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Utilisation du CD-ROM de la Bibliographie nationale française

1994
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    Utilisation du CD-ROM de la Bibliographie nationale française

    A la médiathèque de la Villette

    Par Maria Witt
    Par J.-P. Pagès , Médiathèque de la Villette

    Contexte

    Avant d'évoquer les effets bénéfiques de la récupération de notices pour le catalogage courant à la médiathèque de la Villette, il nous semble utile de rap- peler quelques faits. Au début des an- nées 1980, pendant que dans le monde anglo-saxon les bibliothèques partici- paient au catalogage en réseaux ou ré- cupéraient les notices des réservoirs pour leur propre catalogage, en France on pratiquait encore le catalogage ori- ginal qui pesait lourdement sur l'activité de chaque bibliothèque. Cette question cruciale a été évoquée au congrès de l'ABF de Nantes, en 1987 : l'annonce de la BN-OPALE, automatisée depuis 1985, précisait les modalités futures de la ré- cupération des notices. Lors d'une jour- née d'étude sur le « marché des notices bibliographiques », en juin de la même année, une motion était adoptée (1) affir- mant qu'il était « nécessaire et urgent d'avoir accès aux notices françaises et étrangères par l'intermédiaire d'un ré- servoir national [... et que] la fourniture de produits bibliographiques adaptés aux besoins des bibliothèques » était une priorité. Il était évident qu'en l'ab- sence d'un réservoir français, les biblio- thèques françaises allaient se procurer les notices à l'étranger. Dès cette épo- que certaines BU ont commencé à par- ticiper au réseau OCLC (2) .

    Contraintes et nécessités

    Pendant cette période, la jeune média- thèque de la Villette, bibliothèque pu- blique regroupant des collections de vulgarisation scientifique, ouverte en mars 1986, était informatisée à l'aide de deux systèmes : MEDICIS pour les acqui- sitions, le catalogage, la gestion de la reliure et GEAC 8000 pour l'OPAC et le prêt.

    Le système MEDICIS fonctionnant sur la base de la description ISBD ne permet- tait pas la récupération des notices. L'annonce de la société GEAC faite au congrès de Nantes en 1987, stipulant que les bibliothèques utilisant ce logi- ciel pouvaient récupérer des notices de n'importe quel réservoir en n'importe quel format MARC (des réservoirs tels que RLIN, UTLAS et OCLC ont été cités), ne nous concernait malheureusement pas, car le logiciel GEAC n'était pas no- tre base de travail. Il a fallu attendre quatre ans encore pour récupérer la première notice.

    Entre-temps, d'autres bibliothèques commençaient à participer à BN-OPALE (bibliothèque Sainte-Geneviève) ou ré- cupéraient des notices pour leur propre catalogage (BM de Lyon : récupération par requêtes dès la mi-1987) (3) . En tenant compte des observations de ces biblio- thèques et en testant le taux de recou- vrement de la Bibliographie nationale française et des bases étrangères (OCLC - test de recouvrement en 1988, RLIN - tests en 1989-1990, participation au test du CD-ROM pilote de la Bibliographie nationale française en 1988...), nous faisions des évaluations, et attendions le changement de système - qui est sur- venu à la fin de l'année 1990.

    Une des premières exigences du cahier des charges pour le nouveau système était la récupération des notices. GEAC 9000 (GLIS) pouvait assurer cette fonc- tionnalité. Pour une harmonisation du catalogage, une « nouvelle » étape commençait. Cependant, nous ne nous faisions pas d'illusions : le catalogage, en tant qu'activité, ne disparaîtrait pas, mais la récupération des notices allége- rait cette tâche, et surtout améliorerait l'information de l'utilisateur final.

    Lors du changement de système, nous avions songé à récupérer la totalité du fonds à partir de BN-OPALE, mais nous avons renoncé à le faire, car nous au- rions perdu des informations locales, en particulier les liens avec les autorités. Chez GEAC, il manquait la fonction « chargeur des autorités ».

    Le CD-ROMde la Bibliographie natio- nale française, paraissant à intervalle régulier, offrait la possibilité de la « ré- cupération des notices à la carte » et c'est cette solution que nous avons choisie pour le catalogage courant et pour rattraper le retard de traitement dans les acquisitions récentes - causé par le changement du système. De plus, la nature des acquisitions des livres de la médiathèque (en majorité en langue française et édités en France) s'y prêtait bien. Jusqu'à aujourd'hui, le CD-ROMde la BNF reste la source unique de nos récupérations.

    Modalités du fonctionnement de la récupération

    Nous avons dans la base biblio- graphique de la Villette près de 4000 notices provenant de la BN. La récupé- ration a été mise en place en août 1991, après une période de tests durant la- quelle 25 % des notices ont été rejetées, pour des raisons techniques. Une fois les problèmes éliminés, nous avons commencé l'utilisation régulière.

    Ce travail complète le travail » tradition- nel du catalogage original, toujours in- dispensable pour des documents dont les notices ne figurent pas dans le CD- ROM : documents trop récents, étran- gers, littérature grise, numéros spéciaux de périodiques, livres publiés par les petits éditeurs, etc. Pour certains d'entre eux, nous espérons trouver les notices dans la base en ligne du SBN, qui complétera prochainement notre mode de récupération.

    Organisation pratique et procédures

    A la médiathèque, chaque service thé- matique (au nombre de six) assure la gestion du circuit des documents qu'il acquiert. Conformément à cette organi- sation décentralisée, chaque service a pris en charge la récupération des no- tices de ses collections, qui est... une autre façon de cataloguer. Un seul poste de lecteur de CD-ROM existe à la mé- diathèque au sein du service de l'Har- monisation du catalogage, ce qui oblige à en planifier la consultation. La récu- pération se déroule « livre en main ". Un micro-ordinateur donnant accès à la base GEAC est situé à proximité immé- diate car une intervention sur la notice interne est quelquefois nécessaire : l'a- jout de l'ISBNs'il manque dans la notice en provenance du module des acquisi- tions (ACQ). En effet, dans GEAC-GLIS, gérant à la fois les acquisitions et le ca- talogage, une notice minimale, servant à la commande, est créée dans le mo- dule des acquisitions et elle « passe » en- suite dans le module du catalogage (BPS) et dans l'OPAC. Le module des ACQ n'est pas basé sur le format MARC : lors du passage vers BPS, la notice est transformée et ses éléments sont placés dans les zones UNIMARC corres- pondantes sans que celles-ci soient dé- taillées (par exemple, la structure en sous-zones est inexistante). La notice récupérée du CD-ROM se superpose à la notice déjà existante dans le module BPS, mais ne la remplace pas. L'iden- tification se fait par le numéro ISBN. En cas d'absence de l'ISBN dans la notice locale, son ajout est nécessaire (suivant les services, les ajouts de l'ISBN concer- nent 25 à 30 % des notices). Si la zone de l'ISBN n'est pas corrigée, un doublon s'ajoute dans la base GEAC que le bibliothécaire devra supprimer (la no- tice venant des ACQ ayant des zones exemplaires attachées, il est très compliqué de reporter ces zones d'une notice à l'autre). Le transfert passe par l'intermédiaire d'une disquette conte- nant les notices sélectionnées du CD- ROM par le bibliothécaire.

    Le service informatique participe acti- vement à la récupération. L'équipe ex- ploitation effectue le transfert du fichier de la disquette dans un fichier CD- ROM » sur GEAC, grâce au logiciel de transfert de fichier GTALK. La troisième étape est le chargement du fichier « CD- ROMdans un fichier de sessions d'en- trée (VBTRFl), puis le chargement de ce dernier vers la base réelle (VBTRF2). Au cours de cette dernière étape des mises à jour sont faites en temps réel et un compte rendu en est édité à cha- que transfert. Ces opérations intervien- nent très rapidement après la sélection des notices par le bibliothécaire.

    Afin de garantir un bon déroulement de la récupération, nous avons pris le temps nécessaire pour la formation du personnel et pour la rédaction de ma- nuels d'aide. Ainsi la récupération de notices a été de plus en plus bénéfique au catalogage.

    Évaluation

    Dès le début, le gain de temps était un des objectifs de la récupération. Le ma- nuel élaboré en août 1991 contenait non seulement les procédures pratiques de la récupération, mais aussi les règles de complément de catalogage des no- tices récupérées et le tableau d'évalua- tion à remplir par les utilisateurs. L'ana- lyse des tableaux remplis (parfois par- tiellement, car dépendant de la bonne volonté des participants) permet au- jourd'hui de constater un gain de temps de traitement, par rapport à la période où le catalogage à la médiathèque était entièrement original. Ce temps est au- jourd'hui divisé par quatre (4) .

    Le taux de recouvrement

    Le taux de recouvrement se situe entre 53 % et 76 % et dépend :

    • du fonds, du thème, de la nature des collections ;
    • du niveau de publication ;
    • de l'état de la collection à récupérer (réceptions plus ou moins récentes, ou- vrages fournis plus ou moins rapide- ment par le fournisseur, etc.) ;
    • de l'actualité du CD-ROM.

    Ce taux est souvent plus élevé à l'arri- vée d'une mise à jour et baisse au fur et à mesure de son vieillissement ". L'évaluation du taux de recouvrement est basée sur les documents potentiel- lement " trouvables dans le CD-ROM. Cependant, il est tout à fait possible que la préparation des ouvrages à récupérer soit légèrement différente d'un service à l'autre. Ce n'est pas un hasard si le service préparant le plus soigneuse- ment ses échantillons selon leur date de dépôt légal obtient le taux le plus élevé. Parfois, le bibliothécaire ne s'attend pas à trouver certaines publications et oh ! l'heureuse surprise ! Ainsi, quelques fonds du secteur « entreprise » ont pu être rapidement catalogués grâce à la récupération : par exemple les docu- ments édités par Precepta, Eurostaf, la direction du journal officiel.

    Nous n'avons pas une évaluation détail- lée de la proportion générale des ou- vrages catalogués grâce à la « récupéra- tion BN» par rapport à l'ensemble des acquisitions. Néanmoins, une estima- tion peut être faite pour certains ser- vices. Par exemple, pour le service Mé- decine-Santé le taux de la récupération est de 30-40 % suivant les périodes (ce taux rejoint celui que cite G. Boisard en 1989) (5) .

    Complément du catalogage

    La notice récupérée est créée dans le module du catalogage en version de tra- vail ; celle-ci, complétée et validée, remplace la version maître en prove- nance de module ACQ. En règle géné- rale, on limite au strict minimum les in- terventions sur une notice BN. Les compléments nécessaires sont :

    • 1. ajout de l'indexation matière en zone 610 de l'UNIMARC et du lien avec le fi- chier d'autorité (la médiathèque gère son propre fichier d'autorité matière) ;
    • 2. liens des vedettes auteur avec le fi- chier d'autorité auteur personnes et col- lectivités ;
    • 3. lien de la zone 410 (collection) à la notice de la collection ;
    • 4. ajout d'une zone locale (955) préci- sant le niveau de la publication ;
    • 5. mise à jour de la notice exemplaires : saisie de la cote et des données liées aux exemplaires.

    La notice BN est récupérée en sa totalité mais les éléments bibliographiques pro- pres à un catalogage «complet» (par exemple, des zones de l'UNIMARC 606, 960, 210$e, 210$g, 010$b, 010$d) ne gênent pas le lecteur car, pour la plupart, elles n'apparaissent pas dans l'OPAC (6) .

    En revanche, certaines informations peuvent être utiles au bibliothécaire, par exemple :

    • les zones 606 et 960 peuvent le guider dans l'indexation matière ;
    • pour renseigner un lecteur sur le prix de l'ouvrage (la notice peut s'afficher en format MARC dans l'OPAC mais cette information n'est accessible qu'au bibliothécaire), etc.

    Bien évidemment, les notices élaborées pour la Bibliographie nationale fran- çaise nous intéressent en premier lieu. Les notices « dépôt légal », « légères » de par leur nature, demandent un complé- ment du catalogage plus important.

    Néanmoins, nous les récupérons du CD-ROM car leur forme nous paraît meilleure que celle des notices GEAC en provenance des ACQ. Il semble que la proportion des notices dépôt légal » est plus ou moins importante, selon la date de la récupération. Pour le service Biologie-Enfant, elle varie entre 11 et 25 %.

    Le temps de la consultation du CD-ROM et de la sélection des notices par le bibliothécaire est connu. La plupart des services « récupérateurs » fournissent des statistiques en la matière : le temps moyen par notice cherchée se situe en- tre une et deux minutes.

    Le traitement informatique des notices sélectionnées est très court, néanmoins il faut l'inclure dans la chaîne. Le ser- vice informatique fournit l'évaluation depuis la mi-1992 du temps passé au transfert. Ce temps moyen par notice est d'environ 12 à 15 secondes et dé- pend de la disponibilité du système, de la longueur des notices, du nombre des mises à jour, etc.

    Le temps de complément de catalogage est moins bien maîtrisé. Nous ne dispo- sons que des données fournies partiel- lement par le service Mathématique - Informatique... (pour 1991 et 1992) d'après lesquelles on peut calculer le temps moyen consacré au traitement d'un ouvrage, en cas de récupération. Les étapes additionnées donnent un temps de 13 minutes : la sélection, le transfert et le complément de catalo- gage (un peu plus de la moitié de ce temps global). Le même service consa- crait au début de la « récupération ", en 1991, près de 20 minutes par ouvrage.

    Par rapport à la période d'avant 1990, on constate un gain de temps considé- rable, puisque l'on consacre quatre fois moins de temps à un ouvrage dont la notice a été récupérée. Et on y gagne en qualité... même si l'on constate quel- ques anomalies dans les notices BN.

    Conclusion

    L'utilisation des notices récupérées s'est avérée positive après une période de réticences dues aux modifications ap- portées au circuit du livre. Le temps consacré à la préparation, à la re- cherche, à la sélection des notices dans le CD-ROM et à la mise à jour de l'ISBN paraissait un surcroît de travail. Il a fallu motiver les bibliothécaires afin qu'ils mesurent les apports de cet outil de ca- talogage.

    Les statistiques établies ont ainsi permis de prouver un gain de temps lors du catalogage grâce aux notices de la BN. Mais certains contestent encore l'utilité de reprendre les notices du dépôt légal seul ; en effet, elles n'accélèrent pas vraiment le catalogage car elles ne four- nissent que quelques zones. L'indexa- tion de la BN est également consultée par les membres du comité d'indexation matière de la médiathèque. Elle leur donne des indications précieuses pour l'établissement des vedettes matières lo- cales.

    Dans la formation des catalogueurs, les notices BN récupérées sont aussi utili- sées comme une première étape. La no- tice récupérée de la BN présente donc l'intérêt d'être un » support d'enseigne- ment et de formation. L'affichage des différences entre les notices permet de constater clairement l'amélioration de la qualité et de l'exhaustivité de la notice récupérée par rapport à la notice mini- male générée par le module des acqui- sitions.

    Outre l'aspect d'outil de formation continue, le catalogage de la BN permet et impose le réajustement du catalogage local. La cohérence des accès pour les collectivités auteurs, le traitement des congrès nombreux en sciences et des autres cas délicats exigent l'application de normes sans lesquelles on ne pourra espérer un réseau d'échange. La récu- pération apportant déjà une plus grande qualité au traitement, implique donc de notre part une exigence de qualité interne à la médiathèque.

    La présence dans l'OPAC de notices à deux niveaux de catalogage, de plus en plus fréquentes, devrait être considérée comme une meilleure information du pu- blic. Pour que le public bénéficie d'une information plus complète, on pourrait envisager de redéfinir l'affichage dans l'OPAC, certains éléments étant invisibles aujourd'hui. L'intégration du CD-ROM de la BN dans le circuit du livre est enfin un atout pour la mise à disposition des ou- vrages en service public. La récupération des notices nous libère un temps qui permet à chacun de participer à d'autres tâches du service.

    Il reste cependant des progrès à faire : plus d'un livre sur deux ne bénéficie pas du catalogage de la BN et cette aide précieuse n'accélère pas toujours la mise en rayon. C'est dans cette optique qu'il faut envisager une meilleure utili- sation de l'outil BN-OPALE. La récupé- ration sur le serveur en ligne nous ap- paraît comme la prochaine étape indis pensable à franchir, à condition que l traitement de BN-OPALE soit encon plus efficace et nous apporte une aidi réelle en qualité.

    1. Le marché des notices bibliographiques en France : motion ». in : Bulletin d'informations de l'Association des bibliothécaires français, n° 136 (3e trim. 1987), p. 51. retour au texte

    2. Dans l'article Les bibliothèques universitaires, dix ans après le rapport Vandevoorde Pierre Car- bone affirme : l'insertion dans les réseaux infor- matisés de catalogage s'intensifie à partir de 1987 et modifie les méthodes de travail.. ln : Bulletin des bibliotbèques de France. - t. 37, n° 4, 1992, p. 46-58. retour au texte

    3. Informations fournies à la journée d'études de l'ABF(15 mars 1991) Diffusion des notices biblio- graphiques et d'autorité en France. - dialogue en- tre producteurs et utilisateurs retour au texte

    4. Pour la période 1988/1989 nous avons fourni une évaluation à Geneviève Boisard pour l'enquête sur le coût de catalogage. Cf. Le coût du catalo- gage : essai d'évaluation d'après quelques biblio- thèques françaises ». - In : Bulletin des biblio- thèques de France. - t. 34, n° 4, 1989, p. 330-339. retour au texte

    5. Op. cit., p. 332. En revanche, la création de no- tices était de 38 % à la bibliothèque de l'université d'État de l'Ohio (en 1975, avec OCLC) et de 71 % en 1970, avant l'utilisation d'OCLC. D'après Georges Harris, Évolution du catalogage aux États-Unis, évaluation des coûts In : Bulletin des bibliotbèques de France. - t. 34, n° 4, 1989, p. 340- 351. retour au texte

    6. La norme de catalogage allège. étant appli- quée à la médiathèque pour le catalogage local, il n'y a aucun conflit entre les notices créées locale- ment et les notices en provenance de la Biblio- grapbie nationale française. retour au texte