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Questionnaire à propos des activités internationales des bibliothèques universitaires françaises

1986
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    Questionnaire à propos des activités internationales des bibliothèques universitaires françaises

    Par Alban DAUMAS-FLOCIA, Directeur Bibliothèque de l'Université de Nice

    Ce qui est surprenant et très satisfaisant c'est le nombre important des réponses reçues (questionnaires remplis : 70 dont 68 exploitables) qui couvrent tout le pays : la province et la région parisienne. Ce qui est rare pour Paris et ce qui prouve que les bibliothèques et les universités parisiennes avaient beaucoup à dire.

    Nous avons des réponses concernant 53 établissements distincts (et donc parfois des réponses personnelles multiples pour une même université). Les réponses des bibliothèques spécialisées ou de grands établissements sont à noter.

    A tous ceux qui ont répondu merci. J'insiste sur ce bon résultat qui prouve que cette enquête par questionnaire a été bien ressentie comme concernant une partie importante de notre travail. A la question : "votre université est-elle dotée d'une structure chargée de la coopération internationale ?" il y a 68 réponses (le tri des doublons n'a pas été fait). Ce qui est étonnant et serait peut-être à vérifier ce sont les réponses négatives (8). Il y a lieu de penser que quelques universités (très rares) n'ont pas une véritable structure spécialisée chargée de la coopération internationale mais que c'est un autre bureau ou division ou commission qui s'en occupe.

    Il y a une étonnante variété de chiffres pour la réponse à la 2ème question : "combien d'accords lient votre université à des universités étrangères". Cela va de 1 (!) à 150 (!) avec une moyenne regroupée vers 25, 30, 32, 41 accords. Certains ont distingué des accords formels d'autres ont répondu accords nombreux ou multiples.

    Avant d'aller plus loin, et de voir quelle est la répartition géographique de ces accords passés par les universités françaises avec des universités étrangères, on peut s'interroger sur la politique menée par nos universités et sur le contenu réel des accords conclus ou des conventions passées les unes avec les autres. Nous n'avons pas à juger mais nous pouvons réfléchir à cette question : quels sont les résultats obtenus, combien de ces accords durent et accroissent les actions qu'ils sont censés soutenir ?

    Quoiqu'il en soit la répartition géographique des pays avec lesquels nos universités ont des relations contractuelles donne les chiffres que voici : Europe 41, Afrique (francophone surtout) 42, Amérique du Nord 35, Amérique du Sud 24, Asie 20, Australie et Océanie 4. Rien de bien surprenant sinon peut-être la part relativement importante prise par l'Amérique du Sud. Sont signalés en plus : Asie islamique et le Moyen Orient.

    Ce qui est beaucoup plus étonnant et même fâcheux c'est la constatation que nous sommes obligés de faire devant les réponses fournies à la question n 3 : " dans combien de ces accords est-il fait mention des bibliothèques des universités en question (9) de documentation (13), d'information scientifique et technique "(10), c'est peu, c'est très peu. Et encore il semble que quelquefois il y ait à ce propos une simple mention pour la forme dans un article perdu quelque part dans l'accord signé entre l'université française et l'université étrangère. Nous sommes obligés de déplorer cette faible place prise par les bibliothèques et la documentation dans les relations internationales de nos universités et nous devons comprendre d'une part que les accords dont nous parlons cachent souvent la réalité de simples échanges de visites entre chercheurs et des envois personnels de tirés à part, rapports confidentiels ou autre littérature grise.

    A ce point de ce rapport de synthèse si nous comparons nos résultats et nos commentaires avec le document officiel diffusé par la DBMIST (comme suite à son propre questionnaire) nous pouvons remarquer que ce sont trois bibliothèques universitaires parisiennes (BDIC, PARIS VIII, PARIS X) seulement qui concrétisent au niveau de la documentation des accords passés par leurs universités avec l' étranger. En province et outre mer, 5 BU ou BIU pas plus déclarent participer à des accords avec des BU étrangères. Nous verrons pourtant plus loin des chiffres meilleurs concernant les échanges de documentation, les visites ou voyages à l'étranger, etc. Il y a donc une certaine activité internationale dans nos bibliothèques mais le plus souvent elle ne suit pas un cadre formel.

    Concernant la participation à des organismes internationaux, les réponses à la 4ème question sont bien intéressantes d'abord par la grande place prise par l'AUPELF : 31 réponses positives pour cette association, suivie par l'IFLA (18) et Liber (12). Sont cités ensuite une quantité invraisemblable de sigles que je n'ai pas pu tous identifier et que je livre à votre sagacité (ou à votre perplexité): AIESI, MLAI, CIRECCA, UNICA, CREI, ANSULF, MELCOLM. Il y a là une simple constatation à faire: n'est-ce pas se disperser beaucoup et ne vaudrait il pas mieux vraiment être actif et participer à une ou deux associations mais y être nombreux, reconnus, puissants ? Avec la question n°5 nous arrivons à des questions concernant les personnes, je cite les chiffres ils ne sont pas très élevés puisque 43 bibliothécaires seulement (parmi ceux qui ont répondu évidemment) ont participé à des réunions à l'étranger, 33 en qualité d'auditeur et 27 en qualité d'intervenant.

    Je vous laisse apprécier vous-même la faiblesse de ces chiffres. Les chiffres donnés pour répondre à la question n°7 sont meilleurs : 43 conservateurs disent qu'ils parlent couramment ou comprennent aisément l'anglais, 24 l'allemand, 14 l'espagnol, 8 l'italien (pas de réponses pour le russe, le chinois, l'arabe !)

    Il y a beaucoup à dire à propos des réponses concernant la question n°8 "Avez-vous personnellement fait en 1984 (13) ou 1985 (19) un voyage d'études à l'étranger". Est-ce que ces chiffres sont satisfaisants, oui en apparence, les Français ont été si longtemps casaniers que les voir sortir quelque peu de leur fameux hexagone est une heureuse surprise. Il reste que cette évolution est probablement récente et qu'ici l'action des pouvoirs publics et des associations est certainement prépondérante.

    C'est en effet ce que remarque aussi le rapport de synthèse de la DBMIST : qui distingue les missions d'études menées à l'étranger relativement nombreuses depuis quelque temps (G.B, R.F.A, U.S.A.) les voyages d'études proposés par des associations étrangères professionnelles (British Council, Deutches Bibliotheksinstitut), les programmes d'échanges de personnel (très rares pour le moment), les missions d'enseignement (Algérie, Portu-gal, Tunisie, Vietnam, Ile Maurice (B.U. de la Réunion).

    Le point fait par les réponses au n°9 du questionnaire est rapide, trop rapide sans doute et il aurait fallu sans doute insister sur l'intérêt pour les relations internationales de nos établissements, d'avoir des fonds spécialisés. Il n'empêche, ces fonds sont nombreux et couvrent beaucoup de domaines : langues étrangères (Paris IV : allemand, russe, italien ; Ste Geneviève : fonds nordiques, B.L.O. (évidemment Orient, Extrême-Orient, Afrique) ; Lyon : E.U., G.B. ; Stras-bourg bien sûr fonds germaniques...). Il resterait à savoir comment et pourquoi ces fonds se sont constitués (à part quelques évidences) et quelle est leur place dans le paysage documentaire français et même européen.

    Avec les réponses faites à la question n°10, nous arrivons à des limites basses vraiment étonnantes : 8 personnes seulement connaissent plus ou moins bien les activités de la DG XIII de la Commission des Communautés Européennes. C'est un constat bien inquiétant à la fois pour notre pays, pour l'Europe qui veut se construire, pour nos bibliothécaires. Car les publications européennes qui parlent des activités "du marché de l'information et de l'innovation" sont gratuites et elles arrivent ou pourraient arriver partout semble-t-il dans nos établissements mais alors c'est qu'elles ne sont pas lues ou que vraiment les renseignements qui s'y trouvent ne nous intéressent pas ? ! ?

    Les mêmes observations peuvent être faites à propos des réponses à la onzième question : mais ici les réponses "oui" sont plus nombreuses : 29. Il reste quand même que 49 personnes disent ne pas connaître le programme international d'information de l'Unesco (le bulletin trimestriel dit de l'Unisist est gratuit et envoyé régulièrement sur simple demande !)

    A la moitié à peu près de la synthèse d'exploitation du questionnaire qui a donc été envoyé à toutes les B.U. françaises on peut déjà faire des réflexions générales sur l'attitude et l'aptitude des conservateurs français vers les activités internationales : bien qu'ils soient peu renseignés sur ce qui se fait dans cet ordre d'idées (réponses faibles aux questions 11 et 10) nos collègues ont fait ou feront des voyages d'études à l'étranger (réponse 8), dans les pays de langue anglaise ou américaine, allemande ou espagnole (7). Ils sont assez volontiers des participants ou même des intervenants dans les réunions, congrès, séminaires ou assemblées générales de nombreuses associations (réponses 6, 5, 4). Et finalement ils ont bien du mérite car les universités où ils travaillent s'intéressent plus que modérement aux bibliothèques et à la documentation. Cette dernière observation est capitale, elle fait comprendre les contrastes que l'on va trouver dans les réponses à la deuxième partie du questionnaire.

    Ainsi, nous avons comptabilisé 62 réponses oui à la question : "faites-vous des échanges de publications avec l'étranger" (question 12), ces échanges se faisant très exactement à 50 % par les canaux d'institutions officielles (Service des échanges internationaux 25, Service des échanges universitaires 24) et à 50 % par voie directe (50). Il y a donc une volonté forte d'organisation et de poursuite de ces échanges de publications malgré une satisfaction moyenne sur leurs résultats (question 13 : 'satisfaits de ces échanges 29, peu satisfaits 18). Peu d'entre-vous ont dit le pourquoi de cette satisfaction ou non satisfaction et quand c'est le cas il y a de forts contrastes : "échanges satisfaisants nous y gagnons beaucoup, nous recevons des périodiques étrangers que nous n'achèterions pas" mais aussi "Sans intérêt; Publications reçues en retour médiocres".

    Même partage à 50/50 pour les dons faits aux bibliothèques étrangères (question 14) OUI 38, NON 37. Encore faudrait-il savoir pourquoi on fait des dons, et ce que l'on donne (qualité, quantité). Mais enfin personne n'invoque notre grande pauvreté qui est bien réelle pour ne rien envoyer en don à l'étranger.

    Certains arrivent même à vendre des publications à l'étranger (question 15 : réponses positives 29) et en tirent donc quelques bénéfices. Il reste que les réponses faites aux questions 12, 13, 14, 15 montrent une véritable indifférence de certains conservateurs aux activités internationales possibles de leurs bibliothèques, activités qui peuvent être pourtant assez facilement entreprises s'agissant des échanges et des dons.

    Constatons aussi que la participation de nos établissements à l'élaboration de bibliographies internationales est bien faible (8 OUI 61 NON comme réponses à la question n°16) N'y aurait-il pas moyen de faire mieux et d'avoir dans ce domaine une présence plus grande ?

    Malgré tout, les bibliothèques françaises sont visitées par de nombreux collègues étrangers. Mieux même, elles reçoivent beaucoup de stagiaires de multiples nationalités mais provenant surtout d'Afrique du Nord, de la Péninsule Ibérique et de l'Afrique francophone. Cela se comprend aisément à travers la question 17 et dernière du questionnaire.

    J'ai dit plus haut que je vous parlerai des bibliothèques universitaires installées dans les départements d'outre-mer. Je tiens à le faire car nos collègues de la Réunion et de la Guadeloupe ont bien du mérite, isolées et éloignées qu'elles sont de la métropole de s'occuper aussi des relations internationales de leurs établissements. Sachez-le, la bibliothèque universitaire de la Réunion fait partie d'une association internationale pour la recherche et le développement dans l'océan indien (AIRDOI) et dans les six accords passés par son université avec des universités étrangères il est fait chaque fois mention de la bibliothèque universitaire. Les réponses sont positives à toutes les questions dont je viens de parler et la bibliothèque universitaire de la Réunion est ressentie comme un élément important pour l'information scientifique et technique dans cette région et comme indispensable centre de formation de personnels. Bravo donc pour la bibliothèque universitaire de la Réunion et bravo aussi pour celle de la Guadeloupe, qui tiendra sa place dans tous les accords passés par l'Université de la Guadeloupe, qui fait partie de plusieurs associations (IFLA, AUPELF, AABDFC, CIRECCA, ACUREL, UNICA) dont le personnel assiste à des réunions internationales, et qui participe à la constitution d'une bibliographie internationale.

    Il me semble que ces deux exemples sont significatifs et devraient nous donner à réfléchir. D'autres réponses intéressantes pourraient être citées mais je ne veux pas aujourd'hui ni demain faire un palmarès. Il faut pour conclure dire que le problème des relations internationales de nos bibliothèques universitaires et de leur importance a été bien perçu par nos collègues. Le paysage que j'ai esquissé pour vous est bien rempli de multiples activités et d'efforts parfois pleinement couronnés de succès, parfois suivis de résultats décevants. Que ce soit à Brest ou à Caen, à Reims, à Paris dans les bibliothèques universitaires, les bibliothèques interuniversitaires, dans les bibliothèques de grands établissements, à Aix-Marseille, à Amiens ou Bordeaux, comme à Stras-bourg, nous faisons beaucoup de-choses dans ce domaine. Sans doute faudrait-il presque partout de meilleures relations d'abord avec nos universités pour mieux connaître leurs activités internationales et y prendre une part, sans doute aussi faudrait-il nous concerter, et concentrer nos efforts sur des pays et sur des domaines importants ou sensibles. Mais malgré de bien faibles encouragements officiels pendant des années et des années, beaucoup de nos collègues ont travaillé pour développer les relations internationales de leurs établissements. Qu'ils en soient félicités et qu'ils soient remerciés ici de leurs réponses c'est le voeu que je formule.