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L'édition aujourd'hui, l'édition demain : Journées d'études

1980
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    L'édition aujourd'hui, l'édition demain : Journées d'études

    Journées d'études

    Introduction

    Par Marc Chauveinc

    Nous avons choisi cette année comme thème de notre Congrès un sujet vaste et difficile: "L'édition aujourd'hui, l'édition demain". Pourquoi? Il nous a semblé que nous bibliothécaires étions directement concernés par ce qui se passe dans l'édition et subissions directement les conséquences de son évolution. Il a donc paru nécessaire de connaître et de comprendre la situation et surtout l'évolution de l'édition.

    Un certain nombre de facteurs modifient déjà, ou sont appelés à modifier sous peu les conditions et structures de la production de livres et documents. Je dis bien production car à côté de l'édition traditionnelle et commerciale apparaissent déjà des structures de productions différentes comme les ateliers de reproduction offset universitaires ou privés, de grands services de diffusion, de rapports comme le NTIS aux Etats Unis.

    Un des facteurs qui font évoluer l'édition est sûrement le progrès technique: offset, photocopie, microfilm et évidemment l'ordinateur avec la vaste possibilité d'enregistrement magnétique des textes et leur transmission immédiate par les réseaux.

    Un autre facteur est l'audiovisuel qui a été largement étudié sans que la nature de son effet sur l'édition ait été clairement définie. L'audiovisuel n'est pas seulement un concurrent pour le livre, il peut être pour les éditeurs un nouveau moyen de production.

    Le troisième facteur d'évolution est le public : à la fois producteur et utilisateur. On constate un élargissement très important de ces deux catégories. Dans le domaine scientifique comme dans la littérature courante il y a prolifération d'auteurs, les chercheurs, les disciplines se multiplient, chacun devant pour maintenir son statut "produire plus", d'où la multiplication des revues et des livres. Mais il y a dans ce domaine de l'édition scientifique une contradiction qui va conduire à une impasse. Les auteurs écrivent de plus en plus, mais la spécialisation aidant, le nombre des lecteurs pour un texte s'amenuise et ne peut plus justifier une "édition" normale. D'où la quantité de manuscrits non publiés et surtout la création de nouveaux procédés de production (édition à la demande, pré-prints, etc...).

    A-t-on ainsi pris conscience qu'il y a décalage entre le document produit et utilisé par le chercheur (article, chapitre) et le produit de l'édition, revue ou livre, qui est un "emballage" traité comme tel par le bibliothécaire, mais ne correspondant pas au besoin réel du lecteur?

    Par ailleurs, la production imprimée augmente quand même plus que les bibliothèques ne peuvent acheter et plus que les lecteurs ne peuvent lire. Une étude américaine sur LIST montrait que 93% des articles analysés par les "currents contents" n'étaient jamais demandés.

    Il y a donc une production toujours plus grande de revues, d'articles, de livres et de thèses qui ne seront jamais lus ! Dans la domaine de la littérature courante aussi il y a prolifération. Tout le monde, homme politique, journaliste, acteur, cadre, paysan a quelque chose à dire et veut être consacré par un livre. C'est une véritable "graphomanie". On dit l'édition en crise, mais les statistiques du dépôt légal montrent que le nombre des titres publiés croît régulièrement. Avec pour conséquence une situation qui nous paraît, à nous bibliothécaires, dangereuse : les éditeurs publient de plus en plus d'ouvrages de circonstances liés à un évènement très particulier, vite vendus et vite oubliés ; ils renvoient des oeuvres de fond destinés à une vente à long terme. Le livre devient un produit de consommation courant à la vie très courte, fait pour être liquidé et amorti en quelques mois. Ce qui est le contraire d'un livre de bibliothèque. Ceci est inquiétant pour les bibliothèques qui hésitent à acheter un livre dont l'intérêt et la demande ne durera que six mois, mais qui ne trouvent plus les livres de fond édités depuis longtemps et depuis longtemps épuisés.

    Ici apparaît clairement le rôle et la fonction des bibliothèques par rapport à l'édition, car elles sont chargées d'assurer, en permanence, dans les siècles à venir l'accès au document depuis longtemps épuisé dans le commerce. Si les bibliothèques n'achètent pas de document, où pourra-t-on le trouver ? Tous les jours on constate qu'un certain nombre de livres non conservés sont introuvables donc inexistants.

    Nos journées d'études ont été construites autour de ces questions et de bien d'autres.

    Aujourd'hui quatre éditeurs vont nous décrire la situation de l'édition dans chacune de leurs branches, demain quatre carrefours passeront en revue les différents thèmes proposés, l'édition originale, les reprints, l'information du lecteur et les jeunes éditeurs.

    Espérons que ces deux jours vous permettrons de poser vos questions et de repondre aux questions des éditeurs. Il faut préciser en terminant que ces journées ne sont pas conçues comme une confrontation éditeurs/bibliothécaires avec reproches réciproques, mais comme une information, une réponse à de multiples questions que nous nous posons.