dans le quartier.

    Pour assurer ces services, la bibliothèque a recruté, à tous les niveaux, un personnel de différentes origines linguistiques et culturelles. L'équipe s'est également attachée à définir des catégories susceptibles de rendre compte de la diversité humaine du Queens, en tenant compte de l'âge, des aptitudes physiques et mentales, de la structure familiale, de la catégorie sociale, de l'orientation sexuelle, etc. Des bibliographies ont été élaborées et les collections complétées afin que cette diversité soit reflétée dans la bibliothèque.

    Pour mener à bien ces programmes, les fonds dispensés par l'État et la Ville sont complétés par différentes subventions et par des dons de mécènes privés.

    • 4. Kirsten Leth Nielsen, responsable de la bibliothèque multilingue d'Oslo (Norvège), a fait un exposé sur les services assurés auprès des minorités linguistiques et culturelles : Oslo rassemble 35 °/o de la population d'origine non-européenne vivant en Norvège.

    Kristina Virtanen a présenté la « Bibliothèque multiculturelle établie sur Internet à l'automne 1996, sur l'initiative de la bibliothèque municipale d'Helsinki (Finlande) et de la bibliothèque d'Oslo, pour répondre aux besoins des étrangers vivant dans les pays nordiques.