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    L'édition scientifique

    Par Jean-Manuel Bourgois, PDG des Editions Bordas

    Vous m'avez demandé de vous dire ce que peut devenir l'édition scientifique humaine dans dix ou vingt ans. Permettez immédiatement aux personnes qui s'attendent à ce que je donne une réponse précise à cette question de quitter la salle. En effet, je n'ai pas de boule de cristal, je ne lis pas dans le marc de café, je ne suis pas Madame Soleil, et je serais bien prétentieux, bien impudent aussi, si je répondais de façon clairement tracée à la question posée.

    Je souhaite faire ce métier encore dix ans, et si je peux relire ces notes en 1990, je voudrais éviter un sens rétrospectif du ridicule ! Cependant, diriger une entreprise c'est aussi prévoir, et il est bien évident que la question que vous me posez, je me la suis posée déjà dans mon entreprise.

    On pourrait hésiter devant deux types de réponse :

    • - la première, celle de l'éditeur-autruche, consisterait à regarder dans le rétroviseur, à se souvenir du métier d'éditeur tel que nous le pratiquions en 1970, il y a dix ans, constater qu'il n'a pas changé de façon visible pendant cette décennie, et donc penser que cette situation va linéairement se prolonger et que nous ferons en 1990 le même métier que nous faisions en 1970 ;
    • - la seconde attitude, à l'inverse, serait de s'empêtrer dans un galimatias à base de télématique, de télétel et de télétext, de bases de données et de gros serveurs, de microédition et d'écrans de visualisation, enterrant bien vite Gutenberg sous ce fatras, et annonçant la fin prochaine de nos maisons d'éditions, des libraires et des bibliothèques.

    Retrouvons-nous s'il vous plait au juste milieu, entre ces deux caricatures. Je pense que notre métier scientifique changera de façon profonde dans les dix ans à venir. Il se transformera, sous la pression des facteurs technologiques, mais aussi de constantes économiques et culturelles. Si je ne peux sortir comme un lapin d'un chapeau le portrait robot de l'éditeur scientifique modèle 1990, je peux essayer de faire avec vous l'inventaire de ces facteurs, de tenter d'en prévoir l'évolution, et de cerner les contours approximatifs de notre métier, tel que j'espère encore le pratiquer dans dix ans.

    Je m'attacherai, ainsi qu'on me l'a demandé, à traiter de l'édition scientifique, c'est-à-dire de l'édition spécialisée destinée aux professionnels de la recherche. C'est en effet un des domaines d'activités de mon groupe, par nos filiales Dunod et Gauthier-Villars. C'est aussi un secteur de prédilection dans l'édition, celui par lequel je suis entré dans la carrière, même si aujourd'hui il ne représente que 20 % de la production dont je suis responsable. Je pense d'ailleurs qu'une partie de ce que nous allons voir ensemble pourrait s'appliquer à l'édition scolaire et universitaire, ou à l'édition de référence, dictionnaire, encyclopédie, atlas, etc...

    Pour essayer de dessiner les changements du métier d'éditeur scientifique, il paraît d'abord raisonnable d'en préciser le rôle actuel. Qu'est-ce qu'un éditeur scientifique, en France, en 1980 ?

    C'est d'abord un éditeur tout court, exerçant à peu près les mêmes fonctions entre l'éditeur et le lecteur que son confrère éditeur de littérature ou éditeur d'albums pour la jeunesse. Quelles sont ces fonctions ? Elles sont souvent mal comprises du public, et même des bibliothèques, sans doute parce que nous les avons mal expliquées dans le passé.

    Mon fils qui a sept ans disait un jour devant moi à un de ses petits camarades: "Mon père est éditeur. Ça veut dire qu'il est dans un bureau. Il a un téléphone. Il parle. Les autres écrivent".

    D'autres, à peine mieux renseignés que mon fils, voient dans l'éditeur une sorte de Maître Jacques un peu imprimeur, un peu emballeur, un peu chauffeur-livreur, un peu libraire.

    Beaucoup ignorent les trois composantes essentielles de ce métier :

    • - la recherche volontaire de textes à publier : l'an dernier sur 200 titres nouveaux publiés par mon groupe, aucun ne nous était parvenu "tout court" par la poste. L'éditeur recherche, selon les axes de développement qu'il s'est assigné, les textes à publier. Il doit généralement, après avoir incité les auteurs à les écrire, contrôler ou faire contrôler leur réalisation.
    • - c'est la deuxième fonction, ce que les anglais appellent "editing" et que nous n'arrivons pas à traduire facilement. Traditionnellement en France, le mot "éditeur" désigne le chef de maison et lui seul. Chez nous, c'est la description d'une fonction bien précise : il y a des assistants d'édition, des éditeurs, des responsables d'édition, des directeurs d'édition, etc. Dans notre département Sciences et Techniques, ils - et elles - sont près de vingt à assurer ces tâches. Il s'agit de mise en forme et de contrôle de qualité. Il s'agit de faire la liaison entre les besoins du public et les intentions des auteurs. Si par exemple notre nouvelle collection d'informatique lancée il y a deux ans s'est bien développée, c'est parce que nos éditeurs, consultés par des professionnels, enseignants, chercheurs, praticiens, ont défini des niveaux précis d'écriture, des limites précises aux sujets traités, et sont parvenus à faire respecter ces limites et ces critères de qualité à nos auteurs.
    • - la troisième fonction de l'éditeur, -c'est souvent la moins connue, et c'est peut-être la plus difficile, c'est d'assurer la diffusion de ses livres. S'il n'était que façonnier, une sorte de maître imprimeur-relieur, son métier s'arrêterait à la porte de l'entrepôt, les livres dormiraient bien sagement sur leurs palettes. Au contraire, c'est la responsabilité de l'éditeur que de les en faire sortir et de les mettre dans les mains du lecteur. Il y est pressé par deux sortes de contraintes, bien différentes mais convergentes :
      • - des contraintes économiques: l'immobilisation du stock, c'est aussi une charge financière, un investissement improductif, une perte de substance qui peut être fatale à l'entreprise:
        • - des contraintes éthiques, voire contractuelles :ensignant le contrat d'édition il s'est moralement engagé à diffuser le plus largement possible l'oeuvre de l'auteur, s'il n'y parvient pas, il perdra cet auteur, et n'aura guère d'arguments pour en convaincre d'autres.

    Ces trois fonctions : la recherche de textes, leur mise en forme optimale, leur distribution aux lecteurs, se retrouvent à des degrés divers dans tous ces types d'édition. L'éditeur de littérature générale interviendra peut-être moins dans la rédaction proprement dite. L'éditeur scolaire, par contre, y sera très profondément engagé. Pour l'éditeur scientifique, je crois qu'il a aujourd'hui à intervenir à part égale sur ces trois fronts. Il est d'ailleurs significatif de constater que leur poids économique est comparable :

    • • 10% de droits d'auteur sur le prix public
    • • 15 à 20% de frais d'édition sur le chiffre d'affaire net
    • • 10 à 12% de frais de promotion sur le chiffre d'affaire net

    Comment vont donc évoluer les trois composantes de notre métier dans les dix ans qui viennent ?

    Il faut d'abord rappeler que l'éditeur scientifique n'est pas maître du jeu :

    • - en amont, la qualité des textes qu'il peut publier dépend de la qualité de la recherche dans son pays. L'édition scientifique française pour ses livres comme pour ses périodiques, ne peut qu'être le reflet de la recherche scientifique française. Notre vocation première n'est pas en effet de traduire des ouvrages étrangers, issus de la recherche anglo-saxonne par exemple. "Donnez-nous de bonnes mathématiques, - ou de bonnes physiques, - et je vous donnerai de bons livres".
    • - en aval, la diffusion de ces textes dépend en grande partie des moyens financiers dont disposent les institutions de recherche publiques et privées pour acquérir nos publications. S'il n'y a pas de crédits pour acquérir ces livres, pour renouveler ces abonnements, inutile de chercher à les publier. La seule parade à une baisse du marché local, c'est la recherche de marchés extérieurs. Comme nous le verrons plus loin, ces marchés sont très concurrentiels et très onéreux à pénétrer et à développer.

    Dans les années à venir, le développement de l'édition scientifique française, avant même d'envisager l'évolution des technologies d'édition et de distribution, dépendra donc d'abord :

    • 1.de la qualité de la production scientifique;
    • 2. des moyens financiers disponibles pour acquérir notre production.

    Pour ce qui est de la qualité de la production. - et d'ailleurs aussi de la quantité, nous ne disposons d'aucun élément précis sur la politique scientifique à long terme. Bien malin qui pourrait dire ce que deviendra l'enveloppe des crédits pour la recherche scientifique française sur une aussi longue période de temps ? On connaît par contre les priorités de la recherche scientifique française, les secteurs où elle s'est bien développé depuis quelques années et ceux qui semblent en déclin. Le journal Le Monde publiait hier la liste des seize principaux projets de recherche pour la décennie 80/90. On peut raisonnablement penser que la meilleure partie des résultats scientifiques en France suivront ces directions. On note, par ailleurs, que les responsables de la recherche sont aussi soucieux d'en assurer la diffusion. On constate par exemple que le CNRS suit de très près depuis quelque temps les problèmes de l'édition scientifique et de sa diffusion. La création de la MIDIST (Mission interministérielle pour le développement de l'informatique scientifique et technique), va aussi clairement dans ce cas.

    Les éditeurs scientifiques français devront donc aligner leur politique d'édition avec les grands axes de la recherche en France. Ils devront assurer, en liaison avec ces organismes, une politique de contrôles de qualité, tant de la qualité intrinsèque des textes qu'ils publient que de la qualité de leur édition. L'appareil bibliographique l'index, les illustrations ou les graphiques, la présentation physique des livres devront répondre aux normes plus rigoureuses que dans le passé.

    Pour ce qui est des précisions d'ordre économique, sur l'évolution de la bulle de ces marchés spécialisés, et du pouvoir d'achat des chercheurs institutionnels, nous ne disposons d'aucun élément. Si nous ne faisons qu'utiliser la méthode empirique en extrapolant sur les années à venir les tendances constatées sur les dernières années, le pronostic n'est guère brillant. En France, - comme d'ailleurs dans beaucoup d'autres pays que nous n'avons pas à envier, et au premier rang les Etats-Unis, - les crédits gouvernementaux pour l'acquisition des livres et revues scientifiques n'ont suivi ni inflation, ni évolution des effectifs de la recherche. Rien ne m'autorise à penser que dans le climat économique prévisible à moyen terme cette tendance puisque se renverser. Je voudrais à propos citer le cas d'une très grande bibliothèque universitaire française. Elle disposait en 1972 de 1200 abonnements payants, en 1980, les nombres des abonnements payants est réduit de à 180. Viennent s'y ajouter 133 titres servis gratuitement, soit 40 % des titres disponibles. Doit-on admirer au passage les talents de persuasion de la bibliothèque, où les dons masochistes des éditeurs de ces revues gratuites ? Dans la seule année 1974, cette Bibliothèque universitaire a dû supprimer 555 titres, dont par exemple Le Journal de physique, le Bulletin de l'Institut Pasteur, les Annales de l'Institut Henri Poin-caré, etc...

    La tendance en France comme ailleurs est donc à une formidable compression des crédits d'achats, qu'il faut rapprocher de l'inflation très forte des coûts de production des livres et revues.

    L'Associations STM a d'aileurs à la suite d'un sondage, pu établir que la diffusion de soixantes revues scientifiques de diffusion internationale n'avait augmenté que de 1,6% en huit ans, alors que le nombre de scientifiques intéressés par les sujets traités avait augmenté bien au delà de ce chiffre.

    Si donc les coûts de production et de distribution augmentent, si les enveloppes budgétaires se resserrent à la peau de chagrin inflationniste, il est temps de sortir l'arme miracle, le remède à tous nos maux, les nouvelles technologies d'édition. Je voudrais avant d'aborder ce chapitre prendre deux précautions oratoires :

    • - premièrement, je ne suis pas un spécialiste des techniques télématiques de traitement et de transfert de données. Je n'entrerai donc pas dans l'analyse fine des réseaux qui se mettent en place, de leurs avantages respectifs, etc...
    • - deuxièmement, je ne suis ni papetier, ni marchand de plomb ou d'encre d'imprimerie: je n'ai donc aucun intérêt particulier à vouloir, soit défendre d'arrache pied les techniques actuelles d'édition, soit condamner d'avance de nouvelles techniques "sans papier".

    Je voudrais citer quelques extraits de mon ami et collègue anglais Gordon Graham, aujourd'hui Président de Butterworth, et qui m'a appris beaucoup de ce que je sais, lorsque lui et moi étions ensemble chez Mc Graw Hill. Lors d'une conférence EURIM à Bruxelles, en mars 1980, Gordon Graw Graham a dit ceci : "Il n'y a rien de plus difficile pour les imprimeurs que de faire face à l'adaptation technologique - un ordinateur à la place d'une presse ; un écran vidéo au lieu du papier. De toute façon, la grande majorité des imprimeurs et des libraires, de même qu'une grande majorité d'éditeurs, continuera pendant des générations à servir le mot imprimé au lettré.

    "L'éditeur de manuscrit du futur sera le plus souvent son propre typographe. Il corrigera la copie avec le clavier au lieu du stylo. Les petits éditeurs fleuriront du fait de la capacité à composer et imprimer soi-même. Les grands éditeurs, pour des oeuvres complexes qui demandent de nombreuses révisions, seront à même d'éditer de nouvelles éditions avec plus de rapidité et d'économie.

    "Quoi qu'il en soit, les implications de la base de donnée dans les nouvelles méthodes de composition n'ont pas encore été surmontées par la plupart des éditeurs professionnels. L'ordinateur désoriente. Il vole beaucoup plus haut que leurs limites traditionnelles. Il homogénéise la connaissance. Il ignore les langages. Il triomphe de la distance. Il précipite dans une vision de l'immédiat les enthousiastes, pour qui l'éditeur avec son sens ennuyeux de la précision, son insistance critique sur le style et son attachement exaspérant à la forme, peu apparaître comme un empêchement à l'histoire. Qui a besoin de lui? Nous avons des corps de métier électroniques se lançant occasionnellement dans l'édition; des auteurs ambitionnant de devenir leurs propres éditeurs; et des bibliothècaires qui se voient plus comme des propagateurs que comme des grands magasins, chacun d'eux pouvant nuire à la chaîne auteur-éditeur-imprimeur-libraire-bibliothécaire-lecteur, vieille 500 ans, et miner le dispositif de coût et le bouclier du copyright qui lui a donné sa force.

    "Aucune des fonctions de l'éditeur n'est abolie par la nouvelle technologie. Les mots sur un écran doivent être écrits par quelqu'un qui a besoin d'encouragement et d'aide. Ils doivent toujours être édités. Ils doivent toujours être présentés lisiblement et de manière attractive. Les auteurs doivent toujours être payés et leurs mots protégés. Le service devra toujours être vendu. La question n'est pas comment effectuer ces fonctions : mais qui les effectuera dans l'ère post-Gutenberg".

    Après ces quelques remarques empruntées à mon collègue anglais, je voudrais, puisque je parle à des bibliothécaires, ne pas esquiver un sujet quelquefois difficile, celui justement des relations entre éditeur scientifique et bibliothécaire et l'évolution possible de ces relations au fil des années.

    Le dialogue entre nous peut souvent être rendu difficile par une apparente contradiction entre nos objectifs à court terme :

    • - vous qui cherchez à fournir un maximum d'informations avec un minimum de moyens financiers,
    • - nous qui devons vendre l'information qui nous est confiée par l'auteur, au meilleur prix pour assurer la rentabilité de nos investissements et le développement de nos entreprises.

    Un exemple classique de cette dualité vient tout de suite à l'esprit avec le problème de la photocopie. Je vous dirai d'emblée que ce n'est pas le sujet de notre rencontre aujourd'hui, et que je n'ai pas l'intention de m'enferrer dans une discussion stérile, et vite hostile, sur le problème de la reprographie, de l'usage privé du copiste et autres méfaits de la maison Xerox. Je prendrais simplement le cas de la reprographie comme un bel exemple d'introduction d'une nouvelle technologie qui bouscule le cycle, la boucle établie depuis cinq siècles de l'auteur au lecteur. Or cette technologie, - reprographie -, est en elle-même beaucoup moins porteuse de mutations que les technologies informatiques qui auront des applications beaucoup plus ouvertes, des conséquences beaucoup plus profondes sur la relation auteur-éditeur, éditeur-lecteur ou éditeur-bibliothèque. Nous sommes nombreux à penser que cette affaire de la reprographie a éclipsé, et continue de cacher les autres problèmes beaucoup plus graves, et que nous risquons de préparer encore plus mal l'adaptation de notre métier à la télématique que nous ne l'avons préparé à la reprographie.

    La mise en place en France d'une taxe sur la reprographie avait représenté une solution originale, en avance par rapport aux autres pays. Or, que constate-t-on ? Les bénéfices de cette taxe ne sont que très faiblement utilisés pour protéger l'édition scientifique : environ 20 % du montant de la taxe seulement est mise à la disposition des Bibliothèques universitaires pour acquérir des livres ou périodiques scientifiques français, le reste est surtout utilisé dans les Bibliothèques centrales de prêt pour acquérir des ouvrages d'intérêt général, dans les catégories qui souffrent probablement le moins de la reprographie. Si les dispositifs comparables sont mis en place, comme il en est question, pour contrôler et rémunérer l'emploi de données à travers les réseaux télématiques, il faut souhaiter que ce soit fait avec une meilleure préparation et une meilleure précision que ça n'a été le cas pour la reprographie. Il faut souhaiter que les conventions internationales existantes, dont la France a été souvent l'artisan et le défenseur, puissent être adaptées à ces nouvelles techniques et non pas tournées par elles. Il faut souhaiter que leur mise en place ne soit pas faite au seul avantage d'un des maillons de la chaîne auteur-utilisateur, favorisant peut-être un jour celui qui disposera du contrôle de ces moyens pour léser à terme l'ensemble des partenaires.

    Si les éditeurs doivent s'adapter à l'emploi de ces nouvelles techniques, former leur personnel, modifier leurs équipements ou ceux de leurs fournisseurs, ils doivent pouvoir disposer des garanties nécessaires, tant pour eux que pour les auteurs. Un système anarchique ou incontrôlé qui lèserait à terme les éditeurs et les auteurs scientifiques ne pourrait avoir que des conséquences néfastes : il amènerait non seulement l'arrêt de la production d'information scientifique d'origine française et de dissémination en France et à l'étranger, mais il permettrait son remplacement par des informations contrôlées par d'autres groupes plus puissants et mieux protégés, soit grâce à leurs moyens financiers, soit grâce à l'emploi de réseaux internationaux dans lesquels les producteurs d'information scientifique français auraient un rôle minoritaire ou nul.

    Si nous voulons pouvoir nous retrouver dans dix ans et encore parler d'édition scientifique française, il est évident que nous saurions examiner avec beaucoup de sang-froid, et sans passions partisanes, les conséquences déjà prévisibles de ces nouvelles technologies scientifiques :

    • 1. les droits des auteurs sur leur oeuvre ;
    • 2. les méthodes de travail des éditeurs, leur transformation, le coût de ces transformations et la rémunération de ces coûts ;
    • 3. le rôle des bibliothèques comme centre de disposition de ces informations ;
    • 4. le réseau de commercialisation, dont nous avons peu parlé, mais qui en France et à l'étranger s'appuie aujourd'hui de façon essentielle sur les libraires ;
    • 5. les habitudes des lecteurs-utilisateurs, auxquels très probablement il faudra offrir une information a double soutien, texte imprimé d'une part, texte vidéo d'autre part.

    Une évolution de l'édition scientifique française qui ne tiendrait pas compte de chacun de ces cinq points et qui ne respecterait pas les droits de chacun des partenaires de l'acte de création et de diffusion aurait, à mon sens, des conséquences très néfastes. Je suis persuadé qu'au-delà de l'égoïsme sectoriel, au-delà de la protection des intérêts particuliers de tels partenaires de l'acte d'édition, qui nous avons encore le moyen de protéger et de développer ensemble nos activités.